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Le Fils de Pardaillan

Titel: Le Fils de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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aussi coupable que vous le pensez… Il le fallait, madame : une menace était suspendue sur votre tête et je n’avais que ce moyen pour vous sauver… Le mépris dont vous m’accablez est aussi injuste qu’il m’est intolérable… Je vous le jure, madame, jamais passion ne fut aussi profonde, aussi sincère, aussi respectueuse que celle que vous m’avez inspirée !
    Jusque-là, Bertille avait gardé une attitude pétrifiée. On n’aurait su dire si elle écoutait seulement. Voyant qu’il faisait une pause avec un air de souveraine dignité, elle prononça :
    – Un mot, un seul : Suis-je libre, oui ou non ?
    – Eh bien ! haleta Concini, tenez, madame, oui, vous êtes libre !… Allez, retournez paisiblement chez vous !…
    Malgré l’empire prodigieux dont elle avait fait preuve jusque-là, la jeune fille ne put retenir un mouvement de joie. Un peu de sang reparut sur ses joues si pâles, et d’un geste impulsif, sa main s’appuya sur la portière, comme si elle eût voulu user à l’instant de cette liberté rendue.
    Mais déjà Concini reprenait, la brûlant de son souffle enflammé :
    – En échange, je ne vous demande qu’une chose, oh ! si peu : laissez tomber sur moi un regard moins sévère. Dites un mot… un seul mot d’espoir !… un mot, madame, est-ce trop exiger de vous ?
    La main crispée sur l’appui de la portière retomba mollement, et, du bout des lèvres, elle laissa tomber :
    – Après la félonie et la violence, le marchandage et l’injure !… Laquais !
    Et tournant le dos d’un geste las, elle s’accota, ferma les yeux et parut s’assoupir.
    Le favori eut un geste de rage et de menace. Le mot l’avait cinglé comme un coup de cravache en plein visage. Une horrible imprécation jaillit de sa gorge contractée et remettant son chapeau qu’il enfonça d’un coup de poing furieux, il gronda :
    – Laquais ! soit… J’agirai donc en laquais !…
    Et profitant de ce que la jeune fille lui tournait le dos, saisissant les deux écharpes qu’il avait posées sur la portière, d’un geste prompt il les lui jeta sur la tête et la bâillonna de nouveau avant qu’elle eût esquissé un geste de défense. Il paraît qu’il ne se fiait plus à la parole qu’elle avait donnée de ne pas appeler.
    Soulagé par cette violence, il ordonna d’un ton rude :
    – En route, vous autres !… Où vous savez.
    La litière s’ébranla, escortée par les trois braves, la rapière au poing, suivie de Concini qui, les lèvres retroussées par un rictus terrible, marmonnait en la couvant des yeux :
    – Laquais !… Ce mot dont tu viens de me souffleter, la belle, te fera verser des larmes de sang !…
    q

Chapitre 13
    L a petite troupe prit la direction de la Seine.
    Saêtta, sorti de son trou, se faufilait derrière elle.
    A ce moment, du côté opposé, un cavalier s’avançait d’un pas allongé, martelant le sol d’un talon ferme et sonore. C’était Jehan le Brave qui regagnait son logis.
    Il s’arrêta sous le balcon de Bertille, et poussé par son inquiète sollicitude, il étudia les environs d’un coup d’œil rapide.
    Il vit au loin le groupe formé par la litière et son escorte, et il se détourna avec indifférence pour revenir aux alentours immédiats du logis de celle qu’il aimait.
    Il ne vit rien d’anormal. Tout lui parut calme, paisible, honnêtement endormi. Il demeura un moment à rêver, les yeux fixés sur le balcon, et poussant un gros soupir, il ouvrit sa porte. Bien qu’il fût parfaitement sûr que nul œil indiscret ne pût le voir, il jeta un dernier regard méfiant autour de lui et envoya du bout des doigts un baiser furtif dans lequel il mit tout son cœur.
    Après quoi, honteux comme un larron pris sur le fait, rougissant comme un jouvenceau, il gravit quatre à quatre les marches raides de l’étroit escalier aboutissant à sa mansarde.
    Pendant ce temps, Concini avait continué sa marche. Coupant la place des Trois-Maries, qu’on venait d’agrandir pour dégager les abords du Pont-Neuf, nouvellement livré à la circulation, il traversa ce pont. Tournant à gauche, il s’engagea sur le quai des Augustins, puis, par les rues de la Huchette et de la Bûcherie, tournant encore une fois à gauche, il pénétra dans une voie étroite et peu fréquentée, où ne se voyaient que de rares maisons, qu’on appelait la rue des Rats et qui aboutissait à la berge du fleuve.
    Si on nous demande pourquoi ce nom qui, à

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