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Le cri de l'oie blanche

Le cri de l'oie blanche

Titel: Le cri de l'oie blanche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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robe.
Le velours bleu marine lui allait bien. La coupe était extraordinaire, la
confection impeccable. Sa mère tournait autour d’elle comme une abeille.
    – C’est donc dommage d’avoir de la pluie
un 17 décembre !
    – Ça fait différent.
    – Depuis hier, ça arrête pas de tomber.
Ça aurait été tellement plus beau si on avait eu de la neige. Ton manteau
aurait été tout blanc.
    Blanche regarda sa mère et lui sourit. Émilie
était plus excitée qu’elle.
    – Eh, Seigneur ! C’est pas une bonne
idée de se marier en hiver. On sait jamais quel temps il va faire.
    – Moman, il aurait pu pleuvoir en
septembre aussi.
    – Je sais, je sais. Mais c’est dommage
quand même.
    – Est-ce que Clovis a téléphoné ?
    – Oui. La première fois pour dire
bonjour. La deuxième fois pour me demander où acheter des parapluies, pis la
troisième fois pour me dire qu’il avait réservé tous les taxis du coin.
    – Combien est-ce qu’on va être,
finalement ?
    – Une quarantaine. Avec tous les amis de
Clovis qui sont descendus de Montréal, on va être assez nombreux.
    Blanche avait posé cette question des dizaines
de fois et, chaque fois, sa mère lui avait donné un chiffre différent. Elle
regarda sa montre et soupira. Dans trois heures, elle entrerait dans l’église.
Il était sept heures.
    – Est-ce que tu enlèves ta robe ?
    – Oui. J’vas la passer à la vapeur pour
être certaine que le velours va être beau.
    – Moi aussi, je me suis mariée en
velours.
    – Faut croire que c’est une habitude de
famille.
    – Ça doit, parce que Alice aussi s’est
mariée en velours. Sa robe était presque de la même couleur que la mienne.
    Blanche se pencha en avant pour laisser
glisser la robe doucement le long de ses bras. Elle descendit à la cuisine et poussa
un cri. Émilie accourut.
    – Regardez dehors, moman. La pluie s’est
changée en neige.
    Elles éclatèrent toutes les deux de rire en
poussant des petits gloussements de joie. Émilie souleva sa fille et la fit
tourner.
    – Ça va être beau, Blanche. Ça va être un
mariage à me faire pleurer.
    Une heure avant le mariage, pendant que
Blanche enfilait précautionneusement sa robe, le téléphone sonna de nouveau.
Émilie alla répondre, une pince dans la bouche.
    – C’est Clovis, madame Pronovost. On a
annulé tous les taxis.
    – Vous allez pas me faire marcher dans
deux pieds de neige ! C’est une vraie tempête.
    – Émilien a joué d’influence pis il a
fait venir trente carrioles.
    – Où est-ce qu’il a trouvé trente
carrioles ? Dans des fonds de cour ?
    – Je sais pas. Mais on va aller à
l’église en carriole. Ça va être extraordinaire. Mais dites-le pas à Blanche.
Je veux qu’elle ait la surprise. On arrive à neuf heures et demie tapant. Vous
allez être prêtes ?
    – Pas si vous téléphonez à toutes les
cinq minutes, Clovis.
    Elle raccrocha en riant et termina son
chignon. Blanche descendit l’escalier et Émilie se tut, se souvenant de
l’expression de son père quand elle-même lui était apparue, le matin de son
mariage. Elle souhaita que sa fille réussisse mieux le sien.
    – Es-tu prête, Blanche ?
    – Oui, moman.
    Émilie aida sa fille à enfiler son manteau en
jetant un regard discret par la fenêtre de la porte. Elle aperçut enfin une
procession de carrioles, entendit les grelots et attira Blanche pour qu’elle
voie le défilé.
    – Oh ! moman. C’est pas
possible ! Il y a juste Clovis pour penser à une affaire comme ça.
    Elles sortirent toutes les deux et Clovis,
manteau noir et chapeau melon, se dirigea vers elles. Il tenait un parapluie
fermé. Blanche se tourna vers les invités et fit un signe de la main pour les
saluer. Clovis ouvrit son parapluie. Dans toutes les carrioles, on imita son
geste, et bientôt le défilé se mit en branle. Un long défilé de carrioles dont
les grelots accompagnaient la danse des flocons blancs. Dans chaque carriole,
un parapluie noir protégeait ses occupants. Clovis, Émilie et Blanche fermaient
le défilé. Clovis avait les yeux riants de plaisir.
    – C’est pas assez extraordinaire,
ça ! Regardez pis plissez les yeux. Les parapluies font des notes sur les
traces de patins. Avec le son des grelots, on peut dire qu’on se marie en
musique.
    Blanche et Clovis se rendirent à
Saint-Boniface pour fêter une deuxième fois leur mariage. Ils furent accueillis
à la gare par une famille un peu inquiète. Clovis, pour

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