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Le Fils de Pardaillan

Titel: Le Fils de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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Il savait donc ?… Vous vous êtes laissé surprendre ?…
    Saint-Julien n’eut pas la force de répondre. Mais ses yeux, en un scintillement, dirent : « oui ». Il se raidit en un spasme suprême, retomba doucement et demeura à jamais immobile, les yeux grands ouverts.
    – L’imbécile ! gronda Léonora.
    Elle se détourna du cadavre, alla s’asseoir dans son fauteuil et la tête appuyée sur la main, les yeux perdus dans le vague, elle se plongea dans une sombre rêverie.
    – Où l’as-tu trouvé ? demanda-t-elle brusquement en fixant sur Saêtta l’éclat soupçonneux de son œil de feu.
    Saêtta coula un furtif regard sur le corps déjà rigide, et, rassuré, très calme, l’air indifférent :
    – Rue Saint-Honoré, où il s’était traîné, dit-il en soutenant avec assurance l’examen pénétrant de la terrible jouteuse.
    Lentement, Léonora détourna son regard. Saêtta eut un imperceptible sourire. Il comprenait que le soupçon naissant était écarté.
    La Galigaï allongea le bras et frappa sur un timbre. Au laquais accouru, elle désigna de la tête le corps raide de l’homme mort à son service. Le laquais comprit. Il ne s’étonna pas. Simplement, il appela un camarade et, à eux deux, ils enlevèrent le cadavre.
    Elle se remit à songer. Au bout d’un instant, elle dit avec un calme sinistre, comme si elle continuait une conversation :
    – Tu disais donc, Saêtta, qu’en conduisant cette jeune fille dans une maison isolée, il serait possible de faire d’une pierre deux coups et de nous débarrasser du roi et de ton fils ?
    – Enfin ! rugit Saêtta, intérieurement. Je savais bien que tu y viendrais ! Ce n’aura pas été sans peine.
    Et tout haut, il développa, en l’amplifiant, en précisant des détails sérieusement mûris, le même plan que nous l’avons entendu esquisser la veille. Quand il eut terminé, Léonora approuva.
    – Je crois décidément que ton idée est bonne. Je m’en tiendrai là. Reviens demain, vers les dix heures du matin. Je te donnerai mes instructions à ce sujet. Va !…
    Saêtta se retira le cœur débordant d’une joie furieuse.
    Concini, la veille, était allé rue des Ecrivains. Il avait été reçu par le bras droit d’Acquaviva, frère Parfait Goulard, avec lequel il s’était entretenu.
    Mieux renseignée, ou honorée d’une plus grande confiance, Léonora se rendit au Fort aux Dames. Elle pénétra dans cette petite mansarde de la maison mystérieuse, auprès du redoutable chef de la compagnie de Jésus, et c’est directement avec lui-même qu’elle eut un long entretien.
    En sortant de la prison, elle se rendit au Louvre. Là elle eut un autre entretien aussi long, aussi mystérieux et sans doute aussi terrible avec Marie de Médicis, la maîtresse de son mari.
    A onze heures, elle était de retour chez elle, où Saêtta l’attendait, non sans impatience.
    q

Chapitre 38
    V oici ce que voyait Jehan, toujours prosterné sur la plaque d’acier dont il ne sentait plus la brûlure.
    Au moment où la griffe de Concini s’abattait sur l’épaule de Bertille, la porte s’ouvrit brusquement. Deux femmes entrèrent. L’une, qui paraissait très calme, était la femme de Concini : Léonora Galigaï. L’autre était une majestueuse et imposante personne dont le visage était recouvert d’un loup de velours noir.
    Concini s’était arrêté net. Tout d’abord, il n’avait vu que sa femme. Il s’était avancé sur elle, l’œil sanglant, les crocs retroussés, le poing crispé sur le manche du poignard. Une seconde encore et c’en était fait de Léonora.
    Elle avait très bien vu l’attitude menaçante de son mari et que sa vie ne tenait qu’à un fil. Pourtant, elle ne broncha pas. Et le regard dont elle l’enveloppait comme d’une caresse très douce était chargé d’une surhumaine tendresse.
    Au moment où il allait lever le bras et frapper, Concini aperçut l’autre femme et sans doute il la reconnut malgré le masque, car il recula, livide, hagard, et il se courba jusqu’à terre et demeura ainsi, dans une sorte d’agenouillement.
    Sous le masque, les yeux de la femme eurent, eux aussi, une singulière expression de tendresse et elle eut un geste amical à l’adresse de Concini. Celui-ci se redressa alors et prodige de force et de volonté, montra un visage calme, apaisé, souriant.
    – Vous voyez madame, dit tranquillement Léonora, il était temps que nous arrivions pour épargner à Concini

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