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Le Crime De Paragon Walk

Le Crime De Paragon Walk

Titel: Le Crime De Paragon Walk Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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étaient exhumés tôt ou tard. Non pas de propos délibéré, mais elle savait par expérience, pour avoir vécu les événements de Cater Street et de Callander Square, que les gens avaient souvent tendance à se trahir dans leur empressement même à se protéger. C’était vite arrivé : un mot, un acte irréfléchi dans un moment de panique. Thomas était malin : il semait les graines et attendait qu’elles poussent. Ses yeux perçants, rieurs, voyaient beaucoup de choses... trop même.
    Étendue dans le fauteuil, elle s’étira, sentant la raideur dans son dos. Était-ce l’enfant en son sein, déjà? Elle éprouvait une sensation d’alourdissement, de gêne. Tante Vespasia avait peut-être raison : elle devrait desserrer son corset. Cela lui épaissirait la taille. Elle n’était pas assez grande pour porter les kilos superflus avec grâce. Curieusement, Charlotte n’en avait pas souffert lorsqu’elle attendait Jemima. Mais il faut dire que Charlotte ne s’habillait pas à la dernière mode.
    A l’autre bout de la pièce, George tripotait son journal. Il l’avait félicitée pour la réception, mais à présent il évitait de la regarder. Il ne lisait pas ; elle le voyait à l’inclinaison de sa tête, à son regard singulièrement fixe. Quand il lisait réellement, il bougeait, son expression changeait et, de temps à autre, il secouait les pages comme s’il entretenait une conversation avec elles. Cette fois-ci, il se servait du journal comme d’un bouclier, pour échapper à l’obligation de parler. Il avait le don d’être présent et absent en même temps.
    Pourquoi? Elle mourait d’envie de causer, à bâtons rompus, juste pour s’assurer qu’il prenait plaisir à être avec elle. Il ne pouvait certes savoir si tout allait se régler sans provoquer de nouvelles souffrances, mais elle brûlait de l’entendre le dire tout haut, lui prodiguer les mots habituels de réconfort. Alors elle pourrait se les répéter à satiété, jusqu’à les substituer au doute et au raisonnement.
    Il était son mari. C’était son enfant qui la rendait aussi fatiguée, fourbue et inexplicablement énervée. Comment pouvait-il rester là, assis tranquillement à quelques mètres d’elle, sans se douter qu’elle avait besoin du son de sa voix, d’une remarque bête et optimiste pour faire taire le tumulte de ses émotions ?
    —    George !
    Il feignit de n’avoir pas entendu.
    —    George !
    Le ton monta, légèrement hystérique.
    Il leva la tête. Ses yeux bruns, d’abord innocents comme s’il était toujours dans sa lecture, se voilèrent lentement : il avait compris sans conteste qu’elle réclamait quelque chose.
    —    Oui?
    Elle ne savait plus que dire. Le réconfort qu’on quémande n’est pas du réconfort. Elle aurait mieux fait de garder le silence. C’était sa raison qui parlait, mais elle ne réussit pas à tenir sa langue.
    —    On n’a toujours pas retrouvé Fulbert.
    Ce n’était pas à cela qu’elle pensait, mais au moins, cela permettait de meubler la conversation. Elle ne pouvait lui demander ce qu’il craignait que Pitt découvre à son sujet. Leur mariage en serait-il brisé ? Pas un divorce, non : on ne divorçait pas, en tout cas pas chez les gens de qualité. Mais elle connaissait nombre de ces mariages vides, arrangement poli pour partager une maison et un nom. En décidant d’épouser George, Emily avait cru que l’amitié et la tolérance suffiraient... mais elles ne suffisaient pas. Elle s’était accoutumée à l’affection, aux rires partagés, aux petits secrets, aux longs silences complices, aux habitudes même qui font partie du confort et du rythme quotidiens.
    Et tout cela s’éloignait peu à peu, comme la marée qui se retire, laissant des étendues de galets nus.
    —    Je sais, répondit-il avec un froncement de sourcils perplexe.
    Manifestement, il n’avait pas compris pourquoi elle énonçait l’évidence. Pour se justifier, elle fut obligée de continuer.
    —    Croyez-vous qu’il se soit enfui définitivement ? En France, par exemple ?
    —    Pour quoi faire, voyons ?
    —    Si c’est lui qui a tué Fanny !
    Son visage s’allongea. Visiblement, cette possibilité ne l’avait même pas effleuré.
    —    Il n’aurait pas tué Fanny, déclara-t-il d’un ton ferme. A mon avis, il doit être mort lui-même. Peut-être est-il allé en ville pour jouer ou autre chose, et il a eu un accident. Ce sont des

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