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Le Bal Des Maudits - T 2

Le Bal Des Maudits - T 2

Titel: Le Bal Des Maudits - T 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Irwin Shaw
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veux y aller toi-même, c’est ça ? Tu veux y aller te faire tuer toi-même, cet après-midi ? Tu veux qu’Ackerman y aille se faire tuer ? Et Crane ? Et Pfeiffer ? Tu préfères voir tes copains se faire tuer, plutôt que ces trois gros porcs des Services de Ravitaillement ? Ils sont trop beaux pour se faire tuer, hein, c’est ça ?
    Brusquement, sa voix tremblante de rage et de haine redevint douce et professionnelle.
    –  Ne les regardez pas, commanda-t-il aux autres hommes. Surveillez la crête. Il n’y aura que deux ou trois courtes rafales, et ce ne sera pas facile à repérer. Dès que vous tiendrez l’endroit ne le quittez plus des yeux et décrivez-le-moi… Tu veux toujours que je les rappelle, Whitacre ?
    –  Je… commença Michael.
    Puis il entendit la mitrailleuse et comprit qu’il était trop tard.
    En bas, dans le champ plat, la capote fauve à la coupe impressionnante s’aplatissait lentement sur le sol, comme un ballon qui se dégonfle. Louis et Steve se mirent à courir, mais ils n’allèrent pas bien loin.
    –  Sergent… – C’était la voix de Noah, très calme et très précise. – j’ai repéré l’endroit. A droite de ce gros arbre, là, à vingt mètres environ, juste devant ces deux buissons qui dépassent un peu les autres… Tu vois ?
    –  Je vois, dit Houlihan.
    –  C’est là. A deux ou trois mètres du premier buisson.
    –  Tu en es sûr ? questionna Houlihan. Je n’ai rien vu.
    –  J’en suis sûr, dit Noah.
    « Dieu ! pensa Michael avec lassitude, admirant et détestant Noah, Dieu ! que de choses a apprises ce garçon, depuis la Floride. »
    –  Alors, dit Houlihan à Michael, tu veux toujours envoyer ton rapport ?
    –  Non, dit Michael. Je ne veux rien envoyer du tout.
    –  Bien sûr. – Houlihan lui tapota chaleureusement l’épaule. – Bien sûr. Je savais que tu ne le ferais pas.
    Il décrocha le téléphone portatif et appela le P. C. de la compagnie. Michael l’écouta décrire avec minutie l’emplacement du nid de mitrailleuse.
    Le silence retomba sur le paysage environnant. Il était difficile de se rappeler qu’une minute plus tôt la mitrailleuse avait déchiré ce silence et que trois hommes étaient morts sur la rive du fleuve.
    Michael regarda Noah. Un genou en terre, la crosse de son fusil enfoncée dans la boue, la joue contre le canon, Noah évoquait ces vieilles peintures de pionniers des guerres indiennes, dans le Kentucky ou le Nouveau-Mexique. Noah soutint le regard de Michael les yeux fixes, brûlants, sans honte ni remords.
    Michael baissa les yeux et s’assit, réalisant enfin la pleine signification des mots que Noah avait essayé de lui dire, au dépôt de remplacement, sur la nécessité de n’aller, dans l’armée, que dans des endroits où l’on est entouré d’amis.
    Juste avant le crépuscule, les mortiers entrèrent en action. Les deux premiers obus tombèrent court, et Houlihan téléphona les corrections. Le troisième atterrit à l’endroit voulu, ainsi que le quatrième. Il y eut une étrange et courte agitation, au sommet de l’autre crête, un rapide remue-ménage, parmi les branches nues entrelacées, comme si un homme avait essayé d’en sortir et s’était effondré avant d’y parvenir. Puis les branches s’immobilisèrent, et Houlihan annonça au téléphone :
    –  Dans le mille, mon capitaine. Encore un au même endroit, par acquit de conscience.
    Le mortier en plaça un au même endroit, par acquit de conscience, mais rien ne bougeait plus, autour du nid de mitrailleuse.
    Dès que la nuit fut tombée, la compagnie du génie se mit au travail, avec ses planches et ses pontons. Michael et ses camarades aidèrent les sapeurs à transporter leur matériel jusque sur la rive du fleuve. Au milieu du champ, Michael distingua, du coin de l’œil, une masse claire et confuse. Il savait que c’était la capote fauve et s’empressa de regarder ailleurs. Travaillant dans l’obscurité glaciale, les sapeurs du génie avaient amené leur pont de bateaux jusqu’au centre du fleuve, lorsque la première fusée éclairante s’éleva dans les airs. Des deux côtés, l’artillerie entra en action. Il y eut quelques salves éparses d’armes de petit calibre, que les mortiers firent rapidement taire. Le tir de l’artillerie allemande était étrangement dispersé, comme si les canonniers ne disposaient que d’un nombre limité d’obus et que leurs observateurs avancés, au sommet

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