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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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a plus personne, beau doux maître… De toute
façon, ajouta-t-il, de la tristesse dans les yeux, nous n’aurions pu tenir
longtemps…
    — Je suis venu vous délivrer ! s’exclama Ridefort.
    Le commandeur lui jeta un regard étrange, puis se dirigea
vers ses hommes, plus bas sur la route, au pied d’al-Fûla. Il croisa en
descendant les soldats du Yazak, qui montaient vers La Fève, où Ridefort,
Tughril et Taqi venaient d’entrer.
    Le gros des troupes du Yazak avait à peine franchi la
barbacane que les herses s’abattirent avec un bruit d’enfer. Celle du château
écrasa dans sa chute un cavalier et sa monture. L’homme et la bête embrochés se
débattirent avec une telle énergie, poussèrent des cris si effrayants, qu’on
leur souhaita de mourir rapidement. Leurs mouvements désordonnés ne faisaient
qu’ajouter à leur supplice. Enfin, après un dernier spasme, ils cessèrent de
bouger.
    Dans la cour du château, Terrible se cabra et Taqi sortit
Crucifère du fourreau. L’épée luisait d’une froide lumière bleue. Ridefort
s’étant précipité vers les Templiers, la Sainte Croix était aux mains de
l’ennemi. Tughril, lui, s’efforçait de relever la herse.
    Les hommes du Yazak se trouvaient pris entre deux feux. Ceux
qui étaient coincés entre la herse de la barbacane et celle du château étaient
harcelés d’une telle pluie de flèches que le ciel en paraissait solide. Ils
s’abritèrent sous leur bouclier, mais leurs montures s’effondrèrent –
certains en profitant pour s’y mettre à couvert. D’autres rasèrent les murs, se
déplaçant derrière leur écu, et se dirigèrent vers la herse du château afin de
joindre leurs efforts à ceux – colossaux et désespérés – de Tughril.
    À l’extérieur de la barbacane, la situation n’était pas
meilleure.
    Les chevaliers du Temple qui avaient remis leurs armes aux
hommes du Yazak en avaient récupéré de nouvelles dans des caches aménagées
depuis plusieurs jours au pied d’al-Fûla : lances, piques, épées, masses
et arcs par dizaines, flèches par centaines, boucliers et gambesons de cuir, au
cas où on leur aurait retiré leur armure. Ce que les Sarrasins n’avaient pas
fait. Ainsi, la poignée d’hommes de Taqi qui n’avaient pu passer de l’autre
côté de la barbacane se trouva prise à revers par une puissante charge de
cavalerie et une grêle de flèches, qui en clouèrent plusieurs sur place.
Ensuite, les fantassins vinrent finir le travail à la masse, à la pique, à
l’épée, frappant d’autant plus vigoureusement que tous avaient perdu, qui un
frère, qui un ami, au cours de la bataille de Hattin.
    Cependant, les soldats du Yazak ne perdirent pas courage.
Cette unité d’élite avait pour habitude de vivre isolée et d’agir sans la
protection des troupes de Saladin. Aussi comptait-elle avant tout sur
elle-même. Toujours armés et aux aguets, ses hommes s’en remettaient à leur
courage et à leur force ; car leur force était une de leurs qualités
majeures, et leur bravoure une seconde nature.
    Ils cherchèrent à se regrouper autour de leur chef, dont ils
apercevaient l’épée, derrière la grille du château. Il paraissait, en outre,
que les efforts conjugués de Tughril et de quelques Sarrasins finiraient par
payer, puisque la grille se souleva d’une hauteur de plusieurs mains, permettant
à un premier soldat du Yazak de se glisser du côté de Taqi.
    Cassiopée et Morgennes arrivèrent au moment même où Renaud
de Châtillon, Wash el-Rafid et des Maraykhât sortaient de la salle principale
pour en découdre avec les hommes du Yazak.
    Alors que Kunar Sell faisait des ravages en abattant sa
grande hache danoise, Wash el-Rafid ajusta Taqi et pressa la détente de son
arbalète. Un sifflement déchira l’air, suivi d’un vol plané de lumière :
atteint au bras, Taqi avait lâché Crucifère. L’épée, en s’envolant, avait perdu
de son éclat, mais avait brillé suffisamment longtemps pour attirer le regard
de Morgennes.
    — Par ici ! cria-t-il à Cassiopée, en montrant
Crucifère.
    — Par là ! répondit-elle en indiquant Taqi, qui
pâlissait anormalement vite.
    — Le poison des Maraykhât ! s’exclama Morgennes.
Il n’y a pas un instant à perdre !
    Profitant de la mêlée, du fait que leur tenue les déguisait
aux yeux des Templiers, ils se précipitèrent vers Taqi, qui s’affaissa sur sa
selle et tomba lourdement à terre. Cassiopée se pencha sur son

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