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Le Crime De Paragon Walk

Le Crime De Paragon Walk

Titel: Le Crime De Paragon Walk Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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quelconque, pas coquette pour un sou...
    —    Ah ça, sûrement pas. En fait, elle n’était pas si banale que ça. Mais vois-tu, Charlotte, plus je vieillis, plus je pense que la beauté n’est pas une question de traits ou de carnation, mais de comportement et d’image que l’on a de soi. Fanny se conduisait comme quelqu’un d’ordinaire. Alors que Jessamyn, si on la regarde objectivement, n’est pas si belle que ça ; seulement, elle se comporte comme si elle était la huitième merveille du monde. Du coup, tout le monde la voit comme telle. Elle y croit... et nous aussi, par la même occasion.
    Ce jugement témoignait d’une grande sagacité de la part d’Emily. Charlotte regretta de ne pas l’avoir su plus tôt, lorsqu’elle était plus jeune et désespérément tributaire du regard d’autrui. Elle se souvenait avec une clarté douloureuse comme elle avait été malheureuse à quinze ans, alors que Sarah et Emily étaient si jolies et qu’elle se sentait tellement quelconque, tout en pieds et en coudes. Elle était déjà la plus grande, et elle continuait encore à grandir. Elle allait finir proprement géante; aucun homme ne voudrait d’elle. Elle serait obligée de les regarder tous de haut ! Le jeune James Fortescue qu’elle trouvait tellement séduisant, elle le dépassait de cinq bons centimètres. Elle était incapable de desserrer les dents en sa présence et, pour finir, il avait fait la cour à Sarah.
    —    Tu ne m’écoutes pas ! lui reprocha Emily.
    —    Excuse-moi. Tu disais...?
    —    Que Thomas a fait le tour de Paragon Walk et interrogé tous les hommes. Il a même demandé à George où il était.
    —    Naturellement, fit Charlotte, placide.
    C’était la partie qu’elle redoutait depuis le début.
    —    Il est obligé de le faire. Imagine que George ait vu quelque chose qui ne l’a pas frappé sur le moment, mais compte tenu de ce qui s’est passé, il va peut-être s’apercevoir que c’est important.
    Elle était contente de son explication. C’était spontané et en même temps totalement rationnel. Elle n’avait pas l’air de l’avoir inventé juste pour rassurer sa sœur.
    —    Peut-être, concéda Emily. En fait, George n’était pas là de la soirée. Il était en ville, à son club. Il ne nous est donc d’aucune utilité.
    Charlotte fut dispensée de la nécessité de répondre par l’arrivée de la plus splendide vieille dame qu’elle eût jamais vue, impeccablement coiffée et droite comme un I. Malgré un nez un peu trop long et des paupières lourdes, elle avait conservé des traces incontestables de sa beauté d’antan, et surtout l’autorité que lui conférait la conscience de sa beauté.
    Emily se remit debout avec plus de hâte que de dignité. Voilà bien longtemps que Charlotte ne l’avait pas vue perdre contenance, et son attitude était parlante. Elle espérait que ce n’était point la crainte qu’elle ne sache pas se tenir et porte ainsi préjudice à Emily.
    —    Tante Vespasia, dit Emily précipitamment, puis-je vous présenter ma sœur, Charlotte Pitt?
    Elle jeta un regard pénétrant à Charlotte.
    —    Ma grand-tante par alliance, Lady Cumming-Gould.
    Charlotte n’avait pas besoin d’avertissement.
    —    Comment allez-vous, madame?
    Et elle inclina la tête très légèrement, juste ce qu’il fallait pour paraître courtoise sans frôler l’obséquiosité.
    Vespasia lui tendit la main. Elle examina Charlotte de la tête aux pieds et, pour finir, la fixa de son œil brillant.
    —    Comment allez-vous, Mrs. Pitt ? répondit-elle posément. Emily m’a beaucoup parlé de vous. Je suis contente que vous soyez venue nous voir.
    Elle n’ajouta pas « enfin », mais c’était implicite.
    Charlotte doutait qu’Emily eût parlé d’elle du tout. C’eût été déraisonnable — or Emily était tout sauf déraisonnable —, mais elle pouvait difficilement le faire remarquer. Elle ne trouvait pas non plus de réponse appropriée. « Merci » semblait totalement imbécile.
    —    C’est gentil à vous de m’accueillir de la sorte, s’entendit-elle répliquer.
    —    J’espère que vous restez déjeuner?
    C’était une question.
    —    Mais bien sûr, intervint Emily rapidement, sans laisser à Charlotte le temps de s’enferrer. Naturellement qu’elle restera. Et cet après-midi, nous irons faire des visites.
    Charlotte prit une inspiration pour invoquer quelque

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