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Le Code d'Esther

Le Code d'Esther

Titel: Le Code d'Esther Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Benyamin , Yohan Perez
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état d’esprit.
    « Je veux dire deux questions… Je peux vous les poser ? »
    Axel assure la traduction.
    « Il s’est produit des événements… pas banals à Landsberg, surtout au cours des deux dernières années de la guerre. Comment expliquez-vous cela ?
    — Ce qui s’est passé avant n’était pas banal non plus ! Si vous voulez me faire dire que les camps étaient aux portes de la ville et que personne n’a protesté, alors je vous le dis tout net : nous n’avions pas le choix. Il valait mieux baisser les yeux en passant à proximité des camps et garder le silence. C’était une question de vie ou de mort pour la population de Landsberg.
    — Et vous, en tant qu’historienne, que pensez-vous de… cette tragédie ?
    — Moi ? C’est mon travail ! Je suis employée par les archives de la ville. Point ! »
    Je baisse les bras. Nous n’en saurons pas plus. Elle est dans son rôle de parfaite fonctionnaire – et je pense à un ami qui me disait que la Shoah n’aurait pu avoir lieu sans la bureaucratie allemande de l’époque.
    Une nouvelle fois, Axel relève le gant. Il a compris, mieux que moi, que nous devions poser des questions, lui demander des informations : l’extrême conscience professionnelle de cette femme lui interdirait de ne pas nous répondre.
    « Nous voulons visiter les camps ! lui lance-t-il.
    — Ah, mais vous avez besoin d’une autorisation.
    — Eh bien, vous allez nous donner cette autorisation !
    — Elle ne dépend pas de moi. C’est une organisation qui s’en occupe.
    — Laquelle ?
    — Attendez un instant. Je vous la trouve tout de suite, dit-elle en consultant son ordinateur. La voici ! »
    L’imprimante crache une feuille qu’elle nous tend avec fierté.
    « Oui, reprend Axel, plongé dans la lecture du document, mais il n’y a pas de numéro de téléphone ! Comment voulez-vous que nous contactions ces gens ?
    — Une seconde, je vais vous le donner… Je l’ai !
    — Parfait ! J’utilise votre téléphone pour les appeler. »
    Axel ne lui laisse pas le choix. Il se saisit du combiné et tape le numéro dans la foulée. Elke ne bouge pas pendant les trois minutes que dure la conversation.
    « Nous avons rendez-vous dans une demi-heure, annonce Axel avant de se tourner vers l’historienne. Pardon de vous quitter si rapidement, mais nous sommes un peu pressés. Merci encore pour votre aide si précieuse ! »
    Elke ne se lève pas pour nous raccompagner, les yeux rivés à son écran d’ordinateur.
     
     
    La pluie a redoublé d’intensité. Les essuie-glaces de notre voiture peinent à dissiper ce rideau d’eau qui se déverse sur la campagne bavaroise. Nous cherchons désespérément une pancarte indiquant l’entrée du camp à la lisière de la forêt. Il nous faudra six passages consécutifs devant l’endroit supposé du rendez-vous pour la découvrir. Elle est minuscule, à peine 30 centimètres de côté, avec une inscription en allemand d’où se détache une étoile de David. Le message est clair : pas question d’entacher la vocation touristique de la Route romantique par la réminiscence d’un passé honteux. De fait, le véritable repère se trouve de l’autre côté de la départementale : un calvaire de fabrication récente, donc postérieure au camp, encadré par deux bouleaux, qui attire l’œil du voyageur en le détournant du panneau maudit.
    Protégés par un parapluie vert fluo, seule note de couleur dans ce paysage gris liquide, nous décidons de faire quelques pas malgré la boue qui colle à nos chaussures. Nous avons un bon quart d’heure d’avance. Devant nous s’étend un vaste terrain long d’une centaine de mètres sur environ 30 mètres de largeur. Çà et là, quelques blocs de pierre polie sont disposés sur l’herbe, tels des monolithes de granit montant la garde devant l’entrée du camp. Celui-ci n’est pas visible de l’endroit où nous nous trouvons, la forêt dense interdisant au regard de se porter au-delà du pré. Le sentiment que tout a été fait pour dissimuler ce lieu de mémoire est de plus en plus insistant. Il faut scruter, chercher, fouiller pour trouver, ou alors, comme dans la série produite par Spielberg et Hanks, tomber dessus par hasard.
    En ces derniers jours d’avril 1945, la 101 e  aéroportée américaine a investi Landsberg. Composée de la 506 e  Easy Company, de la 10 e  division armée Tiger et de la 4 e  division,

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