Le dernier templier
Gagnant l’autre extrémité de la travée, il s’arrêta pour ramasser le sac contenant les reliques volées au musée.
— Vous pouvez pas me laisser là !
Brusquement, il comprit ce que l’homme était en train de faire : il libérait les derniers chevaux.
Branko hurla en voyant la pouliche pommelée surgir la première de son box. Les yeux effrayés, les naseaux dilatés, les trois chevaux terrorisés filèrent comme des flèches vers la sortie pour fuir l’incendie. Avec l’écran de flammes derrière eux, ils paraissaient jaillir de la gueule de l’enfer.
Et Branko Petrovic était menotté en travers de leur seule échappatoire.
25
— Alors, parle-moi de cette poule.
La question fit pester Reilly. Dès l’instant où il avait évoqué devant son partenaire sa conversation avec Tess, il avait compris qu’elle allait lui valoir des remarques ironiques.
— Cette poule ? répéta-t-il sans rire.
Aparo remontait les rues embouteillées du Queens en direction de l’est. Sa couleur mise à part, la Pontiac qu’on leur avait affectée était quasiment un clone de la Chrysler qu’ils avaient détruite en poursuivant Gus Waldron. Ils passèrent près d’un camion immobilisé avec un radiateur fumant. Son conducteur frappait du pied la roue avant dans un geste d’impuissance.
— Je suis désolé. Mlle Chaykin, répondit Aparo, faussement contrit.
Reilly fit de son mieux pour paraître surpris.
— Il n’y a rien à dire.
— Allez !
Nick connaissait son partenaire mieux que quiconque. Reilly n’était pas du genre à se lier avec grand monde.
— Que veux-tu savoir ?
— Elle t’a abordé, comme ça, à l’improviste. Elle te croise furtivement au musée. À peine un coup d’oeil de l’autre côté du hall. Et au milieu de tout ce qu’elle a vécu ce soir-là et des gens qu’elle a croisés, elle se souvient de toi ?
— Cette femme a une mémoire photographique.
— Mémoire photographique, tu parles, ricana Aparo. Cette fille est en chasse, oui.
— Elle n’est pas en chasse. Elle est juste... curieuse.
— C’est ça. Elle a donc une mémoire photographique et un esprit curieux. Et... elle est sacrément sexy, je te le dis. Mais naturellement tu n’as rien remarqué. Non, tu ne pensais qu’à l’affaire.
Sean haussa les épaules.
— O.K. Admettons que je l’ai peut-être un peu remarquée.
— Dieu merci. Il respire. Il est vivant, se moqua Nick. Tu sais déjà qu’elle est célibataire, pas vrai ?
— Je crois l’avoir noté.
En réalité, il avait surtout essayé de ne pas y accorder trop d’attention. Plus tôt, ce matin-là, il avait lu sa déposition recueillie par Amelia Gaines au musée. Dans la foulée, il avait demandé à un analyste du Bureau de chercher toutes les références aux Templiers dans les volumineux dossiers qu’ils conservaient sur les groupes extrémistes de tout le pays.
Aparo le connaissait si bien qu’il pouvait lire en lui à cinquante mètres. Et il adorait le titiller.
— Je ne sais pas, moi, mais une fille comme ça me draguerait, je serais collé à ses basques toute la journée.
— Tu es marié.
— Oui, eh bien je peux rêver, non ?
La Pontiac quittait la 405. Ils seraient bientôt sortis du Queens. L’adresse mentionnée dans le dossier de Petrovic n’était plus valable, mais son ancien propriétaire avait indiqué l’endroit où il travaillait. Les écuries se trouvaient quelque part dans le coin et Reilly attrapa un plan des rues. Il indiqua la direction à Aparo, puis, certain que son partenaire ne renoncerait pas comme ça, il relança lui-même le sujet, à contrecoeur.
— De toute façon, elle ne m’a jamais dragué, protesta-t-il.
— C’est sûr. Ce n’est qu’une citoyenne consciencieuse et responsable qui cherche à nous aider.
Il secoua la tête.
— Allons, je ne te comprends pas. Tu es célibataire. A ma connaissance, tu ne dégages aucune odeur insupportable. Et pourtant... Regarde-nous, les hommes mariés, nous avons besoin de potes comme toi, libres, s’amusant sans contrainte, draguant, pour pouvoir vivre par procuration. Et toi, qu’est-ce que tu fais ? Tu fous en l’air ce partenariat bien pensé en refusant de jouer ton rôle.
Reilly pouvait difficilement le contredire. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas eu de relation durable. Or, même s’il n’entendait pas le révéler à son équipier, il ne pouvait nier l’attirance qu’il avait
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