Le clan de l'ours des cavernes
en supporter. Il s'en alla d'un pas rageur à la limite du foyer pour y bouder tout à son aise. Ce fut alors qu'il croisa le regard d'Ayla qui ne l'avait pas quitté des yeux. que cette sale petite indiscrète e˚t été témoin de la réprimande le plongea dans une fureur noire. Ses déboires de la journée lui revinrent en mémoire et, outrepassant délibérément les conventions, Broud jeta par-dessus la frontière des foyers un regard haineux à la fillette qu'il détestait.
Creb avait perçu la légère friction survenue entre Brun et son fils car rien ne lui échappait de ce qui survenait dans la caverne. La plupart du temps, tel un bruit de fond, ces menus incidents ne retenaient pas sa curiosité, mais tout ce qui touchait à Ayla éveillait son attention. Il savait qu'il avait fallu à Broud un effort délibéré et lourd de mauvaise intention pour oser transgresser les règles et regarder chez son voisin.
Creb le voyait bien, Broud éprouvait à l'égard de la fillette bien trop de haine. Il était grand temps, pour son bien, d'apprendre à Ayla les bonnes manières.
- Ayla ! appela-t-il sèchement, tandis que la petite fille sursautait à
l'‚preté inaccoutumée de sa voix. Ne regarde pas chez les autres, lui fitil comprendre par gestes.
- Pourquoi ? répondit-elle, interloquée.
- Il est interdit de regarder chez les autres. Si tu les regardes comme tu le fais, ils ne sont pas contents, expliqua-t-il, sachant que Broud les observait du coin de l'oeil, sans chercher à dissimuler le plaisir malin qu'il prenait à voir la fillette ainsi reprimandée par Mog-ur.
- Mais c'est pour apprendre à parler, mima Ayla, surprise et peinée. Creb savait qu'eLle était sincère et que seul son désir d'en savoir plus l'animait, mais elle devait également apprendre à bien se tenir. Et puis peut-être cela détournerait-il d'elle le ressentiment de Broud, à la voir grondée pour son indiscrétion.
- Il est défendu de regarder dans le foyer du voisin, lui signifia Creb sévèrement. C'est mal, et c'est mal aussi de répondre quand un homme parle.
Très mal. C'est compris ?
En la traitant ainsi, Creb avait l'intention de se faire comprendre une bonne fois pour toutes sur ce sujet. Il vit Broud se lever et regagner sa place près du feu, manifestement de meilleure humeur.
Ayla était effondrée. Jamais Creb n'avait fait preuve de dureté envers elle. Elle le croyait content de son application à apprendre leur langage, et voilà qu'il lui interdisait de regarder les autres pour en apprendre davantage. Décontenancée, blessée, les larmes lui vinrent aux yeux et coulèrent doucement le long de ses joues.
- Iza, appela Creb, soudain inquiet. Viens vite ! Ayla a quelque chose aux yeux.
Les membres du clan ne pleuraient que lorsqu'ils avaient une poussière dans l'oeil ou s'ils avaient pris froid. Mais ils n'avaient jamais vu des yeux se remplir de larmes de chagrin. Iza arriva à la h‚te.
- Regarde ! Ses yeux coulent ; il y a s˚rement une escarbille dedans, regarde bien, insista-t-il.
Iza aussi était inquiète ; elle souleva délicatement les paupières et examina attentivement les yeux de la fillette.
- Tu as mal ? demanda-t-elle, ne relevant nulle trace d'inflammation ou de poussière.
- Non, je n'ai pas mal, répondit l'enfant en reniflant.
Elle ne comprenait pas ce qui les préoccupait tant, mais elle était heureuse que l'on prît soin d'elle, malgré la colère de Creb.
- Pourquoi Creb est-il méchant ? demanda-t-elle entre deux sanglots.
- Tu dois apprendre les bonnes manières, expliqua Iza, l'air sévère. Il n'est pas poli de regarder chez les autres pour voir ce qu'ils disent. Tu dois apprendre : quand l'homme parle, la femme baisse la tête, comme cela, lui montra Iza. Seuls les bébés peuvent regarder, mais toi, tu es une grande fille, Ayla.
- Creb n'est pas content ? Creb ne s'occupera plus de moi ? demanda Ayla en fondant en larmes de plus belle.
- Mais non, Creb continuera à prendre soin de toi. Et moi aussi, lui répondit-elle, sentant le désarroi profond de la petite fille. Creb cherche seulement à t'apprendre les coutumes du clan, ajouta-t-elle en la prenant dans ses bras.
Elle serra un long moment contre elle la fillette qui donnait libre cours à
son chagrin, puis elle lui lava les yeux avec un peu d'eau douce et s'assura qu'ils n'étaient pas infectés.
- qu'a-t-elle aux yeux ? s'enquit Creb. Elle est malade ?
- Elle pensait que tu ne l'aimais plus, que tu étais
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