Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
Vom Netzwerk:
difficile quand Ubba
proférait des menaces.
    — Tu peux essayer, mais tu échoueras. J’ai tiré les
runes, Ubba. Je les ai interrogées à la pleine lune cette nuit et je sais.
    Il était furieux, car il croyait à mon mensonge. Il voulut
faire semblant de ne pas me croire, mais l’espace d’un instant il ne put que me
regarder, terrifié.
    — Tu es le garçon de Ragnar, dit-il, me reconnaissant
enfin.
    — Et Ragnar l’Intrépide me parle, proférai-je. Il
m’appelle depuis le séjour des morts. Il crie vengeance, Ubba, vengeance sur
les Danes, car Ragnar a été traîtreusement tué par l’un des siens. Je suis son
messager, désormais je parle pour les morts et je suis venu te chercher.
    — Je ne l’ai pas tué ! gronda Ubba.
    — Peu importe à Ragnar, dis-je. Il veut simplement être
vengé, et pour lui une vie dane en vaut une autre. Interroge les runes et
rends-nous ton épée. Tu es maudit, Ubba.
    — Et toi, tu es une crotte de fouine, dit-il.
    Et sur ces mots, il tourna les talons précipitamment.
    Odda me regardait toujours, bouche bée.
    — Tu le connais ? me demanda-t-il.
    — Je le connais depuis que j’ai dix ans, répondis-je en
regardant le chef des Danes s’éloigner. (Je songeais que j’aurais préféré
combattre aux côtés d’Ubba que de l’affronter, mais les Nornes en avaient
décidé autrement.) Depuis mes dix ans, continuai-je. Et ce que je sais de lui,
c’est qu’il craint les dieux. Maintenant, il a peur. Tu peux l’attaquer et le
courage l’abandonnera, car il est convaincu de perdre la bataille.
    — Alfred va venir, dit Odda.
    — Alfred surveille Guthrum, répondis-je. (Je n’en étais
pas certain, bien sûr, mais je doutais qu’il laisse le Wessex à Guthrum.) Il ne
viendra pas, et nous mourrons de soif avant qu’Ubba nous attaque.
    — Nous avons de l’eau, intervint son fils d’un ton
boudeur. Et de l’ale.
    — À peine pour une journée, dis-je avec mépris.
    En voyant l’expression de son père, je sus que j’avais
raison.
    Odda contempla la vallée de la Pedredan. Il mourait d’envie
de voir les troupes d’Alfred, le scintillement du soleil sur les lances, mais
il ne vit rien que les arbres qui ondoyaient sous le vent.
    Odda le Jeune sentit l’inquiétude de son père.
    — Nous pouvons attendre deux jours, insista-t-il.
    — La mort ne sera pas plus douce au bout de deux jours,
répondit Odda d’un ton sombre. À l’aube, dit-il sans me regarder. Nous
attaquerons à l’aube.
     
    Nous dormîmes tout harnachés. Du moins tentâmes-nous de
dormir malgré les cottes de cuir ou de mailles, ceinturons, casques et armes à
portée de main, et nous n’allumâmes point de feu, car Odda ne voulait pas que
l’ennemi sache que nous étions prêts à la bataille. Les feux des Danes nous
encerclaient, plus nombreux près de Cantucton où se trouvait le campement de
Guthrum. Près des navires danes, leurs flammes se reflétaient sur les figures
de proue dorées et peintes. Depuis les remparts, j’observais les quelques Danes
qui montaient la garde, allant de feu en feu sous les proues sculptées, et je
priais pour que la Vipère soit parmi ces longs navires élancés.
    Je pensais aux boucliers, aux Danes, aux épées et à la peur.
À mon fils que je n’avais jamais vu et à Ragnar l’Intrépide, me demandant s’il
me regardait depuis le Valhalla. Je craignais d’échouer lorsque, enfin, je
serais dans le mur de boucliers. Je n’étais pas le seul à ne point trouver le
sommeil car, au cœur de la nuit, un homme monta sur le talus et me rejoignit.
C’était l’ealdorman Odda.
    — Comment connais-tu Ubba ? me demanda-t-il.
    — J’ai été capturé par les Danes et élevé parmi eux. Ils
m’ont appris à me battre. C’est Ubba qui m’a donné ceci, dis-je en montrant
l’un de mes bracelets.
    — Tu as combattu pour lui ? demanda Odda, plus
curieux qu’accusateur.
    — J’ai combattu pour survivre, répondis-je, évasif.
    Il contempla les reflets de la lune sur la rivière.
    — Quand il s’agit de se battre, dit-il, les Danes ne
sont point sots. Ils s’attendent à une attaque à l’aube. (Je ne répondis rien,
me demandant si les craintes d’Odda ne le faisaient pas changer d’avis.) Et ils
nous dépassent en nombre.
    Je ne répondais toujours pas. La peur travaille un homme, et
il n’est pire crainte que celle du mur de boucliers. Cette nuit-là, la peur
m’envahissait, car je n’avais jamais combattu

Weitere Kostenlose Bücher