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L'arc de triomphe

L'arc de triomphe

Titel: L'arc de triomphe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: E.M. Remarque
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toutes vos roses et ne me demandez pas un prix exorbitant…
    –  Pour vous ce sera soixante francs. Parce que vous m’avez donné une prescription pour mon rhumatisme.
    –  Ça vous a fait du bien ?
    –  Non, bien sûr. La seule chose qui me ferait du bien, ce serait de ne plus me tenir dehors la nuit, par tous les temps.
    –  Vous êtes vraiment la plus raisonnable de toutes mes patientes. » Il prit les roses et les posa sur le plancher de la voiture. « C’est pour m’excuser de t’avoir laissée t’éveiller toute seule ce matin. Veux-tu que nous allions boire quelque chose ?
     –  Non, allons chez toi directe ment. Tiens, mets les fleurs sur la banquette, elles y seront mieux que sur le plancher.
    –  Elles sont bien où elles sont. Il faut aimer les fleurs, mais il ne faut pas trop s’en occuper.
    –  Tu veux sans doute dire qu’il ne faut pas exagérer l’importance de ces belles choses ?
    –  Mais non. Je veux simplement dire qu’il ne faut pas trop exalter les belles choses. Et puis, pour l’instant, il vaut mieux n’avoir même pas de fleurs entre nous. »
    Jeanne le considéra d’un air quelque peu perplexe, puis son visage s’éclaira.
    « Sais-tu ce que j’ai fait aujourd’hui ? J’ai vécu ! Oui, j’ai vécu ! Respiré, existé. Pour la première fois depuis si longtemps, j’ai senti tout à coup que j’avais des mains, des yeux et une bouche ! »
    Une secousse du taxi projeta Jeanne contre Ravic. Il la retint un instant dans ses bras, et sentit son corps tout près du sien. C’était une brise chaude, qui faisait fondre toute la dureté de la journée, toute la froideur défensive qui s’était amassée en lui. Elle continuait, emportée par son sentiment exalté.
     
    « Oui, le jour tout entier s’est jeté à mon cou, s’est blotti sur ma poitrine, comme s’il avait voulu que je prenne racine et que je fleurisse. Le bonheur m’a tenue et ne m’a pas lâchée une seconde. Et maintenant je suis là… et toi… »
    Elle s’était penchée en avant sur le siège de cuir sali. Ses épaules dégagées par la robe du soir semblaient briller doucement. Elle parlait spontanément et sans fausse honte. Elle disait ce qu’elle ressentait, et par comparaison il se trouva aride et desséché.
    « Je faisais des opérations, pensait-il. Je t’ai oubliée. J’étais avec Lucienne. Ou quelque part dans le passé. Sans toi. Puis le soir, une sorte de douceur m’est venue. Je n’étais pourtant pas avec toi. Je pensais à Kate Hegstrœm. »
    « Jeanne, dit-il en prenant ses mains dans les siennes. Nous ne pouvons pas aller chez moi tout de suite. Il faut d’abord que je passe à la clinique. Une minute seulement.
    –  C’est à cause de la femme que tu as opérée ?
    –  Pas celle de ce matin. Une autre. Veux-tu m’attendre quelque part ?
    –  Est-il nécessaire que tu y ailles maintenant ?
    –  C’est mieux. Je ne tiens pas à être dérangé plus tard.
    –  Je puis t’attendre. Avons-nous le temps de passer à ton hôtel ?
    –  Oui.
    –  Alors, allons-y. Tu m’y rejoindras. »
    Ravic donna l’adresse au chauffeur. Il s’adossa et sentit le cuir froid contre sa nuque. Ses mains tenaient toujours celles de Jeanne. Il eut l’impression qu’elle attendait qu’il dise quelque chose.
    Quelque chose se rapportant à eux. Il ne pouvait pas. Elle avait déjà tant dit et cependant si peu. Le taxi s’arrêta.
    « Je peux monter seule, dit Jeanne. Je n’ai pas peur. Donne-moi tout simplement ta clef.
    –  Elle est au tableau.
    –  Je leur demanderai de me la donner. Il faut que je m’y habitue. Avec un homme qui me quitte au milieu de mon sommeil et qui revient quand je ne l’attends pas, j’aurai beaucoup à apprendre. C’est mieux de commencer tout de suite.
    –  Je monte avec toi. C’est déjà assez dur de devoir te quitter immédiatement. »
    Elle se mit à rire. Elle paraissait tout à coup très jeune.
    « Attendez-moi, dit-il au chauffeur de taxi. Un instant. » L’homme cligna de l’œil.
    « Davantage s’il le faut.
    –  Donne-moi la clef, dit Jeanne quand ils arrivèrent en haut de l’escalier.
    –  Pourquoi ?
    –  Donne ! »
    Elle ouvrit la porte, fit deux pas à l’intérieur et s’arrêta.
    « C’est merveilleux ! dit-elle en regardant la chambre sombre, où un pâle rayon de lune pénétrait par la fenêtre.
    –  Merveilleux ? Ce taudis ?
    –  Oui. Merveilleux ! Tout est

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