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Le Brasier de Justice

Le Brasier de Justice

Titel: Le Brasier de Justice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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selon qu’elles devaient protéger de coups et coupures ou de taches. Elles furent en usage jusqu’au XX e siècle.

XLII
    Nogent-le-Rotrou, novembre 1305
    S ans doute somnola-t-il par intermittence. Lorsqu’il se leva, peu avant vêpres, il se sentait frais et dispos. Impatient, même. Il s’aspergea le visage et les bras à sa table de toilette et descendit. L’aubergiste s’affairait à dresser les tables, déposant cuillers et gobelets pour ses clients du souper.
    — Maîtresse Hase. Ne me comptez pas ce soir parmi vos fidèles. Je suis invité.
    — Bonne soirée, messire Venelle. Gare au Bourg Neuf à la nuit, si vos pas vous y conduisaient. Qui dit commerçants dit bourses pleines, et donc canailles attirées comme mouches par le miel. Prenez donc une esconce. Les ombres sont propices aux gredins.
    — Je me méfierai. Le merci à vous.

    La nuit s’installait lorsqu’il sortit, brandissant la lampe à huile prêtée par l’aubergiste. Un vent féroce balayait les rues désertées. Parfois, une silhouette de mendiant tassée, emmitouflée dans ses hardes, rencognée sous un porche ou l’auvent d’une boutique, lui rappelait que la nuit n’était reposante que pour ceux qui pouvaient s’abriter entre des murs, sous un toit. Les autres mourraient bien vite. Certains tuaient dans l’espoir de survivre encore un peu.
    Il remonta vers l’essaim, le nuage de trous de dague. Il dépassa la magnifique demeure du bailli, dont toutes les fenêtres vitrées étincelaient de lumières, pour parvenir devant la belle coquille d’habitation qu’avaient abandonnée les artisans pour la nuit.
    Un providentiel héritier. Un homme du bailli. Hardouin n’avait guère eu besoin de demander son nom au maçon, se doutant de son identité. Les fenêtres béantes, tels des yeux aveugles, les murs soutenus d’étais lui évoquèrent un grand navire fantôme. Il remarqua pourtant qu’une moitié du rez-de-chaussée était fermée de volets clos.
    Hardouin cadet-Venelle réprima un rire. Le destin. Après un furtif regard pour s’assurer que nul passant attardé ne le remarquerait, il tira la palissade branlante qui fermait le chantier et se faufila dans le jardin envahi de mauvaises herbes desséchées et de gravats. Le volet ne résista que quelques secondes à la lame de sa dague. Il sauta à l’intérieur de la pièce.
    Un froid humide régnait. Une vague odeur aigrelette de moisissure et de cendres flottait. Bien que dispensant une pingre lumière, son esconce lui permit un rapide inventaire de la pièce, d’assez belle taille. Sans doute avait-elle servi de cuisine du temps des anciens propriétaires, s’il en jugeait par la vaste cheminée dont l’âtre dégueulait de cendres, et par l’évier creusé dans la pierre, sous une des fenêtres.
    La pièce semblait abriter quelqu’un aujourd’hui. Un homme. Hardouin cadet-Venelle s’approcha d’un matelas poussé contre un mur. Il palpa la qualité des couvertures et des draps de lin. Pas un vagabond. Il distingua un amas de vêtements posés sur une sorte de billot de cuisine et les examina. Fichtre : cendal, étamine de laine et brunette. Pas du droguet 1  ! L’occupant du lieu ne se refusait rien. Rondelet héritage, en vérité.
    Il souleva le matelas, fouilla une almaire bancale au fond de laquelle étaient entassés d’autres vêtements, usés et bien moins luxueux. Ceux d’avant le prétendu héritage, à n’en point douter. Rien de bien intéressant, si ce n’était une soudaine et intrigante fortune. Un peu dépité, Hardouin cadet-Venelle s’approcha de la cheminée. Il considéra l’abondance de cendres, songeant qu’elles ne provenaient pas uniquement de bois consumé. Des cendres lisses d’un gris très pâle, comme celles que produisait du papier brûlé. Non ! Comme celles que produisait le lin avec lequel on fabriquait le papier. Il les retourna du bout de sa dague. Un morceau d’étoffe blanche et marron rouge surgit du gris. Il l’examina, un calme irréel l’envahissant : un morceau de chainse, un poignet grignoté par les flammes et souillé de sang sec.

    Cadet-Venelle se redressa. Son cœur battait si lentement, si posément qu’il redouta un instant qu’il ne s’arrête. Il expira, bouche ouverte, son souffle se matérialisant en buée fragile. Un frisson fit trembler ses épaules. De froid, sans doute, puisqu’il ne sentait plus rien, ni surprise, ni haine, ni exaltation, ni attente.
    Soudain, une caresse

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