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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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ses gencives d’un violet étrange, il portait des bagues
en or extravagantes à chaque doigt et une gousse d’ail autour du cou, sur les
recommandations d’une bohémienne du nom de Madame Africa. Bob était bougon, émacié,
son teint cireux et son visage tellement ravagé par l’acné que certains
journalistes crurent qu’il avait la rougeole.
    Il se retrouva aux abois à Plattsburg – acculé
dans des coins dans des pièces inconnues, maladroitement filé ou encerclé dans
la rue, pressé avec avidité de se répandre en opinions et en conjectures au
sujet de Frank et Jesse, du reste de la bande, du gouverneur Crittenden ou de
Wood Hite. Ses moindres propos étaient amplifiés et exagérés – s’il n’était pas
croyant, alors c’était un suppôt de Satan ; s’il dormait peu, c’était à l’évidence
parce qu’il était en proie à des cauchemars ; et tout le monde s’accordait
généralement à penser qu’il était tourmenté par des apparitions, des voix
désincarnées, des visions macabres de sa propre tombe, ainsi que par le
douloureux verdict de l’Histoire – même le silence rageur qu’il avait peu à peu
fini par adopter passait pour lourd de sens.
    En octobre 1883, il y avait aux États-Unis
plus de gens capables d’identifier Bob Ford que Chester Alan Arthur, le
président dont ils avaient hérité par accident ; il se disait qu’il était
aussi célèbre à vingt ans que Jesse au bout de quatorze ans de grand banditisme
et, quoique lui-même le présumât déjà, pour beaucoup, il était totalement
inattendu qu’un muscadin certes hardi, mais sans scrupule pût paraître fringant
et désirable aux yeux des femmes : lors des audiences de son procès pour
homicide volontaire sans préméditation, la salle était aussi bondée que l’église
baptiste de Mount Olivet le jour où, après que l’on eut prié pour son âme, le
corps de Jesse Woodson James avait été rendu à son Créateur et, alors qu’ils
inventoriaient la foule à l’intérieur du tribunal comme sur les marches, maints
reporters avaient constaté avec surprise la présence de dames par ailleurs
raffinées et y avaient vu la preuve du pouvoir de séduction du jeune homme.
    Bob était représenté par le colonel C. F.
Garner, tandis que l’accusation avait été confiée au procureur du comté de Ray.
Un marché avait été conclu avec le clan des James et des Samuels : si
ceux-ci négligeaient de répondre aux citations à comparaître, Bob leur
retournerait la courtoisie au cas où Frank James serait traduit en justice, si
bien que les contre-interrogatoires furent bien moins spectaculaires que bon
nombre de ceux qui avaient fait le déplacement jusqu’à Plattsburg l’espéraient.
Le colonel Garner débuta sa défense en produisant une déposition sous serment
de James Andrew Liddil (qui était à ce moment-là en prison en Alabama et ne
craignait donc rien), dans laquelle, d’après Garner, il affirmait que Wood et
lui « s’étaient inopinément trouvés engagés dans une querelle d’ordre
personnel et qu’ils avaient à peine échangé quelques mots avant de sortir leurs
armes de se lancer dans un échange de coups de feu […] rapide et nourri, qui
avait à peine duré quelques secondes ; que Liddil avait été blessé à la
jambe et que Wood Hite, mortellement touché, était mort sur le coup ; que
c’était Hite qui était à l’origine de la dispute, qui était l’agresseur, l’auteur
de l’attaque, qu’il faisait feu quand il avait été abattu par une balle tirée
par Liddil et que Robert Ford, mon client, ignorait tout de la querelle jusqu’à
ce qu’éclate la fusillade ».
    Les déposants auxquels on pouvait s’attendre
furent appelés à la barre : le constable Morris, qui avait exhumé le corps
de Wood, le Dr Mosby, qui l’avait examiné, Henry H. Craig, divers habitants de
Richmond qui n’avaient jamais rien entendu de désobligeant sur le compte de Bob
Ford et enfin Mrs Martha Ford Bolton, dont l’aplomb et la placidité, alors
même qu’elle débitait des mensonges éhontés, faillirent déstabiliser le
procureur sidéré.
    Ce fut un procès tapageur et turbulent, interrompu
par les quolibets du public, par les rires suscités par les épigrammes ou les
commentaires provocateurs des témoins, par des applaudissements en réponse aux
passages les plus exaltants de la plaidoirie des avocats. Bob ne prêta aucune
attention à la majorité des échanges, absorbé,

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