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Le combat des Reines

Le combat des Reines

Titel: Le combat des Reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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qu'il,
ou elle, ne tenait pas à donner l'impression que Chapeleys détenait quelque
chose de très précieux à vendre. Je suis certaine que, quel que soit le
document contenu dans ce sac de la chancellerie, on s'en est emparé, on l'a lu,
puis on l'a détruit.
    Je regardai, à
l'autre bout de la pièce, un écu frappé aux couleurs du Norfolk — bleu
vif et blanc — qu'on avait installé entre deux des fenêtres
lancéolées.
    — Comment,
murmurai-je, Langton a-t-il pu agir aussi vite ? Ah, bah !
    Je me retournai
et m'approchai de Demontaigu.
    — Vous
désiriez me voir ?
    — Pour vous
présenter mes excuses, précisa Bertrand avec un clin d'œil. Ce matin au quai de
la Tour... Je n'aurais pas dû vous laisser seule.
    — Vous
m'avez dit être navré, rappelai-je en battant des cils, d'avoir abandonné une
damoiselle en détresse.
    Je plaisantai et
coquetai en tentant d'effacer de ma mémoire l'affreux visage de La Maru, la
dague, son contact répugnant, le sang qui sortait en bouillonnant de sa bouche.
    — Un preux
visage cache un cœur inquiet, railla en retour Demontaigu.
    — Un preux
visage cache un cœur dur, rétorquai-je. Vous êtes un soldat, je suis une sorte
de médecin.
    — Une sorte ?
Je levai la main.
    — Non. Je
sais ce que je suis. Dieu m'en soit témoin, Bertrand, parfois on arrive à un
pont et il ne reste plus qu'à le franchir. Ce matin, La Maru était bien décidé
à me tuer. Quelle que soit l'heure, quel que soit le lieu, nous nous serions
rencontrés seul à seule. L'issue en était la mort, la sienne, la mienne, ou les
deux.
    — Je vous
ai apporté un cadeau, un c onsolamentum  !
    Bertrand sortit
de sous son justaucorps un psautier relié en veau, à la couverture sertie de
pierres précieuses qui formaient une croix celtique et un chapelet. Les pages,
du plus fin parchemin, étaient dorées sur tranches. L'écriture, en lettres
noires et nettes, était élégante. C'était une compilation de prières, de
poèmes, de chants et de psaumes. La première lettre de chaque strophe s'ornait
d'une miniature enjolivée de pierreries représentant les créatures étrangères
des légendes celtiques. Je parcourus des yeux les vers au début du Pectoral
de saint Patrick , le premier poème : « Aujourd'hui en me levant,
la force de Dieu m'accompagne. » Je poursuivis ma lecture pour cacher à
quel point ce présent me touchait.
    — En guise
de réparation, souffla Bertrand.
    — J'aimerais
que ce fût de l'adoration ! rétorquai-je d'un ton badin. Il est splendide.
    Je l'embrassai
sur la joue en serrant contre moi ce volume, à présent déchiré et usé, comme je
le fais chaque soir en me couchant. Je le tiens et ferme les yeux. En esprit,
je retourne au manoir de Bourgogne. Demontaigu est près de moi. Son visage, sa
chaleur...
    Je le revois
avec netteté, lumière réconfortante dans les ténèbres mortelles qui montaient
autour de nous. À l'époque, je fus gênée et voulus lui rendre le livre.
    — C'est mon
cadeau, insista Demontaigu. C'est le dernier réalisé par le scriptorium de mon
ordre.
    J'avais projeté
d'aller m'occuper des simples que j'avais commencé à cultiver dans les jardins
du palais et j'allais proposer à Bertrand de m'accompagner quand un page
surgit, hors d'haleine, pour m'apprendre que la reine douairière me voulait
voir. Demontaigu leva les yeux au ciel. Je l'embrassai derechef sur la joue et,
glissant le psautier sous ma mante, je suivis le messager. La reine douairière,
comme d'habitude, jouait les nonnes dévotes. Assise près du lit de Guido, elle l'abreuvait
de vin coupé d'eau. Agnès, l'air tendu et las, était à leur côté. Elle évita
mon regard et alla s'occuper des enfants de la reine, Edmund de Woodstock et
Thomas de Brotherton. Les enfançons semblaient épuisés par leurs jeux et, à
moitié endormis, reposaient sur des coussins. Je saluai Guido qui paraissait
plus fort et dont le visage avait recouvré toutes ses couleurs. Il manifesta
son impatience de reprendre sa tâche bien que sa maîtresse s'y refusât,
prétendant que quelques jours de repos supplémentaires lui feraient du bien.
Elle tapota sa guimpe et demanda à quoi était dû tout ce vacarme. Avait-on
progressé ? Je décidai de lui dire la vérité, du moins en partie. Je lui
annonçai donc que le roi voulait tirer au clair certaines rumeurs affirmant qu'un
grand trésor gisait sous l'église du Nouveau Temple, près de l'une des effigies
de Pembroke.

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