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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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oreille, tandis que l’autre, l’air soucieux,
était assis entre les deux frères. Je décrivis tout cela à Ravn, qui voulut
savoir à quoi ressemblait l’homme inquiet assis entre Ivar et Ubba.
    — Il ne porte point de bracelets, mais un collier au
cou. Des cheveux bruns, une longue barbe, et il semble fort âgé.
    — Tout le monde paraît vieux aux yeux des jeunes,
soupira Ravn. Ce doit être le roi Egbert.
    — Le roi Egbert ?
    Je n’avais jamais entendu parler d’un tel personnage.
    — Il était ealdorman Egbert, expliqua Ravn, mais il a
fait la paix avec nous durant l’hiver et nous l’avons récompensé en le
proclamant roi de Northumbrie. Il est roi, mais c’est nous qui sommes les
seigneurs de ce pays.
    Il gloussa et, si jeune que j’étais, je compris la trahison.
L’ealdorman Egbert possédait des terres au sud de notre royaume et était là-bas
ce que mon père était au nord : un homme puissant. À présent, il avait
titre de roi, mais il était évident qu’on lui laissait la bride sur le cou.
    — Si jamais tu dois vivre, dit Ravn, il serait sage
d’aller rendre hommage à Egbert.
    — Vivre ? répétai-je en balbutiant.
    Ayant réchappé de la bataille, j’imaginais que je serais
épargné, bien sûr. J’étais un enfant, mais les paroles de Ravn me ramenèrent
brusquement à la réalité. Je n’aurais jamais dû avouer mon rang, me
reprochai-je. Mieux valait vivre comme esclave que mourir en ealdorman.
    — Je pense que tu vivras, me dit Ravn. Ragnar t’aime
bien et Ragnar obtient ce qu’il désire. Il parait que tu l’as attaqué ?
    — Oui, c’est vrai.
    — Cela lui a plu. Un petit garçon qui attaque le jarl
Ragnar ? Ce doit être un sacré petit, hein ? Trop bon pour qu’on le
perde, m’a-t-il dit. Somme toute, mon fils a hélas un côté sentimental. Moi, je
t’aurais tranché la tête, mais puisque tu es là et bien vivant, je crois qu’il
serait sage d’aller t’incliner devant Egbert.
    En me remémorant cette lointaine nuit, je pense à présent
que j’ai probablement changé le cours des choses. Il y avait un festin, Ivar et
Ubba étaient là, Egbert s’efforçait de ressembler à un roi, Ravn se montrait
bienveillant à mon endroit, mais je suis certain que j’étais bien plus
désorienté et effrayé que je ne le paraissais. Pourtant, à bien d’autres
égards, mes souvenirs de ce festin sont très précis. Regarde et apprends,
m’avait dit mon père. Ravn m’avait fait regarder, et j’avais appris. Appris la
trahison, lorsque Ragnar, appelé par Ravn, me prit par le collet et me mena à
la haute estrade où, après qu’Ivar m’y eut convié, je m’approchai de la table.
Je répétai alors la leçon que Ravn m’avait soufflée :
    — Seigneur roi, bredouillai-je d’une voix étranglée
avant de m’agenouiller, si bien qu’Egbert, surpris, dut se pencher pour me
voir, je suis Uhtred de Bebbanburg. Et je demande la protection de Votre
Seigneurie.
    Un silence s’installa, troublé seulement par le murmure de
l’interprète qui traduisait mes paroles à Ivar. Puis Ubba se réveilla, sembla
un instant interloqué, comme s’il ne savait où il se trouvait. Il me fixa et je
fus parcouru d’un frisson, car je n’avais jamais vu visage plus malveillant.
Ses yeux noirs étaient emplis de haine et j’aurais voulu disparaître dans un
trou. Il ne dit mot et se contenta de me regarder tout en caressant l’amulette
en forme de marteau qu’il portait au cou. Ubba avait le visage maigre de son
frère mais, au lieu de ses cheveux blonds ramenés en arrière, il était affublé
d’une tignasse noire et d’une épaisse barbe parsemée de miettes. Quand il
bâilla, j’eus l’impression de contempler la gueule d’un monstre. L’interprète
chuchota à Ivar qui répondit quelque chose, et l’homme s’adressa enfin à Egbert
qui tenta de prendre un air sévère.
    — Ton père, me dit-il, a choisi de nous combattre.
    — Et il est mort, répondis-je, les larmes aux yeux.
    Je voulus poursuivre, mais rien ne vint et je me mis à pleurnicher
comme un bébé. Le mépris d’Ubba me brûla comme un feu cuisant. Je me cachai le
nez dans mes mains.
    — Nous déciderons de ton sort, dit Egbert d’un ton
majestueux avant de me congédier.
    Je retournai auprès de Ravn, qui insista pour connaître les détails
et sourit quand je lui décrivis l’air cruel d’Ubba.
    — C’est un homme à l’aspect effrayant, concéda-t-il. Je
tiens pour

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