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Le cri de l'oie blanche

Le cri de l'oie blanche

Titel: Le cri de l'oie blanche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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guenilles récupérées. Elle attendait les caisses de
médicaments commandées le lendemain de l’incendie.
    « Attendez donc à demain pour faire ça,
garde. Vous devriez d’abord prendre un bon bain pour qu’on vous reconnaisse pis
ensuite envoyer votre télégramme.
    – Non. Le plus tôt, c’est le
mieux. »
    Elle avait écrit la liste de ce qu’il lui
fallait, revoyant mentalement chacun des tiroirs de son dispensaire. Cet
exercice terminé, elle s’était assoupie, toujours aussi noire de suie, toujours aussi perdue dans ce malheur qui, elle le
craignait, avait éteint sa passion.
    Depuis une semaine, Blanche vivait de la
charité de tous. Quelque chose en elle l’élançait de façon aiguë. Quelque
chose, elle le savait, qui ressemblait à la douleur qu’elle avait connue au couvent et qu’elle s’était promis
d’oublier pour toujours.
    Elle se leva, heureuse de constater que le
dimanche se pointait à sa fenêtre. Elle n’aurait pas de visiteurs. Elle se
lava, dessina ses sourcils et enfila une robe de laine. Depuis le feu et le
froid qui l’avait précédé, elle ne parvenait pas à se réchauffer. Elle
descendit à la cuisine puis, se rappelant qu’elle devait communier, se dirigea
vers le salon du curé pour attendre la messe. Le curé mettait la dernière main
à son sermon. Elle se tut pour ne pas le déranger. On frappa à la porte et elle
fit signe au curé de ne pas bouger ; elle répondrait.
    – Bonjour, Jeanne d’Arc !
    Clovis se tenait devant elle, les bras chargés
de boîtes, deux énormes valises à ses pieds. Sans lui laisser le temps de
répondre, il entra.
    – C’est pas parce que l’Église décide de
canoniser une nouvelle sainte qu’il faut l’imiter. Tu faisais déjà un mélange
de Thérèse d’Avila, de François d’Assise pis de saint Christophe. C’était
vraiment pas la peine de pousser tes efforts au point de vouloir ressembler à
Jeanne d’Arc ! Je sais que c’est bien de vivre comme les saints, mais le
seul auquel tu ressembles, c’est Jude. Celui des causes désespérées. Pis moi,
ça fait trois jours que je prie saint Antoine pour qu’il m’aide à trouver tout
ce qu’il faut.
    Il déposa ses boîtes sur une table et
ressortit chercher les deux valises. Blanche le suivit des yeux sans dire un
mot. Il rentra, ferma la porte d’un coup de talon et feignit un épuisement
total.
    – Depuis Montréal que je traîne tout ça.
C’est tellement pesant que j’aurais pas détesté être changé en âne pour un jour
ou deux. Mais ça, c’est réservé aux femmes curieuses. Non, les femmes curieuses
sont changées en statues. Attends une minute. Io a été changée en génisse.
C’est ça. Pour éviter à la femme légitime de son mari de la reconnaître. Trop
compliqué pour un dimanche matin. À quelle heure, la messe ?
    Clovis se tut et regarda Blanche, qui était
partagée entre les rires et les pleurs. Il ouvrit les bras et elle vint s’y
réfugier.
    – Je suis venu aussitôt que j’ai pu. Je
savais pas si tu voulais me voir, ça fait que j’ai décidé de prendre une
chance. J’espère que je te dérange pas trop ?
    Elle fit non de la tête et accepta le mouchoir
qu’il lui tendait. Le curé passa à côté d’eux et s’excusa.
    – Je pense que je peux vous dispenser de
la messe. Allez donc manger.
    Clovis obligea Blanche, pendant que l’eau du
café chauffait, à ouvrir les boîtes qu’il avait apportées. Elle découvrit en
riant du dentifrice et deux brosses à dents.
    – C’est pour quand j’vas venir. J’aurai
pas à m’inquiéter si j’oublie la mienne.
    Elle déplia des serviettes, des draps et des
linges à vaisselle.
    – J’en ai apporté quatre. Comme ça, je
suis sûr de pas en manquer quand on va laver la vaisselle.
    Elle ouvrit une bouteille de parfum.
    – Je savais pas quelle sorte tu aimais,
ça fait que j’ai demandé à la vendeuse de me trouver un parfum qui sentirait
tellement bon que les moustiques oseraient pas s’approcher parce qu’ils
penseraient que ce qu’ils voient, c’est une grosse fleur.
    Elle découvrit deux jeux de cartes.
    – Je trouvais que ton poker laissait à
désirer. Ça fait que j’ai pris un jeu pour jouer en ta compagnie pis un autre
pour que tu te pratiques en cachette quand tu attends pour un accouchement.
    Elle enleva le papier de soie qui protégeait
une figurine de porcelaine représentant un chiot.
    – Ça ressemble pas autant que j’aurais
voulu à ta

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