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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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huit
fois au cours de la ballade, même les imbéciles et les dipsomanes retinrent que
c’était un sale petit lâche nommé Robert Ford qui avait expédié ce pauvre Jesse
James six pieds sous terre.
    Charley semblait estimer ces accusations de
couardise fondées, mais Bob les récusait systématiquement – il rossa au moins
deux musiciens ambulants, invitait ses détracteurs à se battre en duel ou à s’expliquer
dehors et interrompait la représentation au moindre lazzi pour demander au
trublion s’il désirait se faire une idée du courage de Robert Ford selon des
modalités mutuellement définies.
    Lors du réveillon du jour de l’An, à la maison
de l’horticulture de Boston, un rustre ayant eu, cet après-midi-là, des mots
avec Charley (qu’il avait taxé de barbare) vint assister au spectacle des Ford
pour les brocarder et les agonit tellement d’insultes que, pour finir, Bob
sauta sur l’importun depuis la scène, lui coupa le souffle, puis entreprit de
lui casser la figure et parvint à lui asséner une bonne dizaine de coups avant
qu’on les séparât. Bob s’en prit alors aux messieurs bien intentionnés qui
tentaient de l’amadouer, ouvrit des lèvres et ensanglanta des nez de ses poings,
cependant que Charley se jetait sur un second groupe et faisait mauvais usage
de ses pistolets, jusqu’à ce qu’un agent de police apparût et, de sa matraque, lui
fît éclore une bosse sur le crâne.
    Ne demeuraient plus à l’intérieur de la maison
de l’horticulture que seize spectateurs sur les trois cents d’origine ; tous
les autres s’étaient rués en masse vers la sortie, certains s’étaient même
précipités à travers les vitres comme si le bâtiment eût été en feu. Cinq
hommes gisaient par terre, la main sur le nez ou la bouche, le plastron de
leurs chemises amidonnées froissé et maculé de rouge.
    « Que vous soyez les frères Ford ou les
frères James, on n’aime pas les buveurs de sang à Boston », lâcha le
policier à l’adresse de Bob en le menottant.
    La bagarre fit l’objet d’articles dans de
nombreux journaux durant la semaine qui suivit et suscita le commentaire
suivant dans la Gazette de Richmond : « Depuis que l’un d’eux
a accédé à la notoriété en abattant un autre assassin dans le dos, ce duo
infernal parcourt le pays en se prenant apparemment pour les protégés de l’État
du Missouri. Dans l’intérêt de la morale, mieux vaudrait enfermer ces gaillards
ou les mettre en demeure de tenir leur langue afin de ne pas troubler l’ordre
public. »
    Par coïncidence, George Bunnell arriva au même
moment à la conclusion que les meurtriers de Jesse James avaient perdu leur
attrait auprès du public et décida de retirer leur pièce du répertoire de sa
compagnie au motif que les spectacles concurrents étaient trop nombreux. Jesse
James, le roi des bandits se jouait encore à New York ; la troupe de
Charles W. Chase, la Mammoths James Boys’ Combination, tournait dans l’Ouest
et se produisit au Mosby’s Grand Opéra House, un music-hall de Richmond, en mai
1883 ; une autre compagnie donna deux représentations au Tootle’s Opéra
House à St Joseph ; et P. T. Barnum lui-même envisageait de
monter un spectacle intitulé Les Hors-la-loi du Missouri. Les frères
Ford persistèrent cependant à partir en tournée dans l’Ohio, la Pennsylvanie, le
Massachusetts, le nord de l’État de New York et le New Jersey à la tête de leur
propre compagnie, la Great Western Novelty Troupe, composée de sept comédiens, dans
une production intitulée Jesse James.
    L’auteur du texte était un comédien en vogue
originaire de Buffalo, qui s’était arrogé le rôle-titre et avait remanié l’histoire
américaine afin de laisser davantage de champ à son talent. L’intrigue de bric
et de broc avait pour point de départ une attaque de banque stéréotypée
émaillée de nombreux morts et enchaînait promptement sur la redistribution du
butin dans le pavillon de St Joseph, butin dont la plus grosse part allait
à Jesse. Furieux, Bob descendait le bandit un samedi soir après le repas – mais
cette fois-là, sur une scène de Cincinnati dans l’Ohio ou de Newark dans le New
Jersey, le vaillant et téméraire Robert Ford s’apercevait que c’était en
réalité un imposteur qu’il avait tué, car des coulisses s’avançait le véritable
Jesse James ; s’ensuivait alors un dialogue prétentieux, à l’issue duquel
les deux desperados

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