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Le Crime De Paragon Walk

Le Crime De Paragon Walk

Titel: Le Crime De Paragon Walk Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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de sa voix, d’une remarque bête et optimiste pour faire taire le tumulte de
ses émotions ?
    — George !
    Il feignit de n’avoir pas entendu.
    — George !
    Le ton monta, légèrement hystérique.
    Il leva la tête. Ses yeux bruns, d’abord innocents comme s’il
était toujours dans sa lecture, se voilèrent lentement : il avait compris
sans conteste qu’elle réclamait quelque chose.
    — Oui ?
    Elle ne savait plus que dire. Le réconfort qu’on quémande n’est
pas du réconfort. Elle aurait mieux fait de garder le silence. C’était sa
raison qui parlait, mais elle ne réussit pas à tenir sa langue.
    — On n’a toujours pas retrouvé Fulbert.
    Ce n’était pas à cela qu’elle pensait, mais au moins, cela
permettait de meubler la conversation. Elle ne pouvait lui demander ce qu’il
craignait que Pitt découvre à son sujet. Leur mariage en serait-il brisé ?
Pas un divorce, non : on ne divorçait pas, en tout cas pas chez les gens
de qualité. Mais elle connaissait nombre de ces mariages vides, arrangement
poli pour partager une maison et un nom. En décidant d’épouser George, Emily
avait cru que l’amitié et la tolérance suffiraient… mais elles ne suffisaient
pas. Elle s’était accoutumée à l’affection, aux rires partagés, aux petits
secrets, aux longs silences complices, aux habitudes même qui font partie du
confort et du rythme quotidiens.
    Et tout cela s’éloignait peu à peu, comme la marée qui se retire,
laissant des étendues de galets nus.
    — Je sais, répondit-il avec un froncement de sourcils
perplexe.
    Manifestement, il n’avait pas compris pourquoi elle énonçait
l’évidence. Pour se justifier, elle fut obligée de continuer.
    — Croyez-vous qu’il se soit enfui définitivement ?
En France, par exemple ?
    — Pour quoi faire, voyons ?
    — Si c’est lui qui a tué Fanny !
    Son visage s’allongea. Visiblement, cette possibilité ne l’avait
même pas effleuré.
    — Il n’aurait pas tué Fanny, déclara-t-il d’un ton
ferme. À mon avis, il doit être mort lui-même. Peut-être est-il allé en ville
pour jouer ou autre chose, et il a eu un accident. Ce sont des choses qui
arrivent.
    — Ne soyez donc pas aussi stupide !
    Elle avait fini par perdre patience. La violence de sa
réaction la surprit et l’alarma. Jamais encore elle n’avait osé lui parler sur
ce ton.
    Il parut déconcerté. Le journal glissa sur le plancher.
    Maintenant, elle avait un peu peur. Qu’avait-elle fait ?
Il la dévisageait de ses yeux bruns grands ouverts. Elle aurait voulu s’excuser,
mais elle avait la bouche sèche, et sa voix refusait de lui obéir. Elle inspira
très profondément.
    — Vous devriez peut-être monter vous allonger, dit-il
au bout d’un moment, parfaitement calme. Vous avez eu une rude journée. Ces
réceptions sont épuisantes. Et la chaleur a dû vous achever.
    — Je ne suis pas malade ! protesta-t-elle
rageusement.
    Tout à coup, à son horreur, les larmes jaillirent de ses
yeux, et elle se mit à pleurer comme une petite fille.
    Le visage de George se crispa douloureusement, puis soudain
l’explication lui apparut dans une bouffée de soulagement. C’était son état, bien
sûr ! Elle le lut dans son regard aussi clairement que s’il l’avait dit
tout haut. Il se trompait ! Mais elle était incapable de lui expliquer. Il
l’aida à se lever et l’escorta avec douceur dehors et dans l’escalier.
    Elle bouillait intérieurement ; les mots se
bousculaient dans sa tête et s’évanouissaient sans qu’elle pût les ordonner en
phrases. Mais elle n’arrivait pas à contenir ses larmes, et il était bon de
sentir le bras de George autour d’elle, de n’être pas obligée d’accomplir l’effort
toute seule.
     
    Lorsque Charlotte vint la voir le lendemain matin, essentiellement
pour prendre de ses nouvelles après la réception, elle la trouva de fort
mauvaise humeur. Emily avait mal dormi ; couchée dans son lit, elle avait
cru entendre George bouger dans la chambre d’à côté. Plus d’une fois, elle
avait failli se lever pour aller lui demander pourquoi il faisait les cent pas,
ce qui le tracassait tant.
    Mais elle estimait ne pas le connaître assez bien pour se permettre
de faire irruption dans sa chambre à deux heures du matin. Ce serait trop
sans-gêne, voire impudique de sa part. Et elle n’était même pas sûre de vouloir
entendre sa réponse. Par-dessus tout, elle craignait sans doute qu’il ne

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