Le clan de l'ours des cavernes
autres créatures vivantes.
Si nous refusions de tuer un cerf ou tout autre animal, nous ne pourrions survivre très longtemps. Comme le désir de vivre est le plus fort, nous apprenons à ressentir une compassion sélective. Nous la limitons. Ayla écoutait, fascinée.
- La difficulté consiste à savoir comment juguler ce sentiment sans le pervertir, poursuivit Zelandoni. C'est ce qui est la racine des préoccupations de Joharran devant les révélations que tu nous as faites.
Tant que la plupart des Zelandonii croyaient que les Têtes Plates n'étaient que des animaux, ils pouvaient les massacrer sans réfléchir. C'est plus difficile de tuer des êtres humains. La compassion est alors si forte que l'esprit doit inventer de nouvelles raisons. Si nous lions l'acte de tuer à
notre survie, l'esprit opère les contorsions nécessaires pour le justifier.
Nous excellons dans cet exercice. Mais il change les hommes. Ils apprennent à haÔr. Ton loup n'a pas besoin de haÔr ce qu'il croque. Ce serait plus facile si nous pouvions tuer sans scrupule, comme ton animal, mais alors nous ne serions pas humains.
- Maintenant je comprends pourquoi tu es la Première parmi Ceux qui Servent la Mère, dit Ayla après un silence. Je sais combien c'est difficile de tuer. Je me souviens du premier animal que j'ai tué avec ma fronde. C'était un porc-épic. J'avais tellement de remords que je ne suis pas retournée chasser avant un long moment et que j'ai d˚ me trouver une raison. J'ai décidé de m'en prendre uniquement aux carnivores parce qu'ils volaient parfois la viande du Clan et chassaient eux aussi les bêtes dont nous tirions notre subsistance.
- C'est à ce moment-là que nous perdons notre innocence, Ayla. quand nous découvrons ce que nous devons faire pour vivre. Voilà pourquoi la première bête abattue par un jeune chasseur est si importante. Il ne s'agit pas seulement des changements physiques qui font de lui un adulte. La première chasse est la plus difficile. Outre l'obligation de surmonter sa peur, l'adolescent doit montrer qu'il est capable d'accomplir l'acte indispensable pour survivre. C'est aussi pour cela que nous célébrons certaines cérémonies afin d'honorer les Esprits des animaux que nous tuons.
C'est une façon d'honorer Doni. Nous devons nous rappeler que la vie de ces créatures est sacrifiée afin que nous puissions vivre, et nous devons en éprouver de la gratitude. Sinon, nous courons le risque de trop nous endurcir, et cela pourrait se retourner contre nous.
" Nous devons toujours exprimer notre gratitude pour ce que nous prenons ; nous devons aussi honorer les Esprits des arbres, des plantes et des autres nourritures qui poussent. Nous devons traiter avec respect tous les Dons de la Mère. Si nous ne le faisons pas, Elle pourrait se f‚cher et reprendre la vie qu'Eue nous a donnée. Si nous oublions un jour notre Grande Terre Mère, Elle ne pourvoira plus à nos besoins. Si Elle décide de tourner le dos à
Ses enfants, nous n'aurons plus d'endroit o˘ vivre.
- Zelandoni, tu me rappelles Creb de maintes façons. Il était bon et je l'aimais, mais surtout, il comprenait les gens. Je pouvais toujours compter sur lui. J'espère que je ne t'offense pas, je n'en avais pas l'intention.
La doniate sourit.
- Je ne suis pas offensée. Je voudrais l'avoir connu, au contraire. Et tu peux toujours compter sur moi, j'espère que tu le sais, Ayla.
La compagne de Jondalar repensa à sa conversation avec la Première en s'apprêtant à préparer la terre rouge. Lorsqu'elle entreprit le dur labeur consistant à écraser les morceaux de minerai de fer avec sa pierre ronde, elle s'efforça de se concentrer sur sa t‚che pour oublier l'incident avec Brukeval. L'effort contribua à diminuer sa tension nerveuse, mais le caractère répétitif du travail lui laissait l'esprit libre, et Zelandoni lui avait donné à réfléchir.
Elle a raison, se dit-elle. Je me suis fait un ennemi de Brukeval. qu'y puis-je, maintenant ? Pas un instant elle n'avait songé à mentir en déclarant qu'elle ne pensait pas qu'il avait l'aspect d'un homme du Clan.
C'e˚t été faux. Elle était convaincue qu'il était un esprit mêlé. Ayla songea à la grand-mère de Brukeval, la femme qui s'était perdue. A son retour, elle avait raconté qu'elle avait été attaquée par des animaux, mais ces animaux ne pouvaient être que ceux qu'elle appelait Têtes Plates.
Comment aurait-elle survécu si longtemps si elle n'avait
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