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Le Bal Des Maudits - T 2

Le Bal Des Maudits - T 2

Titel: Le Bal Des Maudits - T 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Irwin Shaw
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doit être merveilleux d’être psychiatre, dit Hope. Cela vous donne un esprit tellement pratique…
    Lewis sentit l’embarras lui paralyser la mâchoire inférieure.
    –  Je ne voulais pas suggérer quoi que ce soit qui… commença-t-il.
    –  Je vous en prie, capitaine, dit Hope. Et si vous voulez bien me permettre d’exprimer franchement ma pensée, fermez-la.
    « Oh, l’armée, gémit Lewis, intérieurement, elle transforme tous les hommes en parfaits crétins. Je ne me serais jamais conduit aussi stupidement, si j’avais été en civil. »
    –  Ici, le capitaine Mason, dit une voix à l’autre bout du fil.
    –  Allô ! Mason, dit vivement Lewis, heureux de cette diversion, j’ai ici M me  Ackerman. Voulez-vous faire immédiatement conduire le soldat Ackerman au parloir ?
    –  Vous avez cinq minutes, dit le M. P. Il se tint debout près de la porte de la petite pièce nue, qui avait des barreaux à toutes ses fenêtres, et deux chaises de bois au milieu de son plancher.
    Le plus difficile, c’était de ne pas pleurer. Il paraissait si petit. Tout le reste, la forme étrange de son nez, l’oreille baroquement décollée, le sourcil barré d’une cicatrice blanche, était déjà difficile à admettre, mais, le pire, c’était encore de le voir paraître si petit. Les treillis bleus étaient beaucoup trop grands pour lui, il avait l’air tout frêle et tout perdu, dans toute cette étoffe raide. Et ils le faisaient paraître tellement humble. Tout en lui était humble. Tout, sauf son regard. Sa façon d’entrer dans la pièce. Son sourire hésitant et doux, lorsqu’il l’avait aperçue. Le baiser hâtif et embarrassé, sous les yeux attentifs du M. P. Sa manière timide et douce de lui dire : « Hello ! ». C’était épouvantable d’imaginer tout ce qu’ils avaient dû lui faire pour produire en lui une telle humilité. Seuls, ses yeux étaient restés les mêmes et brillaient toujours, fièrement, fermement.
    Ils s’assirent, genou contre genou, sur les deux chaises de bois, comme deux vieilles dames se préparant à boire leur thé quotidien.
    –  Eh bien ! dit Noah doucement, eh bien ! eh bien !
    Il lui sourit. Il y avait entre ses dents, de pénibles espaces vides, où l’on ne voyait plus rien, que la gencive cicatrisée, et ils donnaient à sa physionomie massacrée un air absurde de ruse inintelligente. Mais Whitacre avait préparé Hope au spectacle des dents manquantes, et la jeune femme ne changea pas d’expression.
    –  Tu sais à quoi je pense constamment, depuis que je suis ici ?
    –  Non, dit Hope. À quoi penses-tu ?
    –  À une chose que tu as dite un jour.
    –  Dis-moi.
    –  Tu vois, il ne faisait pas trop chaud, pas trop chaud du tout.
    Noah sourit, et il fut, de nouveau, très difficile de ne pas pleurer.
    –  Je me souviens de la manière dont tu l’as dit.
    –  Quelle idée, dit Hope, en tentant de sourire, elle aussi. Quelle idée de se souvenir d’une chose pareille.
    Ils se regardèrent en silence, comme s’ils eussent été incapables de trouver un autre sujet de conversation.
    –  Ton oncle et ta tante ? dit Noah. Ils sont toujours à Brooklyn ? le jardin…
    –  Oui, dit Hope. Le M. P. s’agita, près de la porte, se grattant le dos contre le panneau supérieur. Le drap rugueux faisait un bruit énorme, contre le bois de la porte.
    –  Écoute, dit Hope, j’ai parlé au capitaine Lewis. Tu sais ce qu’il veut que je fasse…
    –  Oui, dit Noah, je sais.
    –  Je n’essaierai pas de te convaincre, dit Hope. Ni dans un sens ni dans l’autre. Tu feras ce que tu juges devoir faire.
    Puis elle s’aperçut que les yeux de Noah descendaient lentement vers son ventre, vers la ceinture trop serrée de la vieille robe.
    –  Je ne lui ai rien promis, dit-elle. Rien…
    –  Hope, dit Noah regardant fixement le ventre gonflé de sa femme. Dis-moi la vérité.
    Hope soupira.
    –  Dans cinq mois, dit-elle. Je ne sais pourquoi je ne te l’ai pas encore écrit. Il faut que je reste couchée presque tout le temps. Il a fallu que j’abandonne mon emploi. Le médecin disait que je ferais une fausse couche, si je continuais à travailler. C’est probablement pour cela que je ne t’en avais pas encore parlé. Je voulais être sûre que tout irait bien.
    Noah la regarda gravement.
    –  Tu es heureuse ? demanda-t-il.
    Hope souhaita désespérément, que le M. P. tombe raide mort sur le plancher.
    –  Je ne sais

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