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Le cheval de Troie

Le cheval de Troie

Titel: Le cheval de Troie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colleen McCullough
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donc cet amour, qu’une unique seconde avait vu naître ? J’avais appris depuis mon mariage à résister à la luxure. Mais l’amour authentique était irrésistible. J’avais mille raisons de vouloir n’être qu’avec Pâris. Je voulais vivre à ses côtés. Je voulais savoir ce qu’il pensait, ce qu’il ressentait, comment il était pendant son sommeil. La flèche qui mena Orphée jusqu’aux Enfers et Phèdre au suicide m’avait transpercée. Ma vie ne m’appartenait plus ; elle appartenait à Pâris. J’étais prête à mourir pour lui. Mais vivre pour lui ! Ô délice !
    Au chant du coq, quelques instants après que je me fus couchée, Ménélas vint dans ma chambre. Il avait l’air penaud et refusa de m’embrasser.
    — Mon haleine empeste le vin, mon amour. J’ignore pourquoi j’ai tant bu.
    Je le fis asseoir près de moi sur le lit.
    — Comment vas-tu ce matin, à part ton haleine ?
    — Je ne me sens pas très bien. Hélène, j’ai un problème, ajouta-t-il en fronçant les sourcils.
    Ma bouche se dessécha ; je me passai la langue sur les lèvres. Un des nobles lui avait parlé.
    — Un problème, dis-je d’une voix rauque.
    — Oui. Un messager venu de Crète m’a éveillé. Mon grand-père Catrée est mort et Idoménée retarde les funérailles en attendant la venue d’Agamemnon ou la mienne. Bien sûr, c’est moi qui partirai. Agamemnon est retenu à Mycènes.
    — Ménélas, tu ne peux pas partir !
    Il prit ma véhémence pour un témoignage d’amour.
    — Je me dois d’y aller, Hélène, je n’ai pas le choix.
    — Seras-tu longtemps absent ?
    — Au moins six lunes. Tu devrais mieux connaître la géographie ! Les vents d’automne me pousseront jusqu’en Crète, mais il me faudra attendre les vents d’été pour revenir ici.
    — Ah ! soupirai-je. Quand pars-tu ?
    — Aujourd’hui même, Hélène, répondit-il en me serrant le bras. Il me faut d’abord aller à Mycènes voir Agamemnon et comme je prendrai le bateau à Lerne ou à Nauplie, je ne pourrai revenir ici avant d’embarquer. C’est vraiment dommage, conclut-il, ravi de me voir à ce point consternée.
    — Mais tu ne peux t’absenter, Ménélas. Tu as un invité.
    — Pâris comprendra. J’accomplirai les rites de purification dès ce matin, avant de partir pour Mycènes, mais je veillerai à ce qu’il reste ici aussi longtemps qu’il le désire.
    — Emmène-le donc avec toi, à Mycènes.
    — Hélène, allons ! Naturellement il devra aller à Mycènes, mais c’est à lui d’en décider, répliqua mon stupide mari, désireux de plaire a son hôte, mais totalement inconscient du danger qu’il représentait.
    — Ménélas, tu ne peux m’abandonner ainsi, seule avec Pâris !
    — Pourquoi pas ? Tu as des chaperons, Hélène.
    — Agamemnon n’est peut-être pas de cet avis.
    Il m’embrassa la main, caressa mes cheveux.
    — Hélène, ne te tracasse pas inutilement. Je te fais confiance. Agamemnon aussi te fait confiance.
    Comment lui expliquer que moi, je ne me faisais pas confiance ?
    L’après-midi, au pied des marches du palais, je fis mes adieux à mon époux. Pâris ne se montra pas. Une fois que les chars eurent disparu à l’horizon, je courus me réfugier dans mes appartements et n’en sortis plus ; on m’y apportait mes repas. Si Pâris ne me voyait pas, peut-être se lasserait-il de son petit jeu et partirait-il pour Mycènes ou Troie. Et les nobles n’auraient pas l’occasion de nous voir ensemble.
    La nuit venue, il me fut impossible de dormir. Je fis les cent pas dans ma chambre, puis allai à la fenêtre. Amyclées était plongée dans l’obscurité. La pleine lune inondait de sa clarté la vallée de Lacédémone. Je me penchai par la fenêtre entrouverte et me laissait envahir par la sérénité de la nuit. Sous le charme, je sentis pourtant la présence de Pâris. Il contemplait le ciel par-dessus mon épaule. Je ne criai pas, je ne me retournai pas, mais il sut que je savais. Il prit mes coudes dans ses mains et m’attira tendrement contre lui.
    — Hélène d’Amyclées, tu es aussi belle qu’Aphrodite.
    — Ne tente pas la déesse, Pâris. Elle hait ses rivales.
    — Elle ne te hait point. Ne comprends-tu donc pas ? C’est Aphrodite qui t’a donnée à moi. Car je lui appartiens, je suis son bien-aimé.
    Ses mains autour de ma taille dessinaient des cercles, lentement, sans hâte, comme s’il disposait de l’éternité pour me

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