LE CHÂTEAU DANGEREUX
captivité, et que je reste seule dans un pays étranger ? »
« Si tel devait être l’événement du combat, répondit sir James, Douglas lui-même, madame, vous rendrait à votre terre natale ; car jamais son épée ne causa de maux qu’il ne fût prêt à réparer avec cette même épée ; et si sir de Walton indique le moins du monde qu’il renonce à continuer ce combat, ne fût-ce qu’en détachant une plume du panache de son casque, Douglas renoncera pour sa part à tout projet pouvant porter atteinte à l’honneur ou à la sûreté de cette dame, et cette lutte suspendue jusqu’à ce que la querelle nationale nous ramène l’un contre l’autre. »
Sir John de Walton réfléchit un moment, et Augusta de Berkely, quoiqu’elle ne parlât point, le regarda avec des yeux qui indiquaient clairement combien elle désirait qu’il choisît l’alternative la moins hasardeuse ; mais les propres scrupules du chevalier l’empêchèrent d’accepter un arrangement si favorable.
« Il ne sera jamais dit de sir John de Walton, répliqua-t-il, qu’il a compromis au moindre degré son propre honneur ou celui de son pays. Ce combat peut se terminer par ma défaite, ou plutôt par ma mort, et, dans ce cas, je n’ai plus rien à espérer en ce monde : alors, en rendant le dernier soupir, je confie à Douglas le soin de lady Augusta, espérant qu’il la défendra au péril de ses jours et trouvera moyen de la replacer saine et sauve dans le château de ses aïeux. Mais, tant que je vivrai, en supposant qu’elle puisse en avoir un meilleur, elle n’aura néanmoins pas besoin d’un autre protecteur que celui qu’elle a honoré en le choisissant pour tel ; et je ne céderai pas, ne fût-ce qu’une plume de mon casque, pour donner à entendre que j’ai soutenu une querelle injuste, défendant la cause, soit de l’Angleterre, soit de la plus belle de ses filles. Tout ce que je puis accorder à Douglas, c’est une trève immédiate, à condition que ma dame pourra sans obstacle se retirer en Angleterre, et que nous continuerons ce combat un autre jour. Le château et le territoire de Douglas appartiennent à Édouard d’Angleterre, le gouverneur qui commande en son nom est le gouverneur légitime ; et ce, je le soutiendrai la lance au poing tant que mes yeux seront ouverts. »
« Le temps fuit, répliqua Douglas, sans attendre notre décision, et aucun de ses instans n’est aussi précieux que celui qui s’écoule avec chaque souffle d’air vital que nous respirons actuellement. Pourquoi ajournerions-nous à demain ce qui peut tout aussi bien se faire aujourd’hui ? nos épées seront-elles plus tranchantes, ou nos bras plus vigoureux à les manier qu’ils ne sont à présent ? Douglas fera tout ce qu’un chevalier peut faire pour secourir une dame malheureuse mais il n’accordera point au chevalier de cette dame la moindre marque de déférence, ce que sir John de Walton se croit vainement capable d’extorquer par la force des armes. »
À ces mots, les chevaliers recommencèrent leur lutte à mort, et la dame fut indécise si elle tenterait de s’évader à travers les sentiers tortueux du bois, où si elle attendrait l’issue du combat. Ce fut plutôt son désir de voir quel serait le sort de sir John de Walton, que toute autre considération, qui la fit demeurer comme retenue par un charme sur la place où l’une des plus terribles querelles qui se vidèrent jamais était vidée par les deux plus braves champions qui tirèrent jamais l’épée. Enfin la dame s’efforça de mettre un terme au combat en profitant de la circonstance des cloches qui commençaient à sonner le service du jour, car c’était le dimanche des Rameaux.
« Au nom du ciel, dit-elle, au nom de vous-mêmes, au nom de l’amour des dames et des devoirs de la chevalerie, suspendez vos coups seulement pour une heure, et espérons que, quand les forces sont si égales, il se trouvera quelque moyen de convertir la trève en une paix solide. Songez que c’est aujourd’hui la fête des Rameaux : souillerez-vous par du sang une si grande solennité du christianisme ? Interrompez du moins votre lutte de manière à vous rendre à la plus proche église, portant avec vous des rameaux, non pas à la manière ni avec l’ostentation des conquérans de ce monde, mais comme rendant l’hommage dû aux règles de l’église, et aux institutions de notre sainte religion. »
« J’étais en chemin, belle
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