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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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moindre de ces misérables meurtriers était un homme et
avait tant soit peu de sens moral ou de courage, il suivrait l’exemple de Judas
et se pendrait. Mais aussi vrai que Dieu existe, l’argent gagné par le sang
cause toujours la perte de ses bénéficiaires. Tôt ou tard vient le jour de la
vengeance. Certains de ces sicaires ne sont que des bêtes de proie qui ne
redoutent guère que la faim, la soif et les atteintes physiques, mais quelle
que soit leur plus grande crainte, elle se matérialisera à coup sûr. »
    Bob lut bien entendu cet article – il avait
contracté au contact de Jesse l’habitude de lire chaque jour tous les journaux
qui lui tombaient sous la main. La dénonciation implicite de Crittenden, Craig,
Wallace et Timberlake (« ces coquins moralisateurs qui font valoir l’honneur
de l’État et exaltent conjointement les vertus de l’ordre public et le sublime
courage nécessaire pour loger une balle dans la tête d’un homme désarmé
par-derrière ») le laissa froid, de même que les imputations concernant sa
sœur Martha (« au centre de cette machination diabolique a œuvré une catin
qui, de sa propre main, a tissé bon nombre des fils de trame »), mais la
phrase « que soit leur plus grande crainte, elle se matérialisera à coup
sûr » le troubla. Ses accents prémonitoires, prophétiques semblaient aller
au-delà de la simple imprécation – c’était le genre de choses que Jesse eût pu
dire.
    Le 13 mai, un juge de paix du comté de Ray
accepta les deux mille dollars de caution de Bob ainsi que sa promesse d’être
présent au procès – « Je ne rate jamais un rendez-vous », lui aurait
apparemment déclaré Bob. Puis Charley et Bob partirent pour Kansas City en
compagnie du shérif Timberlake afin de fournir aux autorités de l’État de plus
amples informations concernant le reste de la bande des frères James. Au mépris
des instructions qui avaient été données, la presse se fit l’écho de leur venue
et un journal favorable aux hors-la-loi invita son lectorat à réserver « un
accueil approprié » aux Ford à la gare. Toutefois, le shérif s’arrangea
pour que, sitôt le train à quai, ils sautent du fourgon de queue, puis dans une
voiture qui les attendait, tandis que Timberlake et deux policiers menottés et
grimés se frayaient un chemin à travers la mêlée. L’un des deux agents fut
atteint à la joue par une pierre et ce fut seulement grâce à l’intervention
énergique de Timberlake que le second, pris dans un pugilat, ne fut pas
défiguré.
    Finis C. Farr rejoignit les Ford au cabinet d’Henry
Craig afin de leur remettre leur récompense, non sans au préalable les
gratifier de longues et ennuyeuses explications modulées avec l’affectation, la
circonspection et la hauteur qui passaient à l’époque pour des signes de bonne
éducation. Il débuta par un préambule au sujet de la proclamation signée par le
gouverneur en juillet 1881 et des cinq mille dollars supplémentaires prévus
pour l’arrestation et la condamnation de l’un des frères James, qui n’eussent
su être justifiés dans le cas d’un homicide, d’autant que, en second lieu, le
financement de la prime était fonction de la pleine et entière coopération des
compagnies ferroviaires. Or, fit ressortir Farr, certaines avaient fait preuve
d’irresponsabilité et d’autres encore d’avarice. Troisième facteur à prendre en
compte, les Ford n’étaient pas les seuls à avoir permis l’élimination de Jesse
James, de nombreux hommes capables se démenaient à cette fin depuis des années,
nonobstant des risques considérables, et le gouverneur estimait juste qu’eux
aussi fussent récompensés. (Henry Craig s’esquiva diplomatiquement de la pièce.)
    Charley était exaspéré. Affalé dans un
fauteuil, il contemplait le plafond d’un air lugubre en soupirant, tandis que
le secrétaire du gouverneur passait d’un point à un autre.
    « Va-t-on toucher le moindre sou ? »
lâcha-t-il finalement.
    Bob adressa à Finis Farr un sourire méprisant.
    « C’est juste que Charley aurait vraiment
aimé pouvoir s’acheter des pastilles pour la gorge à la fraise. »
    Farr leur tendit à chacun une grande enveloppe
marron contenant deux cent cinquante dollars.
    « Libre à vous de vous plaindre si vous
en avez envie, mais c’est tout ce qu’il y a comme argent, ajouta Farr, devançant
leurs récriminations. Pour vous offrir plus, il faudrait que le gouverneur

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