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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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avança Taqi.
Peut-être qu’un fragment de la Vraie Croix pourrait les persuader…
    Morgennes porta son regard vers le Saint Bois, que Simon
veillait toujours, à demi évanoui, et s’absorba dans la contemplation de cette
relique après laquelle il avait tant couru. Ainsi déshabillée, sans son habit
d’or et de perles, elle lui sembla plus belle, plus humaine. Une voix, celle de
Cassiopée, s’éleva :
    — Morgennes, c’est aujourd’hui le jour de l’Exaltation
de la Croix. Ne penses-tu pas qu’il faille y voir un signe ? Que Dieu
t’accorde enfin d’être guéri ?
    — Je l’espère, répondit Morgennes.
    Sur ce, ils s’endormirent, sauf Morgennes, qui planta son
épée dans le sol, non loin de la Vraie Croix, et passa la nuit à prier, comme
jadis, quand il était gardien du Saint Bois. Le lendemain matin, pourtant, il
s’agenouilla de nouveau à côté de Taqi pour la prière de l’aube.
    Comme ils se relevaient, ils eurent la surprise de voir au
loin la terre onduler. Le vent soufflait très fort, chassant dans leur
direction de puissants tourbillons de sable, qui s’envolaient vers le ciel en
longs étendards de couleur blonde, se déchiraient puis montaient encore, happés
par le haut. Taqi, Cassiopée et Morgennes regardaient, fascinés, ce spectacle,
incapables d’en détacher leur regard. Simon dit alors :
    — La terre tremble…
    Ils se tournèrent vers lui et s’aperçurent qu’au cours de la
nuit sa blessure s’était un peu refermée. Il allait déjà mieux.
    — Grâce à mes remèdes, dit Cassiopée.
    — Grâce à la nuit, affirma Taqi.
    — Grâce à la Vraie Croix, rétorqua Simon.
    — Il n’est pas encore guéri, fit remarquer Morgennes.
    — Mon oncle est arrivé ! s’exclama Taqi.
    D’une main, il désigna une colonne de sable : celle-ci se
déchira, s’ouvrit à la manière d’un portique et laissa passer, d’abord les
fantassins, puis la cavalerie, et enfin toute l’avant-garde de l’armée de
Saladin.
    La terre tremblait sous leurs pas démultipliés. Des cris,
des hennissements, des brames de chameaux, des cliquetis d’armures se
répondaient, ajoutant à la discordance des battements de tambours et des
sonneries de buccin qui scandaient la marche des soldats. En fin de matinée,
l’armée de Saladin avait empli la plaine comme le Nil sa vallée.

 
20.
    « Vermine et croûtes
terreuses couvrent ma chair, ma peau gerce et suppure. »
    (Job, VII, 5.)
     
    — Voici ta tête, dit Saladin à Morgennes, qui venait
d’entrer sous sa tente.
    Morgennes regarda le crâne, dont l’orbite droite portait
encore la trace d’un coup de cimeterre, et le sultan poursuivit :
    — C’est la tête de l’homme que les troupes du cadi Ibn
Abi Asroun ont décapité par erreur à Damas. Elle ne te ressemble guère,
n’est-ce pas ? Je l’ai cependant conservée, car il m’amusait de l’avoir,
en attendant de la remplacer par la vraie…
    Le crâne reprit sa place dans la céphalotèque de Saladin,
aux côtés d’autres têtes, inconnues de Morgennes – hormis celle de Raymond
de Castiglione, qui le fixait de ses yeux vitreux.
    — Sohrawardi m’aide à les entretenir. Il connaît l’art
qui permet d’empêcher les chairs de se décomposer et les formules pour leur
redonner vie. De temps à autre, je devise avec l’une ou l’autre. Veux-tu
essayer ? Saluer ton ancien maître, peut-être ?
    — Non merci, dit Morgennes, avant d’ajouter :
Comment se fait-il que vous n’ayez pas celle de Châtillon ?
    — La peste soit sur lui ! s’emporta Saladin. Ce
fils de truie a réussi à s’échapper, je ne sais comment. Sans doute des
traîtres gagnés à sa cause ont-ils attendu la nuit pour égorger mes gardes et
s’emparer de lui. Le lendemain de son supplice, au petit matin, il y avait bien
un corps sur sa croix, mais ce n’était pas le sien. De loin, pourtant,
l’illusion était parfaite : les traces de coups, les morsures, les
chaînes, tout y était. Je ne m’explique pas ce qui a pu se passer. Enfin, ibn
Abi Asroun enquête là-dessus aussi.
    — C’est peut-être lui qu’il faudrait interroger, fit
remarquer Morgennes.
    — J’y pense, dit Saladin. Mais chaque chose en son
temps. Pour l’instant, l’heure est à la conquête, au jihad ! Dans quelques
jours, tout sera fini. Il sera bien temps alors de s’occuper des traîtres et de
les démasquer.
    — Que sont devenus ceux qui m’avaient aidé à
fuir ? Guillaume

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