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Le combat des Reines

Le combat des Reines

Titel: Le combat des Reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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guise. Un homme avait déjà péri. L'attente ne
fut pas longue. Un groupe de baillis de la cité, arborant la livrée bleu et
moutarde de l'échevinage, prit le bâtiment d'assaut. Quand nous passâmes devant
le grand calvaire de l'église, dans le cimetière, on était en train de pendre
les deux malandrins sans autre forme de procès aux poutres du porche. Ils
suffoquaient et se débattaient encore contre la corde.
    Nous arrivâmes
enfin dans l'artère commerçante de Cheapside avec sa grande canalisation d'eau,
la Tun, qui, pourvue d'immenses cages installées sur le toit, servait, et sert
toujours, de prison. Ce jour-là, une bande de catins vociférantes et leurs
lanterniers, pris à racoler au-delà de Cock Lane, étaient poussés de force dans
les geôles où ils passeraient la fin de la journée. Au-dessous, au pilori, des
contrôleurs et des dizainiers mettaient aux ceps plusieurs maîtres brasseurs
qui avaient vendu leur bière dans des mesures tronquées par un épais revêtement
de poix au fond du pichet. Un officier s'affairait à proclamer leurs crimes et
invitait les passants à vider des seaux débordants de pissat de cheval sur la
tête des coquins.
    Dans le reste de
cette vaste rue le négoce battait son plein, comme à l'ordinaire. On vendait de
tout, depuis des cruches d'argent jusqu'à de la cire verte, des connils du
Hampshire au tissu précieux venu d'au-delà des montagnes de Tartarie. Devant
les hautes demeures et les maisons cossues des négociants — plâtre
rose et blanc, colombages noirs et brillants, pignons enjolivés de dorures — se
dressaient les larges étals sous leurs bannes rayées ondoyantes. Je m'arrêtai
et regardai autour de moi, émerveillée. Sans tenir compte de l'air
interrogateur de Bertrand, je me retournai comme si j'étais fascinée par deux
jongleurs et un acrobate pratiquant leur art devant un cercle de gamins bouche
bée. Je scrutai en hâte la foule, en quête d'« Yeux Rapprochés »,
l'homme qui avait fait le trajet avec nous, mais je ne vis personne. Nous
remontâmes Milk Street vers St Andrew Jewry et empruntâmes une ruelle étranglée
dont les maisons faisaient saillie sur nos têtes. Le Secret de Salomon était installé juste au coin.
    La taverne se
dressait dans sa propre enceinte derrière un mur de grossières pierres grises.
L'entrée était gardée par une loge en bois ornementée, avec, à l'étage, une
chambre qui s'enorgueillissait d'une fenêtre à meneaux, ce qui donnait à
l'édifice l'air d'un riche manoir. Le vieux portier nous fit signe de pénétrer
dans une cour étendue et pavée, pas tout à fait plane. Des écuries en
occupaient trois côtés ; sur le quatrième, en face de nous, s'élevait la
somptueuse taverne. En pierre des Cotswolds couleur de miel, elle avait trois
étages, et une galerie de bois peinte en noir et blanc faisait le tour du dernier.
Le toit était couvert de tuiles rouges rutilantes et la façade arborait des
fenêtres à verre coloré, qui dominaient le large escalier menant à la
majestueuse porte d'entrée flanquée d'imposantes enseignes peintes montrant le
célèbre roi Salomon assis devant une table et méditant sur quelque mystère.
Cette hostellerie existe encore de nos jours. Elle n'est peut-être pas aussi
belle qu'elle l'était jadis, mais quiconque a vécu après l'histoire que je
narre vous parlera du grand mystère du printemps 1308. À l'intérieur, la vaste
pièce au plafond à poutres apparentes était aussi spacieuse que la salle de
garde d'un manoir seigneurial. Des cheminées béantes, chacune avec son conduit
et sa souche, s'inséraient dans les murs latéraux. Les lames sombres et polies
du parquet étaient couvertes d'herbes écrasées ; c'était bien autre chose
que la jonchée malodorante et humide des répugnantes échoppes à bière. On avait
dressé des tables dans l'embrasure des fenêtres qui ouvraient sur les jardins
de simples et de fleurs, et le centre de la pièce était meublé par la table
d'hôte longue d'au moins quinze pieds. L'endroit était accueillant. Les murs
chaulés étaient ornés de tableaux sommaires mais expressifs peints sur de la
toile tendue sur des cadres de bois. Tous représentaient des scènes de la vie
de Salomon. D'autres placards donnaient les prix :
    Filet de bœuf          5
pence
    Jambon                    1
shilling
    Lapin                        4
pence
    4 alouettes              

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