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Le cadavre Anglais

Le cadavre Anglais

Titel: Le cadavre Anglais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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éclat de rire les réunit.
    — … Le bruit court à Paris qu'une grande dame que je ne nommerai point, emportée dans une fièvre que je ne décrirai pas, s'est jetée dans un piège dont certains ont la clé. Qu'à bout d'expédients, cette dame a eu recours et s'en est remise à un truchement incertain. Lequel, ou laquelle, a tympanisé le négoce, la finance et la ferme de la place pour leur soutirer la somme nécessaire, énorme, oui énorme ! Que cette fée en quête du Graal n'a pas hésité à me visiter, me soumettant des pièces d'évidence forgées en vue de me convaincre d'y donner mon aval et… mon or. Qu'elle m'a assuré que la reine me manifesterait un signe d'assentiment lors d'une occasion solennelle. Voilà ce qu'elle promet à celui qui aura la faiblesse de se laisser prendre à cette embûche. Voilà, mon cher, une partie sans doute de ce que vous souhaitez apprendre et pour finir…
    — M. de Béranger est l'oiseau pris au piège qui a dû accepter ce marché !
    — Que j'appellerai Mme Cahuet de Villers, à qui nous avions eu affaire dans les derniers temps du feu roi, notre regretté maître. Elle s'est malheureusement insinuée chez la reine dont au demeurant les imprudences se multiplient… Et ceci n'est pas la voix ratiocinante de la vieille cour , vous le savez mieux que moi.
    Nicolas gardait le silence, il revoyait la reine s'extrayant d'un carrosse versé dans l'obscurité glaciale de la route de Versailles.
    — Il y a urgence, reprit La Borde, à sauver Sa Majesté de toute apparence d'inconséquence. Le mal vient de ses entours. Il est notoire que son affection se partage entre la princesse de Lamballe, surintendante de sa maison, et la comtesse de Polignac. Cette dernière rallie son parti chez la princesse de Guéméné. Il y bourdonne un essaim de jeunes gens, trop libres à mon gré de barbon ! Cette société y jette des ridicules sur les plus respectables, persiflant sans relâche ceux auxquels elle veut nuire. On s'emploie ainsi à tous les petits manèges de l'intrigue. J'ajoute que la comtesse de Polignac, dans son intention de détruire sa rivale et toute à son désir de se faire valoir, ne cesse de rapporter à M. de Maurepas 52 , qui avale tout comme une éponge, le menu de ce qui peut être curieux d'apprendre des pensées et des actions de la reine.
    — Considérez que Sa Majesté a toujours su imprimer à ceux qui l'entourent une contenance de respect qui contrebalance un peu la liberté de têtes folles.
    — Vous parlez d'or et en serviteur fidèle. Reste l'autre versant. La société de la princesse de Lamballe en remontrerait s'il en était besoin. Elle ne vaut guère mieux et les intrigants qu'on y croise appartiennent au-dessus du panier, pour parler comme à la halle ! Le duc de Chartres et tout ce qui tient à la maison d'Orléans s'y affichent assidûment. La reine n'a rien à gagner de cette fréquentation-là. Et le comte d'Artois y paraît toujours. Au dernier voyage de Fontainebleau, l'automne dernier, la reine a commencé à perdre gros au jeu. Il lui fut d'ailleurs représenté par des gens qui lui veulent du bien…
    Nicolas supposa qu'il s'agissait de M. de Mercy-Argenteau, l'ambassadeur d'Autriche, et de l'abbé de Vermond, lecteur de la reine, dont le dévouement à la fille de Marie-Thérèse ne se pouvait mettre en doute.
    — … combien de pareilles soirées étaient dangereuses de conséquences, ne fût-ce que celle de laisser le roi seul au profit d'un divertissement qu'il déteste et qui le met dans l'impossibilité d'aller passer la nuit dans l'appartement de la reine, puisque décidément on fait chambre à part désormais. C'est la mode chez ces jeunes femmes… Alors que la France attend un héritier au trône !
    Nicolas soupçonna son ami de parler pour lui-même. Sa jeune femme languissait depuis des années d'accès mélancoliques que la Faculté ne parvenait pas à juguler.
    — Et s'il n'y avait que les cartes ! Le jeu de billard installé chez la reine attire aussi une société fort mêlée de jeunes étourdis. Voilà le tableau de la cour ! De notre temps, cher Nicolas, elle se tenait. Si elle n'était pas exemplaire – et je ne m'érigerai pas en censeur – la décence et la mesure y présidaient et rien en public ne transparaissait.
    Un court billet fut scellé et tendu au commissaire destiné à Loiseau de Béranger. Avant que Nicolas ne le quitte, M. de La Borde tint à lui présenter l'une de ses

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