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Le bouffon des rois

Le bouffon des rois

Titel: Le bouffon des rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Francis Perrin
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vicomte de
Tours, chambellan du roi et général des Finances, déjà accusé de malversations dans
la gestion des biens du Trésor, fut immédiatement emprisonné, jugé pour faux,
usage de faux, prise de commissions illégales et emprunts souscrits à taux
excessif. Il fut condamné à mort. Il ne fut pas décapité comme le noble qu’il
prétendait être mais pendu comme un vulgaire roturier au gibet de Montfaucon où
les oiseaux de proie venaient se faire de plantureux repas en becquetant les
yeux des pendus. Trafiquants, financiers, avocats se balancèrent bientôt côte à
côte au bout d’une corde.
    Je ne résistais pas à railler :
    « Toute leur vie ils ont rêvé d’obtenir une position
élevée, les voilà au faîte de leur gloire. »
    On condamnait beaucoup à mort, d’abord ceux qui n’avaient
pas de quoi payer leurs juges mais aussi ceux qui en avaient les moyens et qui
se retrouvaient pendus, étranglés, cloués au pilori ou exposés au supplice de
la roue, les membres brisés. Fiers du devoir accompli et pénétrés de
l’assurance que le Dieu tout-puissant n’aurait pas permis que des innocents
soient condamnés à mort, tous les gens de justice s’offraient, après la
sentence, un plantureux repas, le « past », aux frais bien entendu du
supplicié.
    Les bourreaux cherchaient toujours à améliorer les
exécutions pour le plus grand plaisir des badauds qui se pressaient en grand
nombre sur la place de Grève ou à Montfaucon. J’ai assisté à l’exécution
particulièrement atroce d’un parricide sur la personne de son beau-père :
il fut condamné à être tenaillé avec tenailles ardentes aux deux mamelles, aux
deux bras, aux cuisses et gros de jambes, ensuite appliqué sur une roue pour y
être rompu et brisé en chacun des membres, et après être demeuré quelque temps
en cet état, être étranglé tant que mort s’ensuive, puis le corps jeté en bas,
la face contre terre, et enfin être brûlé et réduit en cendres pour être jeté
aux vents.
    François I er se rendait presque tous les
jours à la Sainte-Chapelle pour y entendre les vêpres. Je le suivais comme à
mon habitude et notre entrée se faisait toujours dans un silence
impressionnant. À peine étions-nous installés que l’évêque entonnait le Deus in adjutorium, immédiatement suivi par des chantres dont les voix
puissantes se répandaient sous les voûtes. Un jour, surpris et agacé par ce
tonnerre de vociférations, je me levai, bondis sur l’évêque et lui assenai
quelques vigoureux coups de poing pour ensuite revenir calmement m’asseoir à ma
place. Sans s’émouvoir, François me demanda les raisons de ma fureur soudaine
contre cet homme de bien.
    « Ta, ta, ta ! Mon cousin, quand nous sommes
entrés ici, il n’y avait point de bruit et cestui-ci a commencé la noise ;
c’est donc lui qu’il faut punir… »
    C’était bien la parfaite démonstration de ma totale impunité
car j’en connus qui furent envoyés au bûcher pour moins que ça ! Bafouer
le clergé était un des crimes les plus sévèrement punis et ne pas le respecter
était ma manière à moi de participer à la Réforme sous le couvert de la
calembredaine.
    Marguerite protégeait ces idées nouvelles que François
apprécia d’abord mais sous l’influence de sa mère et des cardinaux du Grand Conseil,
il fit volte-face et s’en écarta bien vite. Il maria sa sœur avec Henri
d’Albret, roi de Navarre, et la força à s’éloigner de la cour où l’on murmurait
un peu trop sur son compte.
    Pendant qu’une deuxième guerre s’engageait entre
François I er et Charles Quint, ce dernier demanda qu’on lui
accorde un sauf-conduit pour traverser la France. Sans que « mon
cousin » ne me demande mon avis, je le devançai :
    « Si l’empereur est assez fou pour venir se jeter dans
la gueule du loup, je lui ferai don de mon bonnet à grelots !
    — Et si je le laisse passer librement, comme sur ses
propres États ? rétorqua le roi.
    — Alors, « mon cousin », c’est à vous que je
l’offrirai et j’effacerai son nom pour mettre le vôtre à sa place ! »
    J’ai tant d’ennemis à la cour qui ne me pardonneront jamais
de m’être élevé si haut sans être né noble qu’y être encore bouffon depuis si
longtemps est un tour de force exceptionnel.
    Les courtisans restaient toujours la cible favorite de mes
sarcasmes et je ne me privais jamais de les provoquer :
    « Courtisans, je ne vous crains

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