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Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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coller une autre équipe. Il croit nous stimuler de cette manière ? Moi, cela ne me gênerait pas de partager avec d’autres tout ce que nous avons appris jusqu’à maintenant. Quatre yeux valent mieux que deux, non ? Ou bien le pape est très insatisfait ou bien il nous prend pour des enfants.
    — Il est très mécontent, répéta le capitaine. Alors, au travail !
    Une demi-heure plus tard, nous étions de nouveau dans l’Hypogée, assis autour de mon bureau. Le capitaine proposa de commencer par une lecture complète et individuelle de La Divine Comédie en prenant des notes sur ce qui attirerait notre attention, puis de nous réunir à la fin de la journée pour mettre en commun nos appréciations. Farag discuta cette proposition en arguant que la seule partie qui nous intéressait était la deuxième, « Le Purgatoire », et que nous ferions mieux d’examiner rapidement le plus important après une lecture sommaire des deux autres parties. J’adoptai une attitude encore plus radicale et, le cœur sur la main, avouai que je détestais La Divine Comédie , qu’au cours de mes études mes professeurs de lettres avaient seulement réussi à me la faire prendre en grippe, que je me sentais incapable de lire ce gros livre en entier, et que le mieux à faire, c’était d’aller directement au but en sautant tout le reste.
    — Mais, Ottavia ! protesta Farag. On risquerait de laisser échapper des tas de détails importants.
    — Pas du tout, dis-je, très sûre de moi. Car nous pouvons compter sur le capitaine. Non seulement ce livre le passionne, mais il connaît parfaitement l’œuvre et l’auteur, presque comme s’ils faisaient partie de sa famille. Qu’il fasse une lecture complète s’il le veut, tandis que nous travaillerons sur « Le Purgatoire ».
    Glauser-Röist fronça les sourcils sans rien dire. On le sentait peu emballé par mon idée.
    Nous nous mîmes au travail. Le secrétariat général de la Bibliothèque vaticane nous fournit l’après-midi même deux exemplaires de La Divine Comédie. Je taillai mes crayons et préparai mes carnets de notes, prête à affronter, pour la première fois depuis vingt ans ou plus, ce que je considérais comme le pensum littéraire le plus colossal de l’histoire de l’humanité. Je ne pense pas exagérer en disant que je tremblais à la simple idée d’ouvrir ce livre qui reposait sur ma table, menaçant, avec le profil aquilin de Dante sur la couverture. Ce n’est pas que je ne pouvais pas lire le magnifique texte dantesque (j’avais lu des choses bien plus difficiles au cours de ma vie, des volumes entiers sans intérêt scientifique ou des manuscrits médiévaux de pesante théologie patristique), mais j’avais gardé en mémoire le souvenir de ces après-midi d’école où l’on nous faisait lire encore et encore les extraits les plus connus de La Divine Comédie , tandis qu’on nous répétait à satiété que cette chose si lourde et incompréhensible était une des grandes fiertés de l’Italie.
    Dix minutes après m’être assise, je taillai de nouveau mes crayons et, pour finir, décidai d’aller aux toilettes. Je revins, m’assis et, cinq minutes plus tard, mes paupières se fermaient. Il me fallait un remontant. Je montai à la cafétéria, demandai un espresso et le bus tranquillement. Je revins à contrecœur à l’Hypogée et trouvai le moment bien choisi pour ranger mes tiroirs et me défaire d’une quantité de papiers et de vieilleries inutiles qui s’accumulaient depuis des années dans les coins, comme par magie. À sept heures, l’âme rongée par le remords, je ramassai mes affaires et rentrai chez moi, à l’appartement de la Piazza delle Vaschette (où je n’étais pas allée depuis de nombreux jours), non sans avoir dit au revoir à Farag et au capitaine, qui, chacun dans son bureau – ils étaient contigus au mien –, lisaient, absorbés et profondément émus, le chef-d’œuvre de la littérature italienne.
    Durant le court trajet jusqu’à ma maison, je me sermonnai sévèrement en me rappelant les notions de responsabilité, de devoir, d’obligations. J’avais abandonné ces pauvres malheureux, je les considérais ainsi alors, tandis que je fuyais, insouciante et évaporée comme une collégienne, avec des simagrées. Je me promis que, le lendemain de bon matin, je m’assoirais devant ma table de travail et me mettrais à l’œuvre sans plus attendre.
    Quand j’ouvris la porte de la

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