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Le Baiser de Judas

Le Baiser de Judas

Titel: Le Baiser de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hubert Prolongeau
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passèrent. Un nouveau préfet fut
nommé quand Judas eut trente et un ans. Jephté, toujours à l’affût de la
moindre information susceptible d’orienter ses affaires, fut le premier à le
savoir.
    « Il se nomme Ponce Pilate. On le dit
membre de la famille des Pontii. C’est une grande famille », prévint-il
les siens.
    Il en était déjà émerveillé.
    « Il paraît qu’il est dans les meilleurs
termes avec Séjan. Je ne sais pas si c’est bon pour nous. Ou il nous laissera
une paix royale, ou au contraire il va se sentir obligé de donner des gages…
    — Il s’installera à Césarée ? demanda
Judas.
    — Sans doute, oui. La vie y est, à leurs
yeux, plus douce qu’à Jérusalem. Puisque être loin du Temple ne veut rien dire
pour ces barbares… »
    Ils connurent assez
vite la plus douloureuse des réponses aux interrogations de Jephté. Quelques
mois après l’arrivée de Pilate, un nommé Siméon entra dans la boutique. Judas
le vit s’approcher en soupirant : c’était l’un des plus obstinés parmi les
pharisiens, et il l’avait encore récemment entrepris sur le fait de savoir si
du pain cuit dans un four rempli de bois par un gentil pouvait être consommé ou
non.
    « Vous savez… Vous savez… »
    Les mots avaient du mal à sortir de sa bouche.
    « Ce que… Il va faire… Pilate… Toute une
légion… »
    Jephté s’était précipité. Même si cela ne se
voyait guère, Siméon avait beaucoup d’argent de côté et en employait une partie
non négligeable à acheter des objets religieux de haut prix.
    « Pilate… Il a envoyé de Césarée toute
une cohorte pour Jérusalem. Six cents hommes. Et il est entré… de nuit… Il est
entré de nuit avec ses troupes et a accroché à la vieille tour des enseignes
avec le portrait de Tibère… »
    Les deux hommes se figèrent.
    « Tu plaisantes…
    — Pas du tout. Tout le Sanhédrin est en
émoi.
    — Mais ça ne tient pas debout. »
    Le sacrilège était énorme, et l’attitude
politique stupide : la loi juive interdisait toute image à l’intérieur de
la ville, et les Romains avaient jusque-là bien compris qu’ils n’obtiendraient
un semblant de paix qu’en respectant certains particularismes. Pilate venait d’offenser
Dieu : mais dans quel but ?
    « Il doit y avoir une erreur. Que dit-on
au Sanhédrin ?
    — Je ne sais pas encore. Je suis passé
vous prévenir. Il faut que je continue ma tournée, et que j’alerte le plus de
monde possible. Une insulte pareille à notre religion ne peut être acceptée. »
    Judas admira cette énergie.
    Quelques heures plus
tard, tout le monde ne parlait plus que de l’affaire. L’émeute était proche. Mais
Pilate avait fait entourer ses appartements dans le fort Antonia d’une garde
doublée, et plusieurs de ceux qui avaient essayé de passer outre s’étaient fait
rosser.
    Le préfet repartit pour Césarée à la fin de la
semaine, sans avoir ôté les enseignes. Une délégation de notables pharisiens et
sadducéens décida de le suivre. Pendant cinq jours, ils demandèrent audience. Pilate
refusa. Le sixième, il les convoqua dans le somptueux amphithéâtre de la ville,
construit au bord de la mer. Caïphe, chez qui nul n’aurait soupçonné ce courage,
s’avança. Les légionnaires qui les entouraient firent un pas. Alors toute la
délégation s’agenouilla et s’offrit aux glaives, affirmant qu’elle préférait
mourir plutôt que de laisser une idole s’imposer dans les lieux saints. Pilate
fit retirer les enseignes. La délégation de retour à Jérusalem fut portée en
triomphe. Dans la foule nombreuse venue l’attendre se trouvait Judas. Il sentit
ce jour-là l’exaltation qu’il avait crue endormie rejaillir, chaude et brûlante,
et ne remarqua pas à son bras Bethsabée qui le regardait, inquiète.
    Mais la partie de
bras de fer, qui avait semblé tourner à l’avantage des Juifs, n’était pas
terminée. Depuis longtemps, Pilate avait le projet d’un aqueduc pour Jérusalem.
Le chantier avait démarré quelques mois après sa prise de fonction, et tous
espéraient qu’il permettrait enfin d’alimenter correctement la cité en eau. Une
nouvelle fit pourtant à nouveau frémir la communauté : pour financer ces
travaux, Pilate allait puiser dans le trésor du Temple, dans l’argent réservé
au financement des sacrifices publics. Judas était avec Archépios au marché
quand il l’apprit. Son compagnon s’esclaffa.
    « Et vous allez

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