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Le Baiser de Judas

Le Baiser de Judas

Titel: Le Baiser de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hubert Prolongeau
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sur. »
    Il n’y avait, à cette heure-là, plus
grand-chose à dire. Judas regarda encore une fois ceux qu’il quittait : Lavinia,
qui se tordait les mains en essayant de ne pas s’effondrer, Jephté dont la
douleur semblait avoir effacé jusqu’à la moindre trace de bonhomie, et Malachie
qui luttait contre l’envie de tout faire pour retenir son faux cousin. Même
Sarah laissa couler ses larmes.
    Judas chargea Malachie de dire au revoir à
leurs amis pour lui, refusant d’aller voir Archépios. À quoi bon, alors qu’il
avait déjà tout laissé derrière lui ? Il prit un sac, et partit à l’heure
où la pénombre commençait d’envahir la ville.
    Il passa la nuit au
marché, avec les quelques vagabonds qui venaient y dormir. Le lendemain, il
plongea dans le quartier des teinturiers, y cherchant l’homme qui l’avait le
premier contacté de la part de Barabbas. Entrant dans plusieurs boutiques, il
tenta de questionner les ouvriers aux bras couverts de couleur sur leur collègue,
n’obtenant que des réponses aussi vagues que sa demande. Il ne se découragea
pas. Pendant trois jours, il arpenta le quartier, jusqu’à devenir familier à
quelques-uns des artisans. Et, le troisième jour, il trouva celui qu’il
cherchait.
    « Bonjour. »
    Il vit tout de suite que l’autre l’avait
reconnu.
    « J’ai besoin de retrouver Barabbas. Où
est-il ?
    — Je ne vois pas de qui tu veux parler.
    — Ne fais pas l’innocent. Tu es venu me
porter une lettre de sa part.
    — Tu dois faire erreur. »
    L’homme avait vraiment peur.
    « Ciborée, Chorazim… Ça ne te dit rien ?
    — Non. Laisse-moi. »
    Le souvenir de la conversation qu’il avait
entendue dans la synagogue revint à l’esprit de Judas. Si l’opération avait si
mal tourné, la peur de son interlocuteur devenait plus compréhensible.
    « On va faire comme la première fois. Je
vais te donner un mot. Si tu sais à qui le porter, tu le fais. Si ce n’est pas
le cas, tu le jettes. D’accord ?
    — Si tu veux, mais ça ne servira à rien.
    — Bien sûr. »
    Judas avait sorti de son sac un calame et une
plaquette de bois recouverte de cire. Il y grava quelques phrases.
    « Je reviendrai dans trois jours. S’il y
a une réponse…
    — N’espère pas. »
    Judas revint. Il attendit toute la journée. Quand
la dernière boutique ferma, un sifflement le fit se retourner. Le teinturier
était là et, sans rien lui dire, le frôla et lui glissa dans la main un morceau
de papyrus. Il n’y lut qu’une phrase.
    « Demain au carrefour, à la tombée du
soleil. »
    Le lendemain, il
était au rendez-vous. Une charrette s’arrêta devant lui, chargée de sacs de
farine.
    « Monte, ordonna le conducteur.
    — Où allons-nous ? »
    Mais l’homme ne répondit pas.
    Ils roulèrent quelques heures, croisant deux
brigades romaines. Judas s’assoupit malgré les cahots de la route.
    Il se réveilla parce qu’on lui secouait le
bras.
    « Nous arrivons. »
    Un guetteur attendait sur une butte, et un cri
d’animal jailli à cet instant lui sembla être un signal. La charrette atteignit
un petit village. C’était un minuscule bourg, une dizaine de maisons, simple
cubes de terre d’une misère presque totale. Des peaux d’animaux séchaient sur
des branches et empuantissaient l’air.
    Barabbas sortit d’une des masures.
    Il y eut un moment de gêne entre eux deux.
    « Ainsi tu reviens, dit Barabbas.
    — Oui », répondit Judas.
    Ils ne trouvèrent plus grand-chose à se dire. Judas
descendit ses affaires de la charrette.
    Il leur fallut
plusieurs jours avant d’être capables de parler ensemble. Judas s’occupa à
marcher, à explorer le village, à aller pêcher dans un des bras du Jourdain qui
finissait en mare à quelques pas des premières maisons. Il faisait cuire son
poisson sur un feu, devant sa porte. Le troisième soir, Barabbas vint le voir. Judas
lui offrit un poisson puis en ouvrit un autre. Il jeta les entrailles dans le
sable et l’enfila sur un bout de bois.
    « Je suis désolé pour ta femme et tes
enfants. Je ne l’ai appris que deux jours avant ta venue.
    — Je te remercie. Mais tu as vu
suffisamment de morts pour ne plus être ému par ceux-là.
    — S’habitue-t-on jamais à la mort ?
    — Toi, oui, je crois. Et tu as failli
faire que je m’y habitue aussi. »
    Un long silence s’installa. Barabbas finit son
poisson, puis se leva.
    « Merci pour ton accueil. »
    Le premier pas était

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