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Le cheval de Troie

Le cheval de Troie

Titel: Le cheval de Troie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colleen McCullough
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l’as dit toi-même. D’après l’oracle, la femme venue de Grèce causera notre perte. Et tu demandes à la voir  ! Respecte nos dieux ! Écoute nos oracles ! Que sont les oracles sinon l’occasion que les dieux offrent aux mortels de voir ce que leur réserve l’avenir ? Et tu as fait pire que ton père Laomédon ; quand il se contentait de réduire le nombre des marchands grecs autorisés à venir dans le Pont-Euxin, tu leur en as interdit l’accès. Les Grecs peuvent se procurer du cuivre à l’ouest à un prix exorbitant, mais pas d’étain. Malgré cela ils sont riches et puissants.
    Pâris leva un visage ruisselant de larmes vers le roi.
    — Père, je te le répète, Hélène n’est pas un trophée ! Elle vient de son plein gré. Elle ne peut donc pas être la femme dont parle l’oracle. Cela ne se peut !
    Je parvins à intervenir avant Anténor.
    — Toi, Pâris, tu affirmes qu’elle vient de son plein gré, mais est-ce là ce qu’on pensera en Grèce ? Crois-tu qu’Agamemnon , orgueilleux comme il est, dira à ses vassaux que son frère est cocu ? Non, Agamemnon prétendra qu’Hélène a été enlevée. Anténor a raison, père, nous sommes à la veille d’une guerre. De plus, nous ne sommes pas les seuls concernés. Nous avons des alliés, nous faisons partie d’une fédération d’États d’Asie Mineure. S’il y a la guerre, crois-tu qu’Agamemnon s’en prendra uniquement à Troie ? Non, la guerre s’étendra partout.
    Père me regardait fixement, mais je ne baissai pas les yeux. Naguère il m’avait dit : « Tu me ramènes toujours à la réalité. » Maintenant, hélas ! il l’avait complètement perdue de vue. Anténor et moi avions seulement réussi à renforcer sa détermination.
    — J’en ai suffisamment entendu, coupa-t-il d’un ton glacial. Héraut, fais entrer la reine Hélène.
    Nous attendîmes. Un silence de mort régnait dans la salle. Je foudroyai Pâris du regard. Comment avions-nous pu le laisser devenir un tel imbécile ? Il s’était retourné, les yeux fixés sur les portes, un sourire béat aux lèvres. Sans doute pensait-il que nous allions être grandement surpris.
    Les portes s’ouvrirent. Hélène s’arrêta un instant sur le seuil avant de s’avancer vers le trône. Sa jupe tintait agréablement à chacun de ses pas. Je retins mon souffle. C’était vraiment la plus belle femme que j’aie jamais vue. Même Anténor en était bouche bée. Épaules rejetées en arrière, tête haute, la démarche à la fois digne et gracieuse, elle avait le corps le plus beau qu’Aphrodite ait jamais accordé à une femme : taille de guêpe, hanches harmonieusement galbées, longues jambes, il n’y avait rien en elle qui ne fût agréable à regarder. Et ses seins ! Nus, à la mode grecque, arrondis et fermes, ils ne devaient rien à l’artifice, sinon que les mamelons étaient peints en or. Elle était tout simplement… merveilleuse .
    Dans quelle mesure tout cela était-il réel, dans quelle mesure fûmes-nous envoûtés ? Jamais je ne le saurai. Hélène était la plus grande œuvre d’art que les dieux aient créée sur cette terre.
    Pour mon père, elle fut le Destin. Il n’était pas encore d’un âge assez avancé pour avoir oublié les plaisirs de la chair et au premier regard il tomba amoureux d’elle. Ou peut-être la désira-t-il seulement. Mais il était trop vieux pour la voler à son fils. Aussi préféra-t-il considérer que celui-ci lui faisait un honneur de l’avoir attirée si loin de son mari, de ses enfants, de son pays. Il tourna son regard émerveillé vers Pâris.
    Certes, ils formaient un beau couple : lui le brun Ganymède, elle la blonde Artémis. En quelques pas, Hélène avait conquis toute la salle et personne à présent ne pouvait reprocher à Pâris sa stupidité.
     Dès que le roi congédia l’assemblée, je montai sur l’estrade et m’approchai lentement du trône. J’étais trois marches au-dessus du couple et j’arrivais largement à la hauteur du trône en or et en ivoire de mon père. En général, je ne faisais pas étalage de ma supériorité, mais Hélène m’agaçait. Je voulais qu’elle sût exactement quel rang j’occupais et quel était celui de Pâris.
    — Ma chère enfant, voici Hector, mon héritier, dit père.
    Elle inclina la tête d’un air à la fois grave et majestueux.
    — Enchantée, Hector, puis, écarquillant les yeux d’un air admiratif, elle ajouta : comme tu es

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