Le dernier templier

ont réussi à le remonter.
    Reilly aussi l’avait vu et un frémissement lui parcourut l’échine. Finalement, tout était vrai. C’était bien là, arraché des abîmes après des siècles d’oubli par la ténacité inébranlable d’un homme.
    Tess. Qu’as-tu fait ?
    Avec un sentiment d’horreur, il sut que plus rien n’arrêterait De Angelis.
    Debout près d’eux, le second du bateau avait aussi les yeux fixés sur le Savarona , mais il avait d’autres motifs de préoccupation.
    — Ils partent vers le sud. Ils abandonnent les plongeurs.
    Dès qu’il entendit ça, Karakas commença à donner des ordres. Instantanément, une sirène retentit, suivie par des commandements rapides tombant des haut-parleurs du patrouilleur. Des hommes-grenouilles s’équipèrent, tandis que sur le pont des gardes-côtes préparaient en hâte l’une des vedettes gonflables.
    Observant cette activité frénétique d’un air incrédule, De Angelis hurla en tendant le doigt vers le Savarona :
    — Laissez tomber ces types ! Les autres s’enfuient. Il faut les arrêter.
    — On ne peut pas les abandonner, rétorqua Karakas, dissimulant à peine son mépris. De toute façon, ce bateau ne pourra jamais traverser la tempête. Les vagues sont trop puissantes. Nous devons repartir dès que nous aurons récupéré les plongeurs.
    — Non, répliqua De Angelis. Même s’il n’y a qu’une chance sur un million pour qu’ils s’en sortent en un seul morceau, nous ne pouvons courir ce risque.
    Il darda un regard d’acier à travers la vitre, puis se retourna pour faire face au petit capitaine trapu, l’air menaçant.
    — Coulez-les !
    Reilly ne put demeurer passif plus longtemps. Il se précipita sur De Angelis, l’attrapa par l’épaule et l’obligea à pivoter brutalement pour lui faire face.
    — Vous ne pouvez pas faire ça. Il n’y a aucune...
    Il s’arrêta net.
    L’ecclésiastique avait sorti un gros automatique dont il pointait le canon sous son nez.
    — Restez en dehors de ça ! hurla-t-il en repoussant Reilly vers l’arrière du poste de pilotage.
    Celui-ci loucha sur le fût d’acier froid brandi à quelques millimètres de lui. Son regard remonta le long du canon, puis, au-delà, jusqu’aux yeux du prêtre. Ils brûlaient d’une fureur meurtrière.
    — Vous n’êtes plus d’aucune utilité ici, cracha De Angelis. Vous saisissez ?
    Il y avait quelque chose de si implacable dans son expression que Reilly comprit qu’il presserait la détente sans la moindre hésitation. Il savait aussi que, s’il ébauchait un mouvement vers lui, il serait mort avant de l’avoir atteint.
    Hochant la tête, il recula en vacillant à cause du roulis.
    — Doucement, dit-il. Doucement.
    De Angelis gardait les yeux rivés sur l’Américain.
    — Utilisez le canon avant qu’ils soient hors de portée, ordonna-t-il au commandant.
    Reilly constata que ce qui se passait sur son bateau mettait Karakas très mal à l’aise.
    — Nous sommes dans des eaux internationales, objecta-t-il, et si ça ne vous suffit pas, c’est un bateau grec qui est là-bas. Nous avons déjà suffisamment de problèmes avec...
    — Je m’en fous ! rugit l’ecclésiastique en brandissant rageusement son arme vers le Turc. Ce navire opère sous commandement de l’OTAN et, en tant que plus haut gradé à bord, je vous donne un ordre direct, capitaine...
    Cette fois, ce fut Karakas qui l’interrompit.
    — Non, répondit-il en toisant De Angelis. Je préfère me défendre devant un tribunal militaire.
    Les deux hommes se défièrent pendant un moment de grande tension. L’ecclésiastique avait le bras droit tendu, le canon du revolver devant le visage du capitaine. Celui-ci ne faiblit pas, décidé à faire ce que l’honneur lui commandait. De Angelis finit par le repousser de côté avant de se tourner vers Plunkett pour lui ordonner de surveiller toutes les personnes présentes. Puis il se précipita sur la porte donnant vers l’extérieur.
    — Allez au diable, ragea-t-il. Je vais le faire moi-même.
    L’homme de main se mit en position. Il sortit son pistolet de son holster en même temps que son patron ouvrait la porte. Une violente rafale de vent s’engouffra dans le poste de pilotage. L’ecclésiastique vacilla un instant et s’engagea dans la tempête déchaînée.
    À l’intérieur, Reilly jetait un regard incrédule à Karakas au moment précis où une immense vague s’écrasait sur le flanc du bateau. La