Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
Vom Netzwerk:
grâce, mais, voyant mes armes lamentables, il éclata de rire.
Excédé, je l’attaquai de nouveau de mon épée dérisoire et il continua à rire,
puis il se pencha, s’empara de ma lame et la jeta au loin. Il me cueillit sur
ma selle tandis que je criais et le frappais ; il trouva cela fort
amusant, me coucha à plat ventre devant lui en travers de sa selle et s’élança
d’un coup d’éperon poursuivre le massacre.
    Et c’est ainsi que je connus Ragnar, Ragnar l’Intrépide,
l’assassin de mon frère, l’homme dont la tête devait orner une pique sur les
remparts de Bebbanburg : le jarl Ragnar.

PREMIÈRE PARTIE

Une enfance païenne

Chapitre 1
    Les Danes avaient fait preuve de ruse, ce jour-là. Ils
avaient bâti de nouveaux murs dans la ville, attiré nos hommes dans les rues,
les avaient pris au piège, acculés et massacrés. Ils n’avaient pas tué tout
l’ost de Northumbrie, car même les plus féroces guerriers se lassent des
boucheries et, par ailleurs, les Danes tiraient grand profit de l’esclavage. La
plupart des captifs d’Anglie étaient vendus à des fermiers des sauvages îles du
Nord, ou d’Irlande, ou envoyés par-delà les mers jusqu’aux îles danes, mais
certains, appris-je, étaient emmenés dans les grands marchés d’esclaves en
Franquie et quelques-uns dans le Sud, en une contrée qui ne connaissait point
d’hiver et où des hommes au visage couleur de bois brûlé payaient fort cher
pour des hommes et plus encore pour des jeunes femmes.
    Mais ils en tuèrent beaucoup. Ils tuèrent Ælla et Osbert, et
aussi mon père. Ælla et mon père eurent de la chance, car ils moururent l’épée
à la main. Il n’en alla pas de même pour Osbert qui fut capturé et torturé
durant la nuit, tandis que les Danes festoyaient dans la cité qui empestait le
sang. Certains des vainqueurs gardaient les murs, d’autres fêtaient l’événement
dans les maisons, mais la plupart se rassemblèrent dans le château du roi
vaincu de Northumbrie, où Ragnar m’emmena, à mon grand étonnement : je
m’attendais à être tué ou, au mieux, vendu comme esclave. Or Ragnar me fit
asseoir avec ses hommes et déposa devant moi une cuisse d’oie, une demi-miche
de pain et une chope d’ale, puis il me gratifia d’une petite tape affectueuse
sur la tête.
    Au début, les autres Danes m’ignorèrent. Ils étaient trop
occupés à se saouler et à encourager les bagarres qui se déclenchèrent quand
ils furent ivres, mais les acclamations les plus bruyantes s’élevèrent lorsque
Osbert, captif, fut forcé de combattre un jeune guerrier qui maniait l’épée
avec une extraordinaire dextérité. Il sautilla autour du roi, puis il lui
trancha la main gauche avant de lui fendre le ventre de sa lame acérée ;
comme Osbert était un homme corpulent, ses tripes en jaillirent comme des
anguilles échappées d’un sac. À cette vue, quelques Danes s’esclaffèrent à en perdre
connaissance. Le roi mit longtemps à mourir et, tandis qu’il suppliait qu’on
l’achève, les Danes crucifièrent un prêtre. Notre religion les intriguait et
leur répugnait, et leur colère fut à son comble lorsque le prêtre libéra ses
mains clouées. Certains prétendirent qu’il était impossible de tuer un homme
ainsi et ils se disputèrent d’une voix pâteuse. Après quoi ils tentèrent de
clouer le prêtre une seconde fois sur les piliers du château, jusqu’au moment
où, lassé, l’un de leurs guerriers lui planta sa lance en pleine poitrine, lui
fracassant les côtes et lui perçant le cœur.
    Après la mort du prêtre, une poignée d’hommes se tourna vers
moi et, comme ils m’avaient vu coiffé d’un casque cerclé de bronze doré, ils
comprirent que j’étais fils de roi et me firent revêtir une tunique. Puis,
alors qu’un homme grimpait sur la table pour pisser sur moi, Ragnar fendit la
foule. Il m’arracha la tunique et harangua ses hommes. Je ne sais ce qu’il leur
dit, mais ses paroles les arrêtèrent. Ragnar me prit alors par l’épaule et
m’emmena jusqu’à une estrade sur le côté de la salle en me faisant signe d’y
monter. Un vieil homme y était assis, à l’écart. Ses yeux aveugles étaient d’un
blanc laiteux, et son visage creusé de rides encadré de cheveux aussi longs que
ceux de Ragnar. Il m’entendit monter et posa une question à laquelle Ragnar
répondit avant de me laisser avec lui.
    — Tu dois avoir faim, mon garçon, murmura le vieillard
dans ma

Weitere Kostenlose Bücher