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Le cri de l'oie blanche

Le cri de l'oie blanche

Titel: Le cri de l'oie blanche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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incapable.
    Ils étaient arrivés au lac Éric et leur mère
était venue les accueillir. Habituellement, elle les embrassait. Aujourd’hui,
elle leur avait dit bonjour comme si elle les avait vues la veille puis avait demandé
à Blanche de ne pas défaire leur malle.
    – Je vois pas pourquoi on la viderait
pour la remplir dans deux semaines.
    Blanche aurait voulu lui sauter au cou, mais la
seule chose que sa mère acceptait près de son cou, c’était le mouchoir qu’elle
s’y passait sans arrêt. Oscar l’avait aidée à rentrer la malle dans l’école
mais sa mère lui avait dit de ne pas la monter.
    – J’ai pas envie d’être obligée de la
redescendre. Les petites auront juste à venir prendre ce qu’il leur faudra.
    Blanche avait détesté que sa mère l’appelle
« la p’ tite », mais, à regarder combien
sa mère était grande et grosse, elle s’était dit que finalement il était vrai
qu’elle était petite et Jeanne encore plus.
    Si sa mère ne l’avait pas embrassée, tel ne
fut pas le cas d’Alice qui n’en finissait plus de se pendre à son cou et à ses
bras, froissant les poignets de sa robe tant elle serrait fort. Alice était
presque aussi grande que Jeanne. Blanche pensa que pendant l’été elle aiderait
sa mère à coudre son nouvel uniforme, le sien devenant l’uniforme de Jeanne, et
l’uniforme de Jeanne, celui d’Alice. Blanche regarda l’uniforme de Jeanne et
fut satisfaite d’être l’aînée des trois pensionnaires. Au moins, elle portait
toujours un uniforme neuf. Sa mère lui avait dit que peut-être, cette année,
elle pourrait avoir deux uniformes. Elles étaient les seules pensionnaires à
n’avoir qu’un seul uniforme, qu’elles devaient presser et nettoyer à tous les
samedis. Mais Blanche s’y était habituée, parce que cela faisait aussi partie
de son statut d’orpheline.
    Elles avaient terminé le mois de juin dans les
boîtes. Sa mère commandait et elles exécutaient.
    – Mets toute la vaisselle là-dedans. Fais
attention. Toi, Jeanne, va décrocher le linge dehors. Ha !… si seulement
Émilien était là pour réparer ma roue de calèche. Ha !… si seulement
Marie-Ange était là pour s’occuper de Rolande. Ha !… si seulement Rose
était là pour faire les repas. Ha !… si seulement Clément…
    Blanche avait beau courir après Rolande,
chauffer la soupe, essayer même de réparer une chaise abîmée, sa mère semblait
ne pas la voir, perdue dans les préparatifs du déménagement. Blanche lui avait
remis son bulletin et sa mère y avait jeté un coup d’œil distrait.
    – Plus tard, Blanche. Laisse-moi finir ce
que je fais.
    Blanche avait remis le bulletin dans la grande
malle et, à chaque jour depuis son retour du couvent, elle avait essayé de
trouver un moment pour le montrer à sa mère, mais sa mère était toujours tellement
occupée qu’elle le repliait et le replaçait dans la malle, espérant pouvoir le
sortir le lendemain.
    Ils avaient enfin pu dé ménager . Sa mère avait demandé l’aide d’Oscar et d’Edmond. Mais,
ce matin-là, ce fut encore plus amusant parce que Ti-Ton et Ovide aussi étaient
venus. Ils étaient arrivés au moment où sa mère finissait de placer des bagages
dans sa vieille calèche.
    – Cesse d’en mettre, Émilie. Ta Tite va
jamais pouvoir tirer ça. C’est des bœufs qu’il faudrait.
    Son oncle Edmond avait taquiné sa mère. Sa
mère avait haussé les épaules et lui avait répondu de se faire « aller le
derrière au lieu de se faire aller la langue ». Blanche avait rougi. Sa
mère, parfois, était tellement impatiente qu’elle en devenait impolie.
    Ils avaient quitté le lac et Blanche ne
s’était pas retournée. Elle n’avait qu’une hâte : voir Saint-Tite et
savoir qu’elle y habiterait pour toujours. Ils étaient partis en caravane.
Edmond et Oscar devant dans la Ford, son oncle Ovide, Ti-Ton, elle, Jeanne et
Alice dans une vieille voiture remplie de malles, et sa mère derrière avec
Rolande.
    Ils avaient fait la moitié du chemin quand ils
entendirent crier sa mère. Blanche se tourna, croyant qu’elle voulait leur dire
qu’elle avait oublié quelque chose, mais elle vit sa mère en plein milieu du
chemin, agenouillée à côté de sa Tite. Sa vieille jument était couchée sur le
côté. Son oncle Ovide s’était hâté de la rejoindre et Edmond avait fait
demi-tour avec sa Ford et s’était empressé, lui aussi, de venir voir ce qui se
passait. Tout le

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