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Le Feu (Journal d'une Escouade)

Le Feu (Journal d'une Escouade)

Titel: Le Feu (Journal d'une Escouade) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Henri Barbusse
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conneries !
    – Ne la comptons pas, elle est trop petite, dit Salavert. Ça fait dix.
    – Dans la veste, quatre. Ça ne fait toujours que quatorze.
    – Y a les deux poches à cartouches : ces deux poches nouvelles qui tiennent avec des sangles.
    – Seize, dit Salavert.
    – Tiens, enfant de malheur, tête de pied, rechasse ma veste. Ces deux poches-là, tu les as pas comptées ! Eh bien alors, qu'est-ce qu'i' t'faut ! C'est pourtant les poches à la place ordinaire. C'est les poches civiles où c'que tu fourres, dans l'civil, ton tire-jus, ton tabac et l'adresse où tu vas livrer.
    – Dix-huit ! fait Salavert, grave comme un fonctionnaire. Y en a dix-huit, pas d'erreur, adjugé.
    À ce moment de la conversation, quelqu'un fait sur les pavés du seuil une série de faux pas sonores, tel un cheval qui piafferait – et blasphémerait.
    Puis après un silence, une voix bien timbrée glapit avec autorité :
    – Eh, là-dedans, on s'prépare ? Il faut que tout soye prêt à c'soîr, et, vous savez, des paxons bien solides. On va en première ligne, cette fois, et même, ça va p't'êt' chauffer.
    – Ça va, ça va, mon adjudant, répondent distraitement des voix.
    – Comment ça s'écrit, Arnesse ? demande Benech qui, à quatre pattes, travaille par terre une enveloppe avec un crayon.
    Tandis que Cocon lui épelle « Ernest » et que l'adjudant, éclipsé, répète son boniment qu'on entend plus lointain, à la porte d'à côté, Blaire prend la parole et dit :
    – Faut toujours, mes enfants – écoutez c'que j'vous dis – mett' vot' quart dans vot' poche. Moi, j'ai essayé de l'coller partout autrement, mais y a qu'la poche que c'est vraiment pratique, crois-moi. Si t'es en marche, équipé, ou bien si t'es déséquipé à naviguer dans la tranchée, tu l'as toujours sous la pince des fois qu'i' s'produit une occase : un copain qu'a du pinard et qui t'veut du bien et qui t'dit : « Donne ta quart », ou bien un marchand qui baguenaude. Mes vieux cerfs, écoutez c'que j'dis, vous vous en trouv'rez toujours bath : mets ton quart é'd'dans ta poche.
    – Plus souvent, dit Lamuse, qui tu m'voiras mett' mon quart dans m'poche. S't'une idée à la graisse d'hérisson et à la mords-moi le doigt, ni plus ni moins, j'préfère beaucoup mieux l'amurer à ma bretelle de suspension avec un crochet.
    – Attaché à un bouton d'la capote, comme le sachet à masque, c'est plus mieux. Pa'ce que suppose que t'ôtes ton équipement, alors t'es vert si justement i' passe du vin.
    – Moi, j'ai un quart boche, dit Barque. C'est plat, ça s'met dans la poche de côté, si on veut, et ça entre très bien dans la cartouchière, un coup qu't'as foutu tes cartouches en l'air, ou qu'tu les as carrées dans ta musette.
    – Un quart boche, c'est ça qu'est pas extra, dit Pépin. Ça tient pas d'bout. Ça sert juste à encombrer.
    – Attends voir, bec d'asticot, dit Tirette qui ne manque pas de psychologie : cette fois-ci, si on attaque, comme le juteux a eu l'air de nous l'casser, tu en trouv'ras p't'êt' un, d'quart boche, et alors, c'est ça qui s'ra extra !
    – L'juteux a dit ça, observe Eudore, mais i' sait pas.
    – Ça contient plus qu'un quart, l'quart boche, remarque Cocon, vu qu'la contenance du quart juste, elle est marquée d'un trait aux trois quarts du quart. Et t'es toujours avantageux d'en avoir un grand, parce que si t'as un quart qui tient juste un quart, pour qu'tu ayes un quart de jus, de vin, ou d'eau bénite ou d'n'importe quoi, i' faut qu'on l'emplisse rasibus et on l'fait jamais dans les distrib, et, si on l'fait, tu l'renverses.
    – J'te crois qu'on l'fait plutôt pas, dit Paradis, outré quand il évoquait ces procédés. L'fourier i' sert en foutant l'doigt dans l'quart, et il a collé deux gnons sur l'cul du quart. Total, t'es fabriqué du tiers, et tu t'accroches trois belles ceintures l'une sur l'autre.
    – Oui, dit Barque, c'est vrai. Mais faut pas non plus un quart trop grand, parc' qu'alors celui qui t'sert, i' s'méfie ; i' t'en fout une goutte avec la tremblote, et pour ne pas t'en donner plus que la m'sure, i' t'en donne moins, et tu t'mets la tringle, avec la soupière dans les pattes.
    Cependant, Volpatte remettait un à un dans ses poches les objets dont il avait composé un étalage. Arrivé au porte-monnaie, il le considéra d'un air plein de pitié.
    – Il est salement plat, le frère.
    Il compta :
    – Trois francs ! Mon vieux, faudrait voir à

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