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Le Fils de Pardaillan

Titel: Le Fils de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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voix qui n’admettait pas la réplique :
    – Marche, vieille chienne ! et marche droit… Sans quoi, ce n’est pas de l’or que je te donnerai, moi, c’est de la dague que je donnerai dans ton ventre !…
    Cette fois, dame Colline Colle comprit que les choses menaçaient de se gâter pour elle et, malgré que le sourire de Carcagne la rassurât un peu, elle jugea plus prudent d’obéir.
    Elle monta au premier, suivie par les trois braves qui retenaient leur souffle. Elle s’arrêta à la porte de la chambre de Bertille et elle gratta doucement en gémissant :
    – Demoiselle Bertille ?… demoiselle Bertille ?… ouvrez, je vous prie. Bertille dormait profondément et sans doute rêvait-elle de choses très douces, car une expression de bonheur irradiait son gracieux visage, un sourire enchanteur découvrait ses petites dents blanches, pareilles à des perles rares dans un minuscule écrin de velours pourpre.
    A l’appel de la matrone, elle se dressa sur sa couche et, à moitié endormie encore, nullement effrayée d’ailleurs, elle demanda de sa voix harmonieuse :
    – Est-ce vous qui gémissez, dame Colline Colle ?
    – Oui, demoiselle ! Ouvrez-moi, je vous en prie… Je suis malade…’bien malade.
    Le premier mouvement de la jeune fille fut de sauter à bas du lit et de se vêtir à la hâte de cette ample robe de laine blanche qu’elle portait au moment où elle s’était dressée entre le roi et Jehan. D’autant plus inquiète que la matrone, poursuivant la tactique improvisée, de l’autre côté de la porte, ne cessait pas de geindre et de se lamenter. Et tout en s’habillant, elle cria :
    – Patientez un moment, je viens !
    Effectivement elle se mit en marche vers la porte. Mais elle s’arrêta presque aussitôt, le front barré par un pli soucieux. Et en elle-même, elle songea :
    – Cette femme est rapace et avare… Je l’aurais quittée depuis longtemps si… (Elle rougit, pensant à Jehan.) Pour une poignée d’or elle a voulu me livrer au roi… pour un peu d’or, elle recommencera au profit d’un autre… Qui me dit que ce n’est pas un piège ?
    Cette pensée qui traversa son cerveau fit que, au lieu d’ouvrir comme elle avait failli le faire inconsidérément, elle interrogea :
    – Etes-vous donc réellement si malade ?
    Et elle écouta attentivement, s’efforçant de démêler la vérité dans les intonations.
    Malheureusement, elle avait affaire à une comédienne de premier ordre qui poursuivit ses gémissements avec un naturel merveilleusement joué et qui répondit, sans que rien trahît la dissimulation dans sa voix :
    – Il me semble que je vais mourir !… Ouvrez, pour l’amour de Dieu !… Vous défiez-vous donc de moi ?
    Oui, elle se défiait, et elle n’avait pas tort. Mais c’était une nature généreuse et sous son apparence frêle et délicate, elle cachait un caractère énergiquement trempé. Elle alla droit à un coffre et y prit un petit poignard qu’elle cacha dans son sein, d’un air résolu. Ceci fait, elle revint à la porte.
    Comme si une sorte de prescience l’avait avertie du danger qu’elle courait, elle ne put se décider à ouvrir. Elle parlementa, et, répondant à la question de sa propriétaire :
    – C’est que, dit-elle sans acrimonie, vous avez ouvert la porte du logis à des étrangers… cette nuit même.
    – C’était le roi, demoiselle !… Peut-on résister aux ordres du roi ?… Ah ! que je souffre !…
    C’était le roi ! Argument péremptoire, à l’époque surtout. Bertille était trop de son temps pour ne pas admettre comme valable l’excuse de la misérable matrone. Pourtant elle se raidit encore contre la pitié qui l’envahissait :
    – Qui me dit que ce n’est pas encore une trahison ?… Sais-je si vous n’avez pas encore introduit quelque malfaiteur ?
    – Je suis seule, demoiselle ! Tout a fait seule, je vous le jure sur ce que j’ai de plus sacré !… Et je souffre !… Seigneur Jésus ! me laisserez-vous donc mourir comme un pauvre chien sans me prêter l’assistance qui se doit entre chrétiens ?
    Cette fois la jeune fille se sentit vaincue par le ton lamentable de l’hypocrite créature. Peut-être eut-elle le tort de se fier à l’arme qu’elle avait glissée dans son sein. Quoi qu’il en soit, elle dit :
    – A Dieu ne plaise, dame Colline Colle ! J’ouvre… Mais s’il m’arrive malheur de votre fait, vous en répondrez devant le souverain

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