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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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Saint-Just, étaient reliés entre eux. Lorsqu'il se trouva devant la première intersection, il hésita quelques secondes. Tournerait-il à gauche en direction de la Bâtie ou allongerait-il tout droit jusqu'à l'abbaye pour rejoindre l'itinéraire suivi par Jeanne en la quittant ? Si Marthe la retenait captive sous terre, ce qui semblait le plus vraisemblable, il y avait fort à parier que cela soit proche du château pour plus de commodité. Décrochant son bâton noirci, il traça une croix sur le mur dextre du boyau de sortie pour retrouver sans hésitation son chemin au retour et obliqua vers la Bâtie. Il serait toujours temps, s'il ne trouvait pas Jeanne, de revenir en arrière.
    *
    — Bien le bonjour, ma mie, s'exclama Philibert de Montoison en forçant sans s'annoncer la porte de la chambre de Philippine.
    Au mépris de tout savoir-vivre, il s'attabla face à la jouvencelle devant le matinel qu'Algonde venait de lui servir et s'apprêtait à partager avec elle.
    — Laisse-nous, ordonna-t-il à la chambrière avec suffisance.
    — Reste, objecta Philippine, les sourcils froncés sur un élan de colère.
    Philibert lorgna sans vergogne le buste de sa promise, tendu par-delà la table sous le tissu de sa chemise de nuit.
    — Je n'ai que faire d'un chaperon.
    — Et moi d'un porc !
    Philippine s'était dressée si brusquement que la table sursauta. Le bouillon de poule fumant dansa dans son écuelle. Algonde, immobile près du lit qu'elle venait d'aérer, la sentit prête à en ébouillanter Philibert.
    — Pour qui vous prenez-vous, pour surgir de la sorte à pareille heure ?
    L'indignation de Philippine n'atteignit pas Philibert. Cueillant avec nonchalance quelques baies de sureau dans une coupelle, il les croqua d'un coup de dent pour inonder son palais de jus noir avant de les avaler.
    — Pour votre futur époux. Asseyez-vous, Hélène. Nous avons à parler.
    — Lorsque je l'aurai décidé, tempêta Philippine en croisant les bras sur sa poitrine.
    Philibert se fit goguenard.
    — Asseyez-vous, vous dis-je. Vos cuisses se donnent en spectacle dans le contre-jour et je ne voudrais pas que votre servante en soit choquée.
    Se rendant compte qu'elle se tenait dos à la croisée inondée de soleil, Philippine se laissa choir sur sa chaise, les joues en feu.
    — Je vous hais, grogna-t-elle, l'œil noir.
    — Tant mieux. Il m'ennuierait que vous vous affadissiez à mes côtés.
    Il pivota du menton vers Algonde.
    — Votre maîtresse n'a rien à craindre pour sa vertu. Sortez.
    — Je n'ai pas d'ordre à recevoir de vous, messire.
    — Point encore, il est vrai. Mais il serait dommage de me déplaire si vous espérez conserver votre place au lendemain de mes noces. Filez.
    Peu impressionnée par ses menaces, Algonde ne bougea pas d'un pouce.
    — J'ai votre parole, messire ? fulmina Philippine.
    — Si cela peut vous rassurer…
    — Va, dit-elle à Algonde. Mais ne t'éloigne pas.
    Algonde traversa la pièce pour gagner la porte qui reliait l'appartement de Philippine au sien, la passa mais, en place de la refermer, la garda grande ouverte. Si le sire de Montoison s'avisait de la toucher, nul doute que Philippine hurlerait.
     
    La nourrice qui s'occupait d'Elora alors qu'Algonde s'affairait ou paraissait en société s'employait à baigner l'enfançonne dans le petit cabinet de toilette. Un plaisir dont Algonde était, la plupart du temps, privée. Étendue à plat dos sur une claie posée à même le baquet qui servait aux ablutions de sa mère, Elora babillait en gesticulant sous l'éponge, ravie visiblement de l'eau parfumée qui courait sur sa peau. L'oreille tendue vers la pièce d'à côté, Algonde lui claqua un baiser au nombril, sous la petite tache ovoïde et noire que sa fille portait au sternum, comme un rappel discret du poison de la vouivre dans lequel elle s'était développée. Un rire léger cascada à ses oreilles. Chatouilleuse, Elora en raffolait.
    — Laissez, Bernaude, je vais terminer, dit-elle à la nourrice ronde et joviale en relevant la tête.
    C'était sans doute la seule en ce palais qui, attachée spontanément à la fillette, ne manifestait aucune animosité au regard des privilèges dont Algonde jouissait.
    — Avec joie, s'inclina-t-elle en lui passant le relais.
    Algonde rinça l'éponge dans le seau, ramenant un peu de tiédeur sous ses doigts.
    — Brrrrrrrrrr, chantait la moue d'Elora, dont le regard vert d'eau, immense, se repaissait de sa

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