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Le dernier vol du faucon

Le dernier vol du faucon

Titel: Le dernier vol du faucon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
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coupe. Dans sa profonde sagesse, l'abbé commençait à douter sérieusement de la vocation de son novice.
    Le temps n'était pas encore venu, toutefois, de quitter le monastère. L'ordre de regagner la Cour devait venir du roi en personne pour être plausible. En attendant, il fallait tenter de rentrer dans les bonnes grâces de l'abbé et, lorsque l'ordre viendrait enfin, paraître quitter à regret la vie contemplative.
    Petraja se sentait prêt à se soumettre à n'importe quelle punition plutôt que de s'aliéner la bienveillance du saint homme. Son amitié, son soutien, lui étaient par trop précieux. Grâce à eux, ce serait plus tard des millions de bouddhistes qui lui seraient à leur tour dévoués. A l'exception, peut-être, du Patriarche Suprême, personne au Siam n'avait une telle audience auprès du peuple. Et comme il ne recevait personne du monde extérieur et refusait de se mêler de politique, Petraja n'avait eu d'autre choix pour l'atteindre que d'adopter la vie monastique.
    Il frappa aux panneaux de bois de la cellule et entra. Dans un angle de la minuscule pièce, une pile de rouleaux et de manuscrits anciens montait presque jusqu'au plafond. Dans un autre coin, étaient rangés un bol à aumône, un parasol et un éventail. A part ces rares objets, la cellule était nue car un moine, quel que soit son rang hiérarchique au sein de la communauté, n'avait pas le droit de posséder de biens terrestres.
    Petraja trouva l'abbé assis dans la position du lotus. Son visage était marqué de rides et son crâne rasé faisait ressortir ses oreilles saillantes. Des yeux sereins au regard profond se posèrent sur le novice. Petraja se prosterna et attendit.
    Le vieil homme parla d'une voix si monocorde qu'on aurait dit qu'il psalmodiait. «Vous semblez fatigué, Général. Peut-être jugez-vous trop exigeante notre règle monastique? Etes-vous bien certain d'avoir trouvé votre voie parmi nous?»
    Le malaise de Petraja s'accrut. Jusqu'alors, l'abbé ne l'avait jamais appelé «Général» puisque, comme chaque novice, il était censé avoir rompu tout contact avec sa vie antérieure. Ici, au monastère, il n'était plus le commandant en chef de l'armée, le héros des campagnes de Birmanie, ni un membre du Conseil privé du roi, mais un simple moine ayant fait serment de consacrer le reste de son existence à la méditation et à la prière.
    «Père vénéré, je m'efforce de rompre tous les liens qui me relient encore à mon passé. Mais il arrive néanmoins que celui-ci me rattrape. Je suis indigne.»
    L'abbé garda une expression sévère. «Après tous ces mois de préparation, vous me semblez encore très attaché au monde extérieur. Je commence à craindre pour votre avenir en ces murs. »
    Le cœur de Petraja se serra. «Très Saint Père, vos paroles me confondent. N'ai-je pas suivi le dharma avec la plus grande ferveur?
    - Vous possédez un esprit aiguisé et discipliné, Général. Mais ne préférez-vous pas retourner à la vie séculière?
    - Certainement pas, Vénérable Père», répondit-il un peu trop vite.
    La rage l'envahit à la pensée de ces six longs mois passés à étudier d'interminables codes de conduite, si rigides qu'ils lui interdisaient même de rire trop fort ou, plus absurde encore, de monter un éléphant femelle. Lui, le commandant en chef du Régiment royal des éléphants !
    Le vieil homme continuait de l'observer avec attention. « Vous n'avez pas encore appris à maîtriser votre caractère, Général. Sans parler de vos ambitions terrestres. Vous n'êtes pas fait pour notre vie et je doute que vous le soyez jamais. »
    Petraja fit un effort considérable pour ne pas laisser éclater sa colère et sa frustration. Au contraire, il fit mine d'éprouver le plus profond repentir. «Vénérable Père, je sais qu'il me reste encore beaucoup à apprendre. Je ne suis qu'un humble novice qui n'a pas su encore dépasser les apparences trompeuses de ce monde.
    - Pour les dépasser, rétorqua l'abbé avec fermeté, il faut un engagement total. » Petraja crut déceler sur son visage l'ombre d'un sourire moqueur. «Vous ne pouvez être moine le jour et général la nuit. » Il marqua une pause. «A propos, où étiez-vous la nuit dernière ? »
    L'esprit de Petraja se mit à fonctionner à plein régime. Il lui fallait au plus vite changer de tactique. S'il devait quitter ce monastère avant que le Seigneur de la Vie l'ait fait officiellement appeler au Palais, il était

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