Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
Vom Netzwerk:
Morgennes.
    — Tais-toi, l’interrompit Alexis de Beaujeu. Si c’est
pour me remercier, trouve plutôt la Vraie Croix, que nous puissions l’envoyer à
Sa Sainteté ainsi qu’elle l’a demandé.
    — Je la trouverai.
    — Je sais que je peux compter sur toi, Morgennes. Tu as
toujours été un être à part : avec nous, et pourtant à côté de nous. Même
dans la prière, il me semblait que tu étais ailleurs.
    — C’est cependant ce qu’on commande.
    — On nous commande aussi de prier ensemble, et non
d’être seulement tournés vers Dieu…
    Il y avait comme un reproche dans les paroles d’Alexis de
Beaujeu, et pourtant son visage n’exprimait rien de tel.
    — Il est si dur de parler avec toi, Morgennes, continua
Beaujeu. Tu donnes si souvent l’impression d’être seul, comme si tu n’étais pas
de ce monde.
    — C’est ma nature, dit Morgennes. Il faut s’y faire.
    — Depuis ta captivité, je ne parle pas de la dernière,
mais de celle qui conclut ta quête des larmes d’Allah, je sais que tu as en
partie perdu la mémoire. L’as-tu recouvrée, maintenant ?
    — Comment le saurai-je ? S’il y a quelqu’un
d’incapable de répondre à ta question, c’est bien moi. Mais il est vrai que
j’ai souvent le sentiment de ne plus m’appartenir.
    — On n’appartient qu’à Dieu, dit Beaujeu. Surtout quand
on s’est donné, comme toi, à l’un de ses ordres. Mais revenons à Hattin. Le
chapitre a prononcé sa sentence : tu as reçu ta charte de congé, il n’y a
donc plus à te juger. Pourtant, ce qu’a dit Tripoli était juste : ton
attitude n’était pas exempte de courage.
    — Tout comme celle des frères qui ont refusé d’abjurer.
    — Ce sont deux courages de nature différente.
    — Courage ou lâcheté, de toute façon, je m’affligerai
quand j’aurai retrouvé la Vraie Croix.
    Alexis de Beaujeu n’insista pas. Il aurait voulu parler à
Morgennes, mais ce dernier semblait au-delà des mots. Les paroles ne
l’atteignaient pas, seuls les actes avaient un sens pour lui. Non que les mots
fussent sans importance, mais ils entraient dans une partie de son entendement
où lui-même semblait ne pas se situer. Beaujeu était triste. Il avait cherché à
provoquer une étincelle chez son ami, à susciter une interrogation, un doute.
Il n’y était pas arrivé.
    D’ailleurs, pourquoi se souciait-il autant des états d’âme
de Morgennes ?
    « Oublions ça », se dit Beaujeu, passons à autre
chose.
    Il ouvrit la petite porte de la fabrique à l’aide de clés
qu’il portait dans son aumônière. Comme il faisait sombre, il prit dans une
niche une torche, et l’alluma à l’aide de la pierre à feu qui s’y trouvait.
L’air sentait le suif, le métal et la guerre. Les armes, rangées dans des
râteliers alignés sur les côtés et au centre de la fabrique, retenaient leur
souffle, avides d’être tirées du fourreau et de pourfendre l’adversaire. L’air
même était fait de cette tension, et Morgennes eut de nouveau l’impression que
c’étaient les armes qui avaient créé les hommes, et non l’inverse.
    Il emboîta le pas à Alexis de Beaujeu, qui descendait un
escalier menant au sous-sol de l’armurerie, et eut la très nette sensation que
manches de lances et poignées d’épées ne demandaient qu’à être saisies, afin de
fendre, transpercer, crever, trancher, couper, tuer. Il entendait leurs cris
silencieux, ressentait leur impatience alors que tant d’ennemis demandaient à
mourir, là, dehors ; et quand il n’y aurait plus d’ennemis, il y aurait
toujours les amis, la famille, soi-même.
    Les magasins du sous-sol étaient l’endroit où l’on rangeait
les boucliers et les armures. Ces dernières étaient placées dans des caisses
emplies de paille, ou posées sur des mannequins quand il fallait les assembler
ou les réparer.
    Beaujeu ouvrit une caisse de bois noir qui ressemblait à un
cercueil. Elle contenait une armure, également noire, en parfait état. Après en
avoir caressé les anneaux pour éprouver leur souplesse et leur solidité, il dit
à Morgennes :
    — C’est un haubert d’un genre nouveau. Ses mailles sont
si serrées que les flèches ne peuvent le traverser… On a cousu à l’intérieur
une sorte de jaquette de drap doublée de coton fortement piqué. C’est plus
léger qu’un gambeson, et beaucoup plus solide. Avec, tu seras en sécurité.
    — Et toi ? s’inquiéta Morgennes.
    — Ne te fais pas de

Weitere Kostenlose Bücher