Le clan de l'ours des cavernes
front bombé, si p‚le ; même ses yeux étaient trop clairs. Elle deviendrait une femme hideuse et aucun homme ne voudrait d'elle, se dit Mog-ur. La pensée de sa propre laideur lui traversa l'esprit, et il se rappela comment les femmes l'évitaient, surtout quand il était jeune. Peut-
être aura-t-elle besoin d'un totem puissant si elle ne doit jamais trouver d'homme pour veiller sur elle. Mais tout de même, un Lion des Cavernes ! Il essaya de se souvenir s'il y avait jamais eu une femme parmi le Peuple du Clan à avoir le grand félin pour totem.
J'oubliais qu'elle n'est pas des nôtres mais elle bénéficie d'une protection puissante, sinon elle n'aurait jamais survécu à ses épreuves.
Elle serait morte sous les crocs de ce lion. Cette pensée se cristallisa dans son esprit. Le Lion des Cavernes ! Il l'avait attaquée sans la tuer...
Voulait-il l'éprouver ? Une autre idée lui vint, et il frissonna. Le doute n'était plus permis. Brun lui-même ne pourrait faire la moindre objection.
Le lion des cavernes l'avait marquée à la cuisse gauche de quatre sillons parallèles dont elle porterait toute sa vie les cicatrices. Or les rites de l'‚ge adulte exigeaient que Mog-ur marque du signe de son totem le corps d'un homme jeune, et le signe du Lion des Cavernes était justement quatre entailles parallèles dans la cuisse.
Les garçons sont marqués sur la cuisse droite ; mais Ayla est une fille, et les marques sont bien les mêmes, songea-t-il. que n'y ai-je pensé
plus tôt ! Le lion, conscient de la difficulté qu'aurait le clan à .accepter une étrangère, l'a marquée du signe de son totem. Il désire qu'elle vive parmi nous, c'est pourquoi il l'a éloignée de son peuple. Mais pour quelle raison ? Le sorcier se sentit soudain mal à l'aise. S'il avait eu notion de ce concept, il y aurait vu un pressentiment. Dans l'état des choses, il éprouvait une vague appréhension mêlée d'un étrange espoir.
Mog-ur se ressaisit. Jamais un totem ne s'était imposé à son esprit d'une manière aussi impérieuse, et c'était cela précisément qui l'inquiétait. Le Lion des Cavernes est son totem. Il l'a choisie exactement comme Ursus m'a choisi. Mog-ur plongea son regard dans les sombres orbites du cr‚ne posé
devant lui. Avec une sincère humilité, il s'émerveilla de la façon dont les esprits parvenaient à se faire comprendre. Tout était clair, à présent. Un profond soulagement l'envahit en même temps que subsistait une question.
Pourquoi cette petite fille avait-elle besoin d'une protection aussi grande ?
Les branches feuillues se balançaient doucement sous la brise du soir, silhouettes dansantes se découpant sur le ciel assombri. Le camp silencieux se préparait pour la nuit. A la faible lueur des braises du foyer, Iza vérifiait le contenu de ses bourses de peau rangées en bon ordre sur sa couverture, tout en jetant des regards inquiets dans la direction o˘ elle avait vu disparaître Creb. Elle n'aimait pas le savoir seul, dans des bois inconnus, sans armes pour se défendre. La fillette dormait déjà et, à
mesure que la nuit tombait, l'inquiétude de la guérisseuse grandissait.
quelques instants plus tôt, elle était allée se rendre compte de la variété
des plantes qui poussaient aux alentours de la caverne, désireuse de réapprovisionner et d'étendre sa pharmacopée. Elle ne se séparait jamais de son sac en loutre o˘ elle serrait des feuilles séchées, des fleurs, des racines, des graines et des écorces, mais c'était là sa trousse d'urgence.
Dans la nouvelle grotte, elle disposerait de tout l'espace voulu pour stocker et conserver toutes les plantes médicinales dont elle pourrait faire moisson.
Iza vit enfin arriver en claudiquant le vieux sorcier et, soulagée, elle s'empressa de mettre à chauffer son repas et de faire bouillir de l'eau pour son infusion favorite. Il s'approcha, silhouette vo˚tée par la fatigue, et s'assit à ses côtés pendant qu'elle rangeait ses bourses dans le sac en peau de loutre.
- Comment va l'enfant ce soir ? lui demanda-t-il par gestes.
- Mieux. Elle n'a presque plus mal. Elle t'a réclamé, répondit Iza.
- Tu lui feras une amulette demain matin, Iza.
La femme baissa la tête en signe d'acquiescement puis, incapable de rester en place tant sa joie était grande, elle se précipita pour surveiller le repas. Ayla allait rester parmi eux. Creb a parlé à son totem, se ditelle, le coeur battant. Les mères de deux autres enfants
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