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Le cheval de Troie

Le cheval de Troie

Titel: Le cheval de Troie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colleen McCullough
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affaires qui séchaient au soleil.
    Peut-être dormis-je un moment. Peut-être étais-je déjà sous l’effet du sortilège. Quand je revins à moi, le soleil gagnait le sommet des arbres et l’air avait fraîchi. Il était grand temps de partir. Patrocle allait s’inquiéter.
    Je me levai pour aller chercher mes affaires et c’est alors que je perdis la raison. Comment expliquer l’inexplicable ? Je tombai sous l’emprise d’un sortilège, j’étais coupé de la réalité, je me trouvai dans un monde étrange. Une odeur fétide que j’associai à la mort me pénétra, la plage devint minuscule, tandis qu’un sanctuaire sur le promontoire prit une telle ampleur que j’imaginai qu’il allait basculer et s’écraser sur moi. Monde de contradictions, où certaines choses grossissaient, d’autres rapetissaient.
    Un liquide saumâtre coulait aux commissures de mes lèvres. Terrorisé, je tombai à genoux, incapable – malgré ma jeunesse et ma vigueur – de surmonter la peur atroce qui m’étreignait. Ma main gauche se mit à trembler, ma joue gauche se contracta, ma colonne vertébrale se raidit. Pourtant je m’efforçai de rester conscient, ne voulant pas laisser cet inquiétant processus aller plus loin encore, j’ignore combien de temps dura ce sortilège. Quand je retrouvai mes esprits, le soleil avait disparu, le ciel était tout rose, l’air serein et empli du chant des oiseaux.
    Tremblant comme un homme pris de fièvre, un mauvais goût dans la bouche, je me relevai en vacillant. Je ne pris pas la peine de ramasser mes affaires et j’oubliai ma Vieille Pélion. Je ne souhaitais qu’une chose : rejoindre le camp et mourir dans les bras de Patrocle. Quand il m’entendit venir, il courut à moi, bouleversé, et m’étendit près du feu sur des peaux de bêtes. Après avoir bu un peu de vin, je sentis la vie revenir en moi et m’assis, tout heureux d’écouter mon cœur battre.
    — Que s’est-il passé ? demanda Patrocle.
    — Un sortilège, dis-je d’une voix rauque, un sortilège.
    — Le sanglier t’a-t-il blessé ? Es-tu tombé ?
    — Non, je n’ai eu aucun mal à tuer le sanglier. Mais ensuite, je suis descendu jusqu’à la mer pour me laver de son sang et c’est alors qu’est survenu le sortilège.
    — Quel sortilège, Achille ?
    — Comme si la mort venait. Je la sentais, j’en avais le goût dans la bouche. Le monde ne cessait de se transformer. Je me suis vu mort, Patrocle ! Jamais je ne me suis senti si seul ! Mes membres étaient paralysés, je tremblai comme un lâche. Mais je ne suis ni couard ni vieux. Alors, que m’est-il arrivé ? Qu’était ce sortilège ? Aurais-je offensé quelque dieu ?
    Son visage trahit l’inquiétude ; plus tard il me rapporta que j’avais vraiment l’air de revenir d’entre les morts, car j’étais blême, nu, couvert d’égratignures, tremblant comme une feuille.
    — Étends-toi, Achille, laisse-moi te couvrir. Peut-être n’était-ce pas un sortilège, mais simplement un rêve.
    — C’était un cauchemar.
    — Mange un peu, bois du vin. Des fermiers sont venus apporter quatre de leurs plus belles peaux pour te remercier d’avoir tué le sanglier.
    — Je serais devenu fou si je ne t’avais pas trouvé, Patrocle. Je ne pouvais supporter l’idée de mourir seul.
    Il me serra les mains et les embrassa.
    — Je suis bien plus ton ami que ton cousin, Achille. Je serai toujours auprès de toi.
    Je sentis que je m’assoupissais. Je souris, tendis la main pour lui caresser les cheveux.
    — Toi pour moi, moi pour toi. Comme toujours.
    — Et pour toujours, répondit-il.
     
    Le matin suivant, j’allais très bien. Patrocle s’était levé avant moi ; le feu était allumé, un lapin cuisait au-dessus des flammes pour le premier repas. Il y avait aussi du pain, apporté par les fermières pour nous remercier d’avoir tué le sanglier.
    — Te voilà redevenu toi-même, dit Patrocle en me tendant du lapin rôti sur une tranche de pain.
    — C’est vrai, répondis-je.
    — Tes souvenirs sont-ils aussi précis qu’hier soir ?
    — Oui et non. C’était un sortilège, Patrocle. Un dieu m’a parlé, mais je n’ai pas compris le message.
    — Le temps éclaircira ce mystère.
    Patrocle avait cinq ans de plus que moi. Le roi Lycomède de Scyros l’avait adopté quand son père, Ménœtios, était il y a longtemps mort de maladie à Scyros. C’était un demi-cousin, car Ménœtios était le fils

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