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L'année du volcan

L'année du volcan

Titel: L'année du volcan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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dites pas que vous étiez sans jugement sur la question, je ne vous croirais pas.
    — Non pas, et pour deux raisons. Primo je n’entends pas, quel que soit mon attachement vis-à-vis de la reine, avoir la moindre part à une dissimulation vis-à-vis du roi. Secundo, je n’aime point Trabard et la solution qu’il a avancée ne recueillait point mon approbation.
    — Je vais poursuivre dans la curiosité. Quelle était cette solution ?
    — Je suis homme de raison et ferme dans mes convictions. Aussi bien ce qui fut suggéré au conseil me sembla si invraisemblable et extravagant que je ne pouvais me résoudre à m’en satisfaire et encore moins à l’approuver.
    — Mais encore ?
    — Trabard proposait que l’on recourût à un empirique qui aurait la réputation de transmuter des espèces banales en or et, dans ce cas précis, des pièces d’argent en pièces d’or sonnantes et trébuchantes. Rien de moins, Ranreuil, imaginez-vous ! Tous applaudirent d’enthousiasme et je me retirai, n’en voulant pas en entendre davantage.
    — Et cet alchimiste, car c’est ainsi qu’on nomme, je crois, ce genre d’expérimentateurs, qui est-il ?
    — Vous en avez sans nul doute entendu parler. La mode régit la France, et Paris en particulier. Ce personnage, un certain Cagliostro, hante depuis longtemps nos salons et nos boudoirs.
    Le nom n’était pas étranger à Nicolas qui consultait toujours avec assiduité et attention les rapports des inspecteurs de police et les relations des nombreuses mouches qui, dans tous les milieux, recueillaient nouvelles et ragots.
    — Certes, n’est-ce pas cet étranger protégé du cardinal de Rohan, qui s’en est entêté, arrivé, il y a quelques années, de Strasbourg à sa suite. Celui-là même qui a défrayé la chronique par ses récits incroyables et ses guérisons miraculeuses ?
    — Cet homme-là ! Et savez-vous, Ranreuil, ce qui m’étonne le plus, c’est de voir des hommes raisonnables en faire l’éloge, le porter aux nues, et avaler ce qu’il leur débite au détriment de leur intelligence, ce fâcheux histrion.
    Besenval secoua la tête avec énergie et disparut un instant dans un nuage de poudre.
    — Savez-vous, reprit-il, qu’un personnage aussi froid et raisonnable que M. de Vergennes en est arrivé à chanter ses louanges. Quel vertige général s’empare-t-il des esprits ? Déjà avec le baquet deMesmer les bien portants se tenaient pour malades et les mourants s’obstinaient à se croire guéris ! Est-ce l’ennui de la société qui l’incite ainsi à l’aventure ? Et je cite Vergennes, mais il n’est point le seul. Chacun se jette à sa tête et la loge maçonne d’Isis, que dirige sa femme, compte les femmes des plus grands noms de France.
    — Et c’est à cet homme que l’on confie la réputation de la reine ? J’ose à peine le croire. L’avez-vous rencontré ?
    — Ah ! La plaisante question. Je ne le voulais voir. Or précisément ce soir je suis convié à souper chez La Borde, notre ami commun. Cette invitation a trois prestiges, l’hôte m’est cher, sa femme est charmante et la chère est délicieuse. Or il veut me présenter l’animal en question. Au début je renâclais à cette idée, mais au fond je ne suis pas mécontent de pouvoir me former un jugement sur pied. Mais… J’y pense, vous m’allez accompagner et nous demanderons à souper pour vous selon l’usage. Je suis assuré que notre ami sera ravi de vous recevoir et nous aurons ainsi l’occasion de sonder de concert le mage en question.
    — Je ne sais… Et ma tenue…
    — À ce que l’on dit, mon cher, votre naturelle séduction vous vêt davantage que toutes les soies de la terre ! Je vous emmène.
    Besenval toisa Nicolas de l’œil.
    — J’y songe. Nous sommes à peu près de la même taille. Montons à mes appartements. J’ai là un habit de satin bleu sombre que mon embonpoint ne me permet plus de porter. Il me guinde ! Passez-le, il vous ira comme un gant. Allons ! Point de manière. Entre soldats, car Ouessant ce n’était pas rien ! Que diable, vous êtes le fils de mon ami Ranreuil. Savez-vous qu’il me sauva la vie d’un parti de cavaliers qui me voulaient embrocher ? Vous le garderez en souvenir de moi.
     
    Nicolas se laissa convaincre, suivit le comte à l’étage et se changea. L’habit lui allait à ravir. Il plia sa précédente défroque, l’emporta et la déposa dans son fiacre. Ils montèrent dans la

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