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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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pourront pas nous déborder là-bas.
    — Tu n’atteindras jamais la berge, dit Odda, déçu de
mon idée.
    — Une ombre qui marche peut le faire. J’en suis
capable, et lorsque le premier navire brûlera tous les Danes se précipiteront
pour sauver leurs vaisseaux sur la rive. C’est alors que les cent hommes
chargeront ; nous brûlerons d’autres navires et les Danes tenteront de
nous tuer. (Je désignai la berge, montrant le chemin que suivraient les Danes
sur la langue de terre jusqu’aux bateaux.) Et lorsqu’ils seront tous là,
continuai-je, coincés entre la rivière et le marais, tu mèneras la fyrd pour les prendre à revers.
    Odda contempla pensivement les navires. Dans une bataille de
murs de boucliers, ce serait nos neuf cents hommes contre douze cents Danes. Au
début nous aurions l’avantage, car nombre des soldats d’Ubba étaient postés
autour de la colline et il leur faudrait du temps pour se joindre aux autres.
Ce temps, nous le mettrions à profit pour opérer une percée dans leur camp.
Mais ils se feraient plus nombreux, et alors commencerait le massacre, et les
hommes de l’arrière, ceux armés seulement de faucilles, commenceraient à
succomber.
    Mais si je descendais la colline et brûlais leurs navires,
les Danes se précipiteraient pour m’arrêter. Cela les obligerait à passer sur
l’étroite langue de terre, et si les cent hommes commandés par Leofric me
rejoignaient, nous pourrions retenir l’ennemi assez longtemps pour qu’Odda les
prenne à revers. Ce seraient alors les Danes qui succomberaient, pris au piège
entre Odda, mes hommes, le marais et la rivière. Tout comme l’armée de
Northumbrie avait été prise au piège à Eoferwic. Certes, à la colline d’Æsc,
l’armée qui s’était divisée avait été vaincue.
    — Cela pourrait réussir, murmura Odda, sans conviction.
    — Donne-moi cinquante hommes, le pressai-je. Des
jeunes.
    — Des jeunes ?
    — Ils devront courir vite. Atteindre les vaisseaux
avant les Danes, et cela à l’aube. (Je parlais avec une assurance que je
n’éprouvais point, et je marquai une pause, attendant qu’il opine. Il ne
broncha point.) Si tu es victorieux, mon seigneur, dis-je – et je ne l’appelai
point seigneur parce qu’il était d’un rang plus élevé, mais parce qu’il était
plus âgé –, tu auras sauvé le Wessex et Alfred te récompensera.
    Il réfléchit un moment et ce fut peut-être la perspective
d’une récompense qui le convainquit, car il hocha la tête.
    — Je te donnerai cinquante hommes.
    Ravn m’avait souvent conseillé, et toujours fort
judicieusement ; mais là, dans le vent nocturne, je ne me rappelais que ce
qu’il m’avait dit la première fois que je l’avais vu, et que je n’avais jamais
oublié :
    Ne te bats jamais contre Ubba, avait-il dit. Jamais.
    Les cinquante hommes étaient commandés par le bailli du comté,
Edor, un homme à l’air aussi dur que Leofric et qui, comme lui, avait combattu
dans les grands murs de boucliers. Son arme favorite était un javelot court
pour la chasse au sanglier, mais il portait aussi une épée à la ceinture. Comme
Leofric, Edor avait accepté mon plan sans hésitation. Jamais il ne me serait
venu à l’esprit qu’ils refusent, mais pourtant, en y repensant, je suis
stupéfait que la bataille de Cynuit se soit déroulée selon les idées d’un jeune
homme de vingt ans qui n’avait jamais participé à un massacre. Cependant,
j’étais un seigneur, j’avais été élevé parmi les guerriers et j’avais
l’arrogante assurance d’un homme né pour les combats. J’étais Uhtred, fils et
petit-fils d’Uhtred, et nous n’avions pas défendu Bebbanburg en gémissant devant
l’autel. Nous étions des guerriers.
    Les hommes d’Edor et les miens se rassemblèrent derrière le
rempart de Cynuit. Leofric était sur le flanc droit avec l’équipage del’ Heahengel. Je le lui avais demandé, car c’était là qu’Ubba enverrait ses hommes à
l’attaque au bord de la rivière. Edor et les hommes du Defnascir étaient sur le
flanc gauche et leur tâche, outre celle de tuer quiconque les croiserait sur
les berges, était de dérober des braises dans les feux des Danes et de les
jeter sur les autres navires.
    — Ne tentons pas de brûler tous les vaisseaux,
ordonnai-je. Il suffira d’en incendier quatre ou cinq. Cela attirera les Danes
comme un essaim d’abeilles.
    — Les abeilles piquent, lança une voix

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