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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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de
feu éclatent sur-le-champ – et dans ce cas, Jesse m’aurait abattu parce que j’étais
nerveux. Puis soudain, il se mit à sourire et m’assura avec bienveillance…
    — Allez, Bob, ce n’est pas grave de toute
façon. »
    Bob s’enfonça dans son fauteuil, méditatif.
    « Aussitôt, je vis clair dans ses
intentions. Je sus qu’il n’était pas dupe. Il était trop malin pour ça. En cet
instant, il savait aussi bien que moi que j’étais là pour le trahir. Mais comme
il n’était pas question pour lui de me descendre devant sa femme et ses enfants,
il me souriait et il était gentil afin que je baisse ma garde, dans le but de
me régler mon compte ce soir-là, sur la route. »
    Charley s’approcha du lit en chêne avec le
maintien d’un général et, à l’issue de délibérations caricaturales symbolisées
par force grimaces de la bouche et froncements de sourcils, il ôta
minutieusement sa cartouchière et laissa choir avec défiance ses deux revolvers
sur le matelas. Charley, qui avait reçu pour instruction de penser aussi aux
spectateurs de la galerie, vociféra :
    « Au cas où tu te demanderais pourquoi j’enlève
mon ceinturon, c’est parce que j’envisage d’aller faire un tour dans le jardin !
    — C’était la première fois de ma vie que
je le voyais sans ses armes, révéla Bob. Je devinais immédiatement qu’il ne les
avait quittées que pour calmer mes craintes d’avoir été percé à jour. »
    Charley se mit à lancer des regards tous
azimuts, tel un maniaque, ce que Bob élucida judicieusement ainsi :
    « Il paraissait chercher quelque chose
pour s’occuper, histoire de me donner l’impression qu’il avait déjà tout oublié
de l’incident. »
    Charley se saisit d’un plumeau dans un
porte-revues en osier et l’agita en direction de l’improbable peinture de la
mort de César.
    « Ce tableau est effroyablement
poussiéreux », fit-il, avec un certain retard de la parole sur le geste.
    Bob se leva subrepticement du fauteuil et se
dirigea à pas de loup vers l’avant de la scène.
    « Je ne discernais pas le moindre grain
de poussière sur cette peinture », dit-il à voix basse.
    Il pivota pour observer Charley qui
dépoussiérait le cadre comme quelqu’un qui eût assisté à quelque forfait, laissant
au public le loisir de suivre le trajet des cinq doigts de sa main droite qui
se posaient doucement sur la crosse de son pistolet. Comme il était désormais
de trois quarts dos, il éleva la voix :
    « Jusqu’alors, l’idée de le tuer ne m’avait
jamais traversé l’esprit, prétendit-il. Mais en le voyant là, désarmé, le dos
tourné, tout à coup, j’ai eu cette illumination : “C’est maintenant ou
jamais. Si tu ne te débarrasses pas de lui maintenant, il se débarrassera de
toi ce soir.” »
    Bob se campa à moins de deux mètres de sa
cible, qui étouffa une quinte de toux tandis que son plumeau s’égarait contre
la toile grise du mur illusoire qui ondoya telle la voile d’un navire qui lofe
lentement. Un frémissement d’excitation courut dans l’assistance.
    « Sans plus tergiverser ni réfléchir, j’ai
dégainé et j’ai visé, fit Bob en s’exécutant. Il a entendu le chien cliqueter
quand je l’ai armé du pouce et aligné sur sa tête. Il a reconnu le son et a
commencé à faire volte-face. J’ai pressé la détente. »
    Le chien s’abattit sur une amorce de poudre
noire et la détonation fit sursauter certains spectateurs, qui se plaignirent
plus tard qu’elle résonnait encore à leurs oreilles. Charley vacilla sur la
chaise, porta les mains à sa poitrine, ferma les yeux et s’effondra de manière
peu authentique sur le sol, stoppant sa chute du pied, puis du coude gauche, avant
de s’étaler pesamment sur le dos et d’articuler encore : « Foutu ! »
    Bob s’écarta et, avec un parfait mélange de
stupéfaction, d’effarement et de remords, plaça l’assistance face au spectacle
du meurtre.
    « Le tir l’atteignit derrière l’oreille
et il s’écroula comme une masse – mort. Je ne suis même pas allé jusqu’au corps.
En voyant que la balle de calibre .44 l’avait touché, j’ai tout de suite su que
c’en était fait de Jesse. »
    L’actrice qui jouait Mrs James fit
irruption sur scène par la droite, avisa un homme qui retenait son souffle par
terre et se permit ce que la didascalie décrivait comme « un cri à vous
glacer le sang ». Tous se figèrent. S’ensuivit une

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