Le dernier templier
hurla-t-il.
Braquant le volant en catastrophe, il exécuta un violent tête-à-queue et lança la Chrysler vers un espace dégagé qu’il venait de repérer sur l’emplacement d’un bâtiment abattu. Le véhicule pulvérisa une chaîne barrant l’accès et poursuivit sa course dans un grand nuage de poussière.
Quelques secondes plus tard, il quittait le terrain vague et relançait son véhicule sur la piste du taxi. Pour autant que Reilly pût en juger, le bras et l’arme du fuyard ne sortaient plus de la vitre.
— Attention ! s’étrangla Aparo.
Une femme promenant un chien avait trébuché et heurté un livreur qui poussait une pile de caisses de bière. Les caisses basculèrent en travers de la route. D’un coup de volant, Reilly évita d’un cheveu les passants, mais pas les caisses. Projetée en l’air, l’une d’elles retomba sur le pare-brise blindé, qui s’étoila sur toute sa surface.
— Je ne vois plus rien ! rugit-il.
Avec la crosse de son pistolet, Aparo martela le pare-brise. Au troisième coup, le verre céda et se souleva d’un seul tenant. Passant par-dessus la voiture, il alla atterrir sur le toit d’un véhicule en stationnement.
Le vent s’engouffra dans l’auto, obligeant les deux agents à plisser les yeux. Malgré cela, Reilly entrevit à quelque distance devant eux un panneau de sens interdit, là où la ruelle se rétrécissait. Le tueur allait-il s’y risquer ? S’il rencontrait quelqu’un en sens inverse, c’était la mort assurée.
Cinquante mètres environ avant le panneau, l’agent du FBI avisa une ouverture sur la droite. Le taxi allait l’emprunter, supposa-t-il. Reilly appuya sur l’accélérateur, dans l’espoir de rejoindre la voiture de Waldron et de lui faire rater le virage. La Chrysler gagna du terrain.
Elle n’était plus qu’à quelques centimètres du pare-chocs arrière de l’autre véhicule. Ce dernier obliqua en crissant vers le passage et partit en léger dérapage. Il fit chauffer ses pneus en heurtant un muret d’angle.
Reilly le suivit.
— Bon sang ! murmura Aparo.
Les deux agents du FBI venaient d’apercevoir un gamin qui traversait la rue sur un skate-board. Des écouteurs sur les oreilles, le jeune garçon ne se rendait pas compte de l’ouragan qui fondait sur lui.
D’instinct, Reilly ralentit. Mais devant lui, aucune lumière rouge ne s’était allumée à l’arrière du taxi, qui continuait de foncer.
« Il va le renverser. Il va le tuer. »
Désespérément, Reilly klaxonna, en espérant que l’enfant l’entendrait malgré son baladeur. Le taxi se rapprochait. Nonchalamment, le jeune garçon regarda sur sa gauche et vit le véhicule, qui n’était plus qu’à quelques mètres. Il plongea juste à temps pour éviter le bolide qui le frôla sans ralentir en pulvérisant sa planche à roulettes.
La Chrysler passa à son tour devant l’enfant abasourdi. La voie était libre. Aucun véhicule ni piéton en mouvement. Si Reilly voulait tenter quelque chose, c’était le moment. Avant que cette affaire ne tourne véritablement mal.
Pied au plancher, il regagna du terrain sur le taxi. La roue arrière gauche de Waldron se mit à fumer et les hommes du FBI devinèrent que le choc contre le mur avait dû rabattre la carrosserie sur le pneu.
— Que fais-tu ? demanda Aparo en constatant que l’autre voiture n’était plus qu’à quelques centimètres.
La Chrysler heurta l’arrière du taxi. Les deux agents sentirent l’effet de la collision leur remonter dans les épaules et le cou.
Boum. Une fois.
Boum. Deux fois.
Reilly se laissa un peu distancer. Puis il remit les gaz et poussa à nouveau le taxi.
Cette fois, celui-ci partit en tête-à-queue avant de heurter le trottoir en se renversant sur le flanc et d’aller détruire une vitrine. La Chrysler s’immobilisa dans un crissement de freins. Son conducteur observa l’arrière du taxi, toujours couché, émergeant de la devanture du magasin — une boutique d’instruments de musique, constata l’agent spécial.
Les deux policiers sortirent de leur véhicule. Aparo brandissait déjà son arme et son collègue plongeait la main pour attraper la sienne. Mais il réalisa vite que c’était inutile.
Le fugitif avait volé au travers du pare-brise et gisait, face contre terre, au milieu du verre brisé, entouré d’instruments de musique tordus ou cassés. Des partitions retombaient en voletant sur le corps inerte.
Prudemment, Reilly le
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