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L'année du volcan

L'année du volcan

Titel: L'année du volcan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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hélas que trop de puissances, aristocratiques ou financières, et je ne parle pas du clergé, semblent se disputer une renommée d’imprudence et d’arrogance et concourent pour tomber plus avant dans le mépris de la nation. Entendons avant qu’il soit trop tard ces avertissements. Le peuple est avide de ce triste spectacle dont au mieux il se désole et au pire s’indigne. Non qu’il soit mauvais ou méchant, mais il voit et entend ce qu’on s’évertue à lui faire sentir, souvent à juste titre. Le mouvement est comme la vague de la marée, on ne l’arrêtera plus.
    — En sommes-nous vraiment parvenus à ce point-là, monseigneur ?
    — Prêtez l’oreille à la chronique, et l’affaire que vous me présentez en est un exemple supplémentaire, il n’est de bruit que des infamies de ce qui a un rang, un titre, une fortune. Qu’un scandale vienne à éclater qui éclabousse le trône, les conséquences en seraient… Je n’ose y penser. C’est vous dire que le silence est une obligation absolue dont je sais que vous ne vous départez jamais.
     
    Les deux policiers quittèrent l’hôtel si étonnés de ce qu’ils venaient d’entendre qu’ils demeurèrent longtemps silencieux. Ce fut Bourdeau qui le premier rompit ce mutisme.
    — Vois-tu, je n’imaginais pas M. Le Noir aussi conscient des périls qui montent. Il dissimule bienson jeu ! Son côté débonnaire ne donne pas la mesure de sa pénétrante intelligence.
    — Suis-je assez mal entouré ! Entre les sermons de Noblecourt, les inquiétudes de Le Noir et tes continuelles objurgations, comment conserverais-je l’âme légère ?
    — Allons, il s’agit au mieux de prévenir. Toute lamentation sert comme d’un clou à un soufflet. Tu sais bien au fond que ce que tes amis avancent correspond à ce que tu n’as cessé d’observer depuis des années. La difficulté, c’est que tu te refuses à en tirer les conséquences. Écoute ton bon cœur.
    — Soit. J’y réfléchirai. Pour l’heure, nouveau plan de bataille. Nous passons au Châtelet voir si Lambroie est enfin décidé à parler.
    — À mon avis il ne fournira pas de quoi alimenter le caquet. Ces hommes-là ont coutume de choisir entre deux inconvénients. Le risque que nous représentons lui paraît sans doute de peu de poids par rapport à la menace qui pèserait sur lui s’il vidait son sac.
    — Je vois que tu as entière confiance dans la sûreté de nos geôles, remarqua Nicolas ironique.
    — Les précédents abondent, tu le sais bien, quelles que soient les précautions que l’on peut multiplier.
    — Ensuite, visite au curé de Saint-Sulpice.
    — Tu ne préfères pas courir rue d’Enfer ?
    — Point ! Si nous y allons trop tôt dans la journée, ils soupçonneront l’urgence et nous alimenterons la suspicion qu’un fait nouveau est intervenu. Ils seront alors sur leur garde.
    Bourdeau regarda son chef avec admiration.
    — Tu songes à tout. Voilà une subtilité à laquelle je n’aurais pas pensé.

    La prédiction de Bourdeau se révéla fondée et le ferrailleur de la cour du Dragon s’obstina dans un silence hostile. Il n’y eut rien à en tirer. Au moment où Nicolas et Bourdeau s’apprêtaient à rejoindre Saint-Sulpice, une mouche de Rabouine, essoufflée, surgit et remit un petit mot au commissaire qui en prit aussitôt connaissance et le tendit à Bourdeau.
    L’inspecteur lut le billet :
    — «  Nicolas, la souricière a fonctionné. Un suspect est tombé dans le piège. Je maintiens le dispositif et ramène en discrétion l’intéressé au Châtelet . »
    Peu de temps après, Rabouine fit irruption dans le bureau de permanence, tenant fermement par le bras le suspect qui s’était présenté chez le ferrailleur. Nicolas conserva le silence et détailla le nouveau venu. Cette habitude, tout en permettant quelques déductions, avait pour but initial de mettre l’objet de l’examen dans le malaise de l’incertitude. Il en venait à suer la peur et n’en était alors que plus malléable.
    L’homme, de taille moyenne, paraissait âgé d’environ quarante ans. Sa chevelure brune parsemée de cheveux blancs était nouée par un ruban noir. Il était vêtu d’un surtout de drap vert sans doublure, d’une veste de nankin, d’une culotte de satin noir et de bas de filoselle blancs. Ces derniers désignaient une certaine position dans la société : ceux qui se déplaçaient en voiture et ne craignaient pas de souiller leurs

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