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Le Baiser de Judas

Le Baiser de Judas

Titel: Le Baiser de Judas
Autoren: Hubert Prolongeau
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pour origine le sentiment qu’un des douze voulait accaparer l’attention
de Jésus. Le plus à vif était Jean, dont la jeune sensibilité paraissait
souvent extravagante à des hommes à qui la vie avait déjà donné de rudes leçons.
Un jour, il accusa même Judas de prendre de l’argent dans la caisse. Le poing
de Judas partit et fracassa le nez du jeune homme qui se roula par terre en
hurlant. Jésus apprit le motif de l’incident et demanda à Jean de s’excuser de
son soupçon. Il renouvela publiquement sa confiance à Judas, suivi par tout le
groupe.
    « Mais pourquoi as-tu choisi de te
montrer d’abord à cette bande d’analphabètes ? se plaignit Judas.
    — Ne sois pas injuste, Judas. Ils étaient
crédules, ils sont en train de devenir croyants. »
    L’expansion du
groupe aussi leur posait problème. Eux qui avaient tout abandonné pour suivre
Jésus se sentaient jaloux de l’affection immédiate qu’il accordait aux
nouvelles recrues, à ceux qui, à leurs yeux d’anciens, ne faisaient que suivre
le succès. Un jour où un malade, qui s’était approché du campement, avait
interpellé Philippe en lui ordonnant : « Va dire à ton maître que j’attends
qu’il me guérisse », Philippe s’était retourné pour lui répliquer avec
arrogance :
    « Sais-tu que tu parles à l’un des douze ? »
    Jésus avait dû le rappeler à plus d’humilité.
    « Jusqu’à quand vous supporterai-je ? »
leur jeta-t-il alors.
    Il donnait parfois l’impression d’étouffer
parmi eux, et il lui arrivait de plus en plus souvent de se retirer pour aller
prier seul.
    Jésus préférait les
villages aux villes : il y était plus à l’aise. Les foules étaient moins
nombreuses, et ses paroles trouvaient plus directement le cœur des gens.
    « Tu sais, confia-t-il à Judas, j’ai du
mal à me rendre compte de la manière dont les gens me perçoivent. Et toi ?
    — Je ne sais pas. Demande-leur. »
    Jésus s’approcha du groupe des disciples.
    « J’ai encore entendu raconter sur moi de
choses invraisemblables. Qui dit-on que je suis ? »
    Les voix se chevauchèrent. « Élie.
    — Jérémie.
    — Jean-Baptiste. »
    Des noms de prophètes étaient jetés. Jésus
sourit.
    « Tout cela à la fois ? »
    Alors Pierre se leva. Il paraissait en proie à
une grande agitation. Ses mains tremblaient, il était rouge. Il s’approcha de
Jésus, baisa sa tunique et lança.
    « Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant. »
    Jésus le regarda et une joie comme il n’en
avait encore jamais montrée illumina son visage. Il releva Pierre et l’enlaça
longuement.
    Les autres se demandaient ce qui arrivait. Des
murmures jaloux montèrent.
    « Pierre, tu as vu juste. Mais ce que tu
as vu, ce n’est pas toi qui l’as vu : c’est mon père qui te l’as dit. »
    Jésus se tourna vers le groupe.
    « Écoutez-moi, vous tous. Pierre a dit
qui j’étais, car mon père a estimé qu’il était temps que vous le sachiez. Mais
ce que vous savez ne peut encore être dit à tout le monde. N’en parlez à
personne. »
    Tous acquiescèrent. Mais le reste de la
journée fut assombri par l’incident, sauf pour Jésus et Pierre qui continuèrent
de se regarder avec un contentement d’eux-mêmes qui irrita profondément les
autres.
    Le soir, Jésus leur apprit une nouvelle prière
qui commençait par : « Notre Père qui es aux cieux… » Jean la
sut après l’avoir entendue une fois seulement.
    Judas n’avait pas
compris la dernière déclaration de Jésus. Il se sentait confusément inquiet.
    « Qui est ce dieu dont tu te dis le fils ?
lui demanda-t-il. Dieu est unique. Il n’a pas de visage. On ne peut même pas Le
dessiner. Et toi, tu viens dire que c’est ton père, et que tu Le représentes
sur terre. Mais comment ? Comme moi je te représente quand je parle en ton
nom ?
    — Non. Il s’incarne en moi.
    — Ce n’est même pas imaginable. Comment
peux-tu prétendre cela ?
    — Je ne prétends rien, Judas. Cette fois,
je le sais : je suis le fils de Dieu. Ce n’est pas vanité, car je doute
que cela me réserve grand-chose de bon. Mais c’est ainsi, et je l’accepte. Fais-en
autant. Pierre a compris qui j’étais. Il a été le premier. Parfois j’ai même l’impression
qu’il l’avait compris avant moi. Il a la foi, Judas, et cela le sauve, comme
cela sauve tous ceux qui me suivent. Comme cela te sauvera aussi, j’en suis sûr.
Mais je comprends que tu doutes.
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