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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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survécu, Philibert l'imaginait mal se séparer d'un de ses plus fidèles amis juste pour assassiner l'Égyptienne. Le départ de Houchang cachait autre chose, c'était évident. Mais quoi ? D'après ce que lui en avait dit Hugues de Luirieux, la belle était passée maîtresse dans l'art de la rouerie. Avait-elle aussi floué son époux avant de le trahir ? Aurait-elle emporté quelque chose de précieux ? Ou le prince la croyait-il capable de vendre ses fils à Bayezid ?
    Arrivé devant le donjon, Philibert de Montoison décida que son lieutenant détenait peut-être sans le savoir un indice, et qu'avant de révéler au grand prieur la trahison de Djem, mieux valait s'en assurer. Il s'avança donc sous la porte voûtée creusée dans la masse imposante des hauts murs, passa la salle des gardes et s'enquit de son lieutenant. Il ne fut pas surpris d'apprendre que Hugues de Luirieux avait quitté le château pour le village en contrebas. Outre l'église, le cimetière et le presbytère qui acculaient les modestes demeures à la montagne se trouvait là une petite taverne, aussi triste d'allure que les habitants, mais où le lieutenant Hugues de Luirieux avait pris l'habitude de tromper son ennui. Ses fenêtres ouvertes sur la vallée la rendaient plus avenante pour jouer aux cartes et se régaler de bière que la salle des gardes du donjon, à peine éclairée de meurtrières. Quant à chercher dans l'enceinte du château un peu de verdure, il n'y fallait pas compter. Le roc était aussi pelé et noir que les murailles elles-mêmes. Pas une herbe ne s'y accrochait.
    Philibert reprit donc son cheval que par chance on n'avait pas encore dessellé. Rien ne distinguait la taverne des autres maisons basses au toit d'ardoises, sinon une enseigne de fer rouillée annonçant Le Gosier sec , laquelle, accrochée par deux chaînes au-dessus de la porte voûtée, couinait par grand vent. Philibert noua la longe de son cheval au rectangle de fer piqué dans la façade, à côté de trois autres qui trahissaient la présence de ses compagnons. Le battant était entrebâillé. Il le poussa du pied et pénétra dans la pièce modeste au sol de terre battue, qui contenait pour tout mobilier une étagère surchargée de hanaps et de pichets de terre cuite, et quelques tables flanquées de bancs. Deux vieillards somnolents en avaient adopté une et mâchonnaient de vieilles rancunes pour occuper le temps. Philibert s'avança vers la fenêtre, sous laquelle étaient attablés Hugues de Luirieux et deux autres, Bernard Grandjean et Abélard Vari, qui les avaient accompagnés neuf mois plus tôt à Sassenage.
    — Te voilà donc rassasié de courir après ta belle ? l'apostropha son lieutenant.
    En guise de réponse, Philibert se contenta de commander une pinte de bière au tavernier apathique et rougeaud, avant de s'asseoir.
    — Du nouveau, messire ? demanda Grandjean en suspendant son geste au-dessus du plateau de dés.
    Philibert de Montoison hocha la tête et attendit d'être servi pour leur révéler l'évasion de Houchang et les conclusions qu'il en avait tirées. Hugues de Luirieux s'emmura aussitôt dans un mutisme empreint d'une réflexion profonde. Le méchant tour que lui avaient joué l'Égyptienne et son protecteur était une épine en son orgueil. À peine ces deux-là avaient-ils quitté Rhodes que Hugues de Luirieux avait été convoqué par le grand maître de l'ordre des Hospitaliers afin de s'expliquer sur les raisons de son mensonge. Hugues de Luirieux avait refusé de démordre de sa version des faits. Il avait fait passer Enguerrand pour un fourbe dont il s'était toujours méfié. Il lui avait même attribué ses propres desseins à l'encontre des enfants de Djem. Hugues de Luirieux n'était pas certain que Pierre d'Aubusson l'ait cru. Lorsqu'il avait demandé l'autorisation de pourchasser Enguerrand de Sassenage, le grand maître la lui avait refusée, prétextant qu'il avait un message à transmettre à Guy de Blanchefort et que les tempêtes arrivant en Méditerranée avec l'automne, il préférait le renvoyer en terre de France pour le porter.
    « Quant à ce prétendu chevalier de Sassenage, puisqu'il est loin désormais, laissons-le aller, avait affirmé Pierre d'Aubusson. Comme tout chrétien en terre musulmane, il se heurtera à bien des difficultés avant de pouvoir seulement espérer tromper Keït bey ! »
    Hugues de Luirieux était rentré. Mais l'inactivité aidant, la rancœur ne l'avait pas

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