Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'archer du Roi

L'archer du Roi

Titel: L'archer du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
Vom Netzwerk:
Écritures, le monde finirait dans un bain de feu et de
sang. Comme pour corroborer cette prédiction, dans le dernier village où ils
étaient passés sous le regard suspicieux des gens, un prêtre vindicatif les
avait taxés d’être des espions écossais. Devant cette infâme accusation, le
sang du père Hobbe n’avait fait qu’un tour et il avait brandi le poing sous le
nez de son confrère. Thomas avait dû intervenir pour calmer les deux saints
hommes.
    Un berger qui avait assisté à l’altercation lui dit avoir vu
de la fumée dans les collines du nord. D’après lui, les Écossais étaient en
marche vers le sud. Mais la concubine du prêtre avait ricané en entendant cette
histoire, déclarant que les prétendues troupes écossaises n’étaient que des
voleurs de bétail.
    — Mettez des barreaux à votre porte pendant la nuit,
avait-elle persiflé, et ils vous laisseront tranquilles.
    Au loin, la lueur était toujours là. Ce n’était pas le
Graal.
    — Thomas ? répéta Eléonore en fronçant les
sourcils.
    — J’ai fait un rêve, expliqua-t-il, c’est tout.
    — J’ai senti l’enfant bouger. Alors, nous allons nous
marier, tous les deux ?
    — Oui, à Durham, promit Thomas.
    Car si lui-même n’était qu’un bâtard, il ne voulait pas que
son enfant soit affecté de la même tare.
    — Demain, nous serons arrivés et nous irons nous marier
aussitôt dans une église. Après, nous irons chercher nos réponses.
    Intérieurement, il pria pour que l’une des réponses
fût : non, le Graal n’existe pas. « Faites que ce soit un rêve, un
simple mirage de feu et de nuages dans le ciel nocturne, sinon je vais devenir
fou. » Il avait envie d’abandonner sa quête. Il avait envie de renoncer au
Graal et de redevenir ce qu’il était et ce qu’il avait envie d’être : un
archer anglais.
     
    Bernard de Taillebourg, français, dominicain et inquisiteur,
passa cette nuit d’automne dans une porcherie. Lorsque l’aube se leva,
laiteuse, plongée dans un épais brouillard, il tomba à genoux et remercia Dieu
de lui avoir accordé la grâce de dormir dans la paille souillée. Puis,
conscient de la noble tâche qui l’attendait, il adressa une prière à saint
Dominique en lui demandant d’intercéder auprès de Dieu afin que l’entreprise de
la journée se déroule bien.
    — De même que la flamme de ta bouche nous guide vers la
vérité, pria-t-il à haute voix, qu’elle éclaire notre route vers le succès.
    Sa ferveur était telle qu’il bascula en avant, allant
heurter de la tête le solide pilier de pierre qui soutenait un angle de
l’enclos. La douleur irradia son crâne. Mais il en demanda plus encore et donna
délibérément un nouveau coup de tête contre la pierre. La peau de son front
éclata ; le sang se mit à couler le long de son nez.
    — Ô saint Dominique, s’écria-t-il, ô saint
Dominique ! Grâces soient rendues à Dieu pour ta gloire ! Éclaire
notre route !
    Le sang dégoulinait à présent sur ses lèvres. En gardant les
mains jointes, il le lécha, songeant à toutes les tortures endurées pour
l’Église par les saints martyrs. Un sourire extatique éclairait son visage
hagard.
    Les soldats qui, la nuit précédente, avaient réduit en
cendres la quasi-totalité du village, violé les femmes qui n’avaient pu
s’échapper et massacré les hommes qui essayaient de les protéger, observaient
la scène, fascinés. Le prêtre cognait de manière rythmique son front contre la
pierre éclaboussée de sang en psalmodiant : « Dominique, ô
Dominique ! »
    Quelques soldats se signèrent, car ils savaient reconnaître
un saint homme quand ils en voyaient un. Un ou deux s’agenouillèrent, même si ce
n’était pas chose facile en cotte de mailles. Mais les autres se contentèrent
de considérer le dévot d’un œil méfiant, ainsi que son valet, qui leur rendait
hardiment leur regard.
    Le valet, de même que son maître, était français, mais il y
avait dans sa physionomie une note exotique. Sa peau était mate, presque aussi
basanée que celle d’un Maure, et ses cheveux noirs luisaient, longs et lisses.
L’ensemble, assorti à son visage étroit, lui donnait un air farouche. Il était
vêtu d’une cotte de mailles, portait l’épée et, bien qu’il ne fût que le valet
d’un religieux, ses manières étaient assurées et pleines de dignité. Son
élégance détonait étrangement au milieu de cette armée dépenaillée. Nul

Weitere Kostenlose Bücher